OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES. APPENDICE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES. APPENDICE
  • DES PASSIONS ET DE LEUR EMPIRE
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 388-390.
  • BH 5
Informations détaillées
  • 1 ASCESE
    1 CHATIMENT
    1 INTELLIGENCE
    1 PASSIONS
    1 PASSIONS MAUVAISES
    1 REFORME DU COEUR
    1 THOMAS D'AQUIN
    1 VOLONTE
  • 1875
La lettre

I. Rien de plus humiliant que certaines passions, lorsque, communes à l’homme et à la brute, elles dominent tellement l’homme qu’elles le font ressembler à la brute.

Il y a des espérances, des craintes, des terreurs, des audaces, des haines, des appétits de vengeance entièrement indignes de l’homme et qui, pourtant, sont, à son insu, les mobiles secrets de ses actes. On se laisse conduire, en quelque sorte sans s’en douter; le caractère se forme et l’on succombe à l’attrait de la passion ou, pour mieux dire, on est sous son continuel esclavage.

C’est de l’irréflexion, c’est de la faiblesse de volonté.

Ce qui est certain, c’est qu’on est sous le coup de la passion, et que les pensées, les sentiments, les actes, les paroles en sont tout empreints.

II. -N’est-ce pas là mon histoire, et combien de fois n’ai-je pas succombé à ces dispositions de mes passions?

Le détail est ici bien inutile, car enfin je me connais, et comme chacun est plus ou moins dominé par les passions qui lui sont propres, c’est à moi à examiner quelles sont les miennes, quelles en sont la force, la tyrannie, les habitudes, afin d’en étudier les ravages et de chercher une bonne fois à m’en affranchir.

III. -Déjà, dans l’ordre naturel, j’ai trois principaux moyens, si je le veux bien, de m’affranchir de mes passions.

1° La réflexion. En effet, les passions étant presque toujours communes à l’homme et à la brute, l’homme peut les dominer par son intelligence, en considérant l’état inférieur où elles le ravalent, leurs causes, les occasions qui les font éclater.

2° La volonté. Incontestablement les passions affaiblissent la volonté, quand elle se laisse entraîner; mais, aidée par l’intelligence, la volonté peut réagir. La volonté, étant un principe supérieur, peut dominer, commander et, dans tous les cas, lutter jusqu’à ce qu’elle triomphe.

3° Le châtiment. Oui, l’homme peut infliger à ses passions un légitime châtiment, quand, rentré dans le calme, il s’aperçoit du mal qu’elles lui ont fait. Et rien ne prouve la supériorité de la raison humaine sur les passions comme le châtiment que, en tant que reine, la raison inflige à ses sujettes révoltées.

IV. -Voilà pour l’homme livré à lui-même.

Le sage du paganisme peut arriver jusque-là.

Mais le chrétien, le religieux surtout, peuvent bien plus. Sachant que les passions en révolte sont une suite du péché, et que la grâce leur est offerte pour combattre au dedans d’eux-mêmes le péché et ses causes, c’est après avoir invoqué le secours d’en haut qu’ils commencent un combat rude, pénible, incessant, où ils seront quelquefois battus, mais où, avec la prière, les prévenances de la grâce, ses dons continués, ils finiront par vaincre.

Seigneur, quelles que soient mes passions, je ne veux plus leur laisser ni paix ni trêve, et je compte sur votre miséricorde pour m’accorder les secours, que vous ne me devez point, mais que vous voulez bien me promettre, pour triompher de mes passions et de moi-même(1).

Notes et post-scriptum
1. Cette méditation est comme un résumé du traité des passions. Le P. d'Alzon, comme on le voit, a omis complètement toutes les questions que saint Thomas consacre aux passions de l'irascible: L'*espérance* et le *désespoir* (q. XL); la *crainte* (Q. XLI), son objet (Q. XLII), sa cause (q. XLIII), ses effets (q. XLIV); l'*audace* (q. XLV); enfin la *colère* (q. XLVI), ses causes (q. XLVII) et ses effets (q. XLVIII).