OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|INSTRUCTIONS AUX TERTIAIRES DE L’ASSOMPTION.|INSTRUCTIONS POUR LES REUNIONS DU TIERS-ORDRE (1879).

Informations générales
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|INSTRUCTIONS AUX TERTIAIRES DE L'ASSOMPTION.|INSTRUCTIONS POUR LES REUNIONS DU TIERS-ORDRE (1879).
  • LE CRUCIFIEMENT.
  • Instructions aux Tertiaires de l'Assomption, 1878-1879. Paris, Imprimerie de la Maison de la Bonne Presse, 1930, p. 158-163.
  • CO 144
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA CROIX
    1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 ANEANTISSEMENT DE JESUS-CHRIST
    1 ANGES
    1 AUGUSTIN
    1 BIEN SUPREME
    1 CROIX DE JESUS-CHRIST
    1 CRUCIFIEMENT DE L'AME
    1 DEMONS
    1 HAINE CONTRE DIEU
    1 HAINE CONTRE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE
    1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
    1 INJUSTICES
    1 JESUS-CHRIST DOCTEUR
    1 JUIFS
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 MECHANTS
    1 MORT DE JESUS-CHRIST
    1 OBEISSANCE DE JESUS-CHRIST
    1 ORGUEIL
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PATIENCE DE JESUS-CHRIST
    1 PECHE
    1 PECHE ORIGINEL
    1 SACRIFICE DE JESUS CHRIST
    1 SOUFFRANCES DE JESUS-CHRIST
    1 VOLONTE DE DIEU
    2 ADAM
    3 JERUSALEM
    3 JERUSALEM, GOLGOTHA
  • Tertiaires de l'Assomption
  • 1879
  • Nîmes
La lettre

La divine victime est arrivée au sommet du Calvaire; la croix est étendue à terre, et le divin Sauveur est couché comme sur un autel. On lui perce les pieds et les mains après l’avoir dépouillé de ses vêtements. La croix est élevée et le voilà suspendu entre le ciel et la terre. Contemplons Jésus en un pareil état, et constatons: son assujettissement, sa honte, sa souffrance.

I. -Son assujettissement.

Il a été livré à ses bourreaux. Le voilà « comme une brebis conduit à la mort: Tanquam ovis ad occisionem ductus est« (2). Quelle horrible compagnie que celle où il est désormais réduit! Les bourreaux ne l’ont reçu que pour lui faire subir le dernier supplice. Ainsi, en combien de circonstances, au milieu de personnes qui me veulent du mal ne puis-je pas, si je le veux, imiter l’assujettissement de Jésus, car, après tout, ceci se passe par l’effet de sa volonté.

Oblatus est quia ipse voluit(3). De toute éternité, il a voulu cette heure formidable où, selon son expression, il déposerait son âme de lui-même: Ego pono eam a meipso(4). Etrange, unique situation! Jésus-Christ est livré pour être mis à mort; mais rien n’arrive que par sa volonté divine, à laquelle se soumet sa volonté humaine. La justice divine plane sur la croix, pour que toute douleur soit prodiguée à l’homme de douleurs.

Mais il y a aussi l’injustice des hommes. Voilà leur libérateur. Contemplez à quel degré d’esclavage il est réduit par eux, et lui se livre à toute leur scélératesse: Tradebat autem judicanti se injuste(5). Quel spectacle! L’innocent soumis à tous les assujettissements, même à celui de la croix, dépendant des plus grands criminels, et les plus monstrueux scélérats triomphant de la torture du juste

La révolte de l’homme contre Dieu a introduit la mort dans le monde. L’obéissance jusqu’à la mort du Dieu fait homme ramènera la vie éternelle, mais à la condition qu’il subira le supplice le plus assujettissant, et qu’il l’acceptera jusquà son dernier soupir: Oblatus est quia ipse voluit. Aussi l’assujettissement de son corps sacré à la croix n’est-il que la figure de l’assujettissement de son âme. Jugeons par là de l’état auquel cette âme divine est réduite.

II. -Humiliation.

Humiliation profonde qu’il éprouve, « étant rangé avec les scélérats: Et cum iniquis reputatus est« . Il convenait que celui qui venait payer pour tous les pécheurs subît la compagnie des pécheurs; mais, quelque tendresse que Jésus ait pour les âmes, quelle horreur leur souillure ne doit- elle pas lui inspirer! Il s’y résigne pourtant, ainsi le veut la justice divine. Jésus a voulu être humilié, il le sera jusqu’au bout; il passera par toutes les insultes et par le triomphe de toutes les colères; il subira ces affronts dans le triomphe des pharisiens et les verra passer devant lui, secouer la tête et désaltérer leur haine dans son sang et dans son supplice.

Humiliation aux yeux de tout le peuple. Les impies avaient dit: Morte turpissima condemnemus eum(7). Et la voilà cette mort ignominieuse que tout le peuple de Jérusalem avait demandée, et que le même peuple peut contempler désormais. Ainsi la honte pour lui est à son comble. Exposé aux regards de tous dans une honteuse nudité, le nouvel Adam subit dans tous les détails les conséquences que le péché du premier Adam avait attirées sur sa postérité. Le voilà ainsi placé entre le ciel et la terre. Que les anges le contemplent et cherchent inutilement à le couvrir de leurs ailes; que les démons le contemplent et commencent à deviner dans ces humiliations le triomphe sur leur orgueil; que les hommes le contemplent et voient dans leur Dieu crucifié la condamnation de toutes leurs fausses et coupables prétentions. Voici que dans sa croix Jésus-Christ condamne toute volonté qui cherche à s’élever.

Refert considerare qualis ascendit. Nudus crucem ascendit, nudum ecce video. Tatis ergo ascendat qui saeculum vincere parat, ut saeculi adjumenta non quaerat(8).

Car il est impossible d’être simple chrétien sans être préparé de coeur à toutes les injures.

III. -Douleur.

Et quelles douleurs n’endura pas le Sauveur sur la croix. David, son aïeul, avait composé le cantique de sa mort, et il avait dit: Foderunt manus meas et pedes meos, dinumeraverunt omnia ossa mea(9). Les voilà percés ces pieds sacrés, ces mains divines; elles sont tout endolories pour nous rendre la joie, car un prophète a dit: Haurietis aquas in gaudio de fontibus Salvatoris(10). Mais à quel prix cette joie a-t-elle été achetée? Les douleurs pour lui, les joies pour nous, mais il n’en souffre que plus cruellement.

La tension disloque tous ses os: Dinumeraverunt omnia ossa mea. Tout, jusqu’à la moelle est torturé, et il veut qu’il en soit ainsi: A planta pedis ejus usque ad verticem, non est in eo sanitas(11). Ses pieds sont percés; sa tête, couronnée d’épines, se meurtrit au moindre mouvement qu’il fait sur le bois de la croix.

Ah! du haut de cette croix comme Jésus nous prêche éloquemment la doctrine de la douleur telle que les vrais chrétiens peuvent seuls la comprendre, et que saint Augustin a raison de s’écrier: Lignum ubi erant fixa membra Domini morientis etiam calhedra fuit magistri docentis(12).

Allons à cette chaire, allons à ce docteur qui enseigne encore plus par ses exemples que par ses paroles. Allons à ses plaies qui le clouent à la croix. Demandons-lui, comme le prophète: sunt plagae istae in medio manuum tuarum?(13) Il répondra: His plagatus sum in domo eorum qui diligebant me*(14). Ce qui peut s’entendre en deux sens: ou de ces ennemis qui aimaient le Messie attendu, et qui ne l’ayant pas voulu reconnaître l’ont condamné à mort, soit dans le temple, soit dans la maison de Caîphe; ou bien -autre interprétations plus terrible, -de ceux qui prétendent aimer Jésus-Christ, les chrétiens, et qui le crucifient tous les jours par leurs péchés.

Quel horrible spectacle! Et qui peut dire: Je n’ai jamais crucifié Jésus- Christ. Ah! quand prendrons-nous, au contraire, la résolution de nous immoler avec lui à la croix par un crucifiement de tous les jours?

Notes et post-scriptum
1. "Ils le crucifièrent." (Luc. XXIIII, 33).
2. Act. VIII, 32.
3. "Il a été offert, parce que lui-même l'a voulu." (Is. LIII, 7.
4. "Je la donne (*mon âme*) de moi-même." (Joan. X, 18.)
5. "Il se livrait à celui qui le jugeait injustement." (I Petr. II, 23.)
6. Marc. XV, 28.
7. "Condamnons-le à la mort la plus infâme." (Sap. II, 20.)
8. "Il importe de considérer dans quel appareil il monte sur la croix. C'est tout nu qu'il y monte. Je l'y vois nu. Tel doit être celui qui, en y montant, se prépare à vaincre le siècle; qu'il ne recherche point les secours du siècle." (AMBROSIUS, *in Lucam*, 1. X, c. XXIII.)
9. "Ils ont percé mes mains et mes pieds, ils ont compté tous mes os." (Ps. XXI, 17, 18)
10. "Vous puiserez de l'eau avec joie aux fontaines du Sauveur." (Is.XII, 3.)
11. "Depuis la plante des pieds jusqu'au sommet de la tête, il n'y a rien de sain en lui." (Is. 1, 6.) -Isaïe parle ici des malheurs dont le peuple d'Israël avait été frappé, et ces paroles s'appliquent figurativement à Jésus-Christ.
12. "Le bois où sont cloués les membres du Sauveur mourant a été comme la chaire du haut de laquelle ce divin maître nous a enseignés." (Aug. in Joan. Tr. CXIX, 2.)
13. "Que sont ces plaies au milieu de vos mains?" (Zach. XIII. 6.)
14. "J'ai été percé de ces plaies dans la maison de ceux qui m'aimaient." (Ibid.) été frappé, et ces paroles s'appliquent figurativement à Jésus-Christ.