OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES. APPENDICE

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|MEDITATIONS SUR LA PERFECTION RELIGIEUSE|II. MEDITATIONS POUR RETRAITES. APPENDICE
  • IX. SUR L'INFIDELITE.
    [IIa - IIae, q. X.]
  • Méditations sur la perfection religieuse pour les Augustins de l'Assomption. Paris, 1927, II, p. 427-430.
  • BI 9
Informations détaillées
  • 1 ATHEISME
    1 CHATIMENT
    1 DESESPOIR
    1 FOI
    1 HAINE
    1 INFIDELITE
    1 PAGANISME
    1 PECHE
    1 THOMAS D'AQUIN
    1 VERTUS
    2 CORNEILLE, CENTURION
    2 PAUL, SAINT
  • 1875
La lettre

I. [L’infidélité est-elle un péché? (Ibid., a. 1.)]

Si la foi est une vertu, l’infidélité est un péché ou du moins un terrible châtiment. L’infidélité est un châtiment pour tous ceux qui à cause d’autres péchés sont indignes de recevoir le don de la foi; telle est la situation d’une foule de païens et d’hérétiques; mais elle est un péché pour ceux qui volontairement la repoussent. Enfin, elle est un péché et un châtiment à la fois pour ceux qui, l’ayant eue, l’ont repoussée, et de qui Dieu se retire. Tels sont les hommes au milieu desquels je dois vivre et à qui, par la surabondance de ma foi je dois autant qu’il dépendra de moi communiquer la lumière. Je dois leur faire apprécier le bienfait de la foi et leur inspirer le désir de croire

II. [L’infidélité est le plus grand des péchés. (Ibid., a. 3.)]

L’infidélité est le plus grand de tous les péchés. Tout péché est d’autant plus grave qu’il nous éloigne davantage de Dieu Or, ce qui nous éloigne le plus de Dieu, c’est ou refuser de le connaître ou se faire de lui une idée fausse, de sorte que ne le connaissant pas tel qu’il est, nous nous écartons de lui au lieu de nous en approcher.

Or, telle est la situation de l’infidèle.

Ah! quel zèle ne dois-je pas déployer pour arriver à procurer la foi au plus grand nombre d’âmes possible, soit pour les arracher à l’enfer, soit surtout pour procurer à Dieu la gloire de détruire pour son amour ce qu’il déteste le plus: le péché (1).

III. [Toute action d’un infidèle est-elle un péché? Y a-t-il plusieurs espèces d’infidélités? (Ibid. a. 4, 5.)]O

Sans doute, toute action d’un infidèle n’est pas un péché. Nous voyons le centurion Corneille, encore infidèle, et qui pourtant avait fait des actions agréables à Dieu (2).

Mais, d’autre part, tandis que toute vertu est une parce que toute vertu a un objet qui la spécifie, il y a divers moyens d’aller contre cet objet et par conséquent d’aller contre cette vertu. Donc si la foi est une par son objet, les péchés contre la foi peuvent se diversifier à l’infini. Ah! combien ne dois-je pas trembler de tomber dans quelqu’un de ces péchés multiples, et combien ne dois-je pas chercher à me tenir sur mes gardes.

IV. [Doit-on discuter publiquement avec les infidèles? (Ibid., a. 7.)]

Avec quelles précautions ne dois-je pas entrer en communication avec les hommes dépourvus de foi! Nescitis quia modicum fermentum totam massam corrumpit?(3) disait l’Apôtre. S’il en est ainsi, à quoi ne sont pas exposées les âmes ignorantes et faibles dans la foi? et combien grande est la sagesse de l’Eglise qui repousse les communications de ses enfants avec les infidèles.

Toutefois, il est évident que pour dissiper les ténèbres de l’incrédulité dans certaines âmes, il faut leur apporter la lumière. Mais alors quelle prudence pour ne pas souffrir soi-même du contact de l’incrédulité, quelle foi ardente ne m’est pas nécessaire! quel amour des âmes, quel zèle pour la gloire de Dieu ne dois-je pas avoir!

O mon Dieu, faites-moi apprécier le bienfait de la foi, en proportion de l’infidélité dont je suis tous les jours le témoin, et donnez-moi une ardeur digne de vous, pour vous faire connaître aussi loin qu’il dépendra de moi.

Notes et post-scriptum
1. Saint Thomas enseignera plus loin (q. XII, art. 3) que le plus grand des péchés est le désespoir, et, plus loin encore (q. XXXIV, art. 2), que c'est la haine. La contradiction n'est qu'apparente et les conclusions du saint docteur sortent du même principe envisagé sous des aspects différents. La gravité du péché se mesure, en effet, d'après l'éloignement de Dieu. Or, par l'infidélité l'homme nie la vérité divine, par la haine il s'oppose à la bonté de Dieu, par le désespoir il se détourne de Dieu qu'il estime impossible de posséder jamais. L'infidélité et la haine sont donc contraires à Dieu dans sa nature même au lieu que le désespoir lui est contraire seulement dans le bien auquel il nous fait participer. D'où il résulte que le désespoir, quoique plus funeste par rapport à nous, est moindre en soi que l'infidélité et la haine. Quant au rapport de gravité entre le péché de haine et le péché d'infidélité, il faut dire que la haine dépasse le péché d'infidélité en tant qu'elle lui donne ce qu'il a de volontaire, et que le péché est d'autant plus grave qu'il est plus volontaire. Il n'y a pas, en effet, d'infidélité volontaire sans qu'elle soit animée de haine contre la vérité proposée. En ce sens, la haine est cause de l'infidélité et l'emporte sur l'infidélité, comme la cause l'emporte sur l'effet.2. Au livre des Actes, chapitre X, 4, l'ange qui apparaît à Corneille lui dit: "Tes prières et tes aumônes sont montées devant Dieu et il s'en est souvenu: *Orationes tuae et eleemosynae tuae ascenderunt in memoriam in conspectu Dei."
3. "Ne savez-vous pas qu'un peu de levain corrompt toute la pâte?" (I Cor. V, 6. -Gal. V, 9.)