OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|RETRAITE SUR LA CONNAISSANCE DE NOTRE-SEIGNEUR JESUS-CHRIST.|[APPENDICE].

Informations générales
  • TD 47.49
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES|RETRAITE SUR LA CONNAISSANCE DE NOTRE-SEIGNEUR JESUS-CHRIST.|[APPENDICE].
  • PASSION. 1873. (1)
  • Prêtre et Apôtre, XIV, N° 157, mars 1932, p. 62-65.
  • TD 47, P. 49-57.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA CROIX
    1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AGONIE DE JESUS-CHRIST
    1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 AMOUR DIVIN
    1 ANEANTISSEMENT DE JESUS-CHRIST
    1 ATHEISME
    1 AVARICE
    1 BIEN SUPREME
    1 COMPASSION DE LA SAINTE VIERGE
    1 CONSERVATEURS ADVERSAIRES
    1 CROIX DE JESUS-CHRIST
    1 EGOISME
    1 ENERGIE
    1 EUCHARISTIE
    1 GRACE
    1 HAINE CONTRE DIEU
    1 HUMILITE DE JESUS-CHRIST
    1 IDEES DU MONDE
    1 INCONSTANCE
    1 INGRATITUDE ENVERS DIEU
    1 INJUSTICES
    1 JESUS-CHRIST MODELE
    1 JOIE SPIRITUELLE
    1 JUIFS
    1 LACHETE
    1 LEGERETE
    1 LUTTE CONTRE LE CORPS
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 LUXURE
    1 MAITRISE DE SOI
    1 MARIE NOTRE MERE
    1 MORT DE JESUS-CHRIST
    1 ORGUEIL
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PECHE
    1 PECHEUR
    1 PENITENCES
    1 PEUPLE
    1 PURIFICATION
    1 REFORME DE L'INTELLIGENCE
    1 REFORME DE LA VOLONTE
    1 REFORME DU COEUR
    1 SACRIFICE DE JESUS CHRIST
    1 SACRIFICE DE LA CROIX
    1 SANG DE JESUS-CHRIST
    1 SOUFFRANCES DE JESUS-CHRIST
    1 TRAHISON
    1 VIE DE SACRIFICE
    1 VIE SPIRITUELLE
    1 VOLONTE DE DIEU
    2 BARABBAS
    2 HERODE AGRIPPA I
    2 ISAIE, PROPHETE
    2 JEAN, SAINT
    2 JUDAS
    2 LUC, SAINT
    2 MATTHIEU, SAINT
    2 PIERRE, SAINT
    2 PILATE
    2 SIMON DE CYRENE
    3 JERUSALEM
  • 1873
La lettre

Oblatus est, quia ipse voluit.

Quel spectacle, mes frères, qu’un Dieu mourant sur une croix et quel bouleversement de toutes les idées humaines! Ah! au milieu de tant de prodiges où le doigt divin éclate de toute part, il serait facile de faire resplendir dans sa majesté celui qui volontairement s’enveloppe de tant d’ignominies, mais je ne m’adresse pas à un auditoire d’incrédules: vous avez la foi, vous tous qui m’écoutez, et, pour vous être utile, je dois prendre le sujet que j’aborde par un autre point de vue.

Vous avez la foi, mais n’est-elle pas inconséquente? Ne peut- on pas vous en faire le reproche, si l’on veut comparer cette foi à votre conduite et à toutes les lâchetés où vous expose une volonté sans force et sans énergie? De là tant de faiblesses avilissantes, tant de concessions scandaleuses, tant de chutes journalières.

Un mot du prophète nous donnant la clé de la passion du Sauveur nous donne du même coup la cause des condamnations qui pèsent sur vos têtes, si vous ne profitez pas du grand enseignement donné du haut de la croix. Pourquoi, d’un bout du monde à l’autre, l’Eglise en deuil adore-t-elle un Dieu expirant? Parce que ce Dieu, homme en même temps, l’a voulu. Oblatus est, quia ipse voluit. Il l’a voulu.

Ah! sans doute, le premier motif de cette volonté était son amour. Dilexit me, et tradidit semetipsum pro me, mais il l’a voulu encore pour m’apprendre à vouloir. Voilà notre modèle. Un Dieu homme en souffrant un moment volontairement, vous apprend à vouloir la souffrance et accepter la mort, vous qui avez horreur de bien des choses. Oui, il nous apprend à vouloir tout ce qui est grand, beau, généreux, divin, mais que nous ne savons pas atteindre, parce que cela coûte.

Essayons, en pénétrant dans les détails, d’admirer les triomphes de cette admirable volonté qui s’offre comme notre modèle. Et puisque un pieux usage nous invite à contempler Jésus s’avançant vers la mort sur trois principaux théâtres, disons qu’au Jardin des Oliviers Jésus triomphe des souffrances de l’imagination et du coeur en s’en faisant un supplice très dur: devant ses juges il triomphe par les humiliations et une condamnation indique de l’orgueil et des injustices les plus criantes; au Calvaire, de toutes les souffrances réunies et de l’abandon de son Père.

Après quoi, vous n’aurez plus qu’à vous adresser cette question: Que fais-je pour triompher des faiblesses et des chutes de ma volonté? Et que veux-je faire désormais pour mettre dans ma vie une vigueur de volonté qui m’a fait défaut jusqu’à présent? Invoquons, pour profiter de ce que j’ai à vous dire, cette croix où Jésus a voulu être cloué pour nous, afin de nous apprendre à vouloir le sacrifice. O crux, ave.

I. Sacrifice de l’imagination et du coeur au Jardin des Oliviers.

On peut dire que deux sentiments ont été constamment en Jésus: la prévision de sa mort, l’amour des siens poussé à la plus extrême tendresse. Ante diem festum Paschae, sciens Jesus quia venit hora, ut transeat ex hoc mundo ad patrem, cum dilexisset suos qui erant in mundo, in finem dilexit eos.

La lutte a commencé avec la vie humaine. Il connaît l’arrêt de son père. C’est un condamné qui sait l’heure et le jour de son supplice; il l’accepte: Sciens quia venit hora. Le voilà ce moment terrible. Son âme en est triste jusqu’à la mort: Cristis est. Mais quelque chose est plus fort encore, c’est l’amour. Cum dilexisset suos qui erant in mundo, in finem dilexit eos. Et ce n’est pas un amour égaré, sujet à l’illusion: Unus ex vobis me traditurus est…et: Relinquetis me solum. A Pierre: « Le coq ne chantera pas que tu ne m’aies renié trois fois ». Voilà ceux qu’il aime et qu’il s’obstine à aimer jusqu’au bout, jusqu’à la mort.

Il institue l’eucharistie, comme le triomphe du plus grand amour sur la plus honteuse trahison. Il les mène au jardin des Olives. Sinon, dormis? Et aux autres: Sic non potuistis una hora vigilare mecur. Quel abandon! Puis enfin: Dormite jam et requiescite. Oui, semble-t-il dire: « Pourquoi me reposer sur vous? » Son coeur est-il assez meurtri?

C’est alors qu’il se tourne vers son père, et son père n’a à lui montrer que la sentence de mort. C’est ce qu’il voudrait éviter, c’est ce qui est impossible: Pater, si possibile est. Et son père lui répond: C’est impossible ».

Alors prosterné contre terre, il voit passer devant lui toutes les souffrances qu’il va endurer, et son imagination n’est pas vaincue. Que dites-vous de ce supplice volontairement anticipé? Celui qui de toute éternité renferme en lui le type de toutes les créatures que sa puissance jettera dans l’espace, leurs joies, leur beauté, leurs vicissitudes, celui-là voit tout ce que son père met d’exquis dans les inventions, de ses tortures et dans la perfection de sa science de souffrir. Jésus voit cela et il le veut. Les combats se livrent au fond de sa nature, les sens se soulèvent: Si possibile est. Mais en même temps il veut: Non mea, sed dua voluntas.

Ah! ne dites pas que c’est la volonté de Dieu, car c’est aussi celle de Jésus. Il veut donc, mais où l’entraîne sa volonté? A cette épouvantable prière, où se reproduira la souffrance la plus affreuse.

Il voit, à côté de sa mort, l’inutilité de cette mort même. A quoi bon pour tant de générations corrompues? A quoi bon pour tant d’incrédules haineux et obstinés? A quoi bon pour tant de pécheurs endurcis? Et puisque je ne veux pas vous ranger dans ces tristes catégories, je serai plus vrai, n’est-ce pas, si je vous dis à vous qui m’écoutes: A quoi bon pour tant de légèretés, d’impuissances morales, d’affaissements de la foi, de trahisons sinon par malice, du moins par lâcheté? Alors commence la sueur de sang: Et factus est sudor ejus, tamquam eudor sanguinis decurrentis super terram.

Voilà où va sa volonté. La nature succombe en face de tant d’inutiles souffrances, de tant de corruptions, d’impiétés, de haines, de légèretés, d’ingratitudes. La volonté est plus forte, il veut toujours.

Et pourtant Judas arrive. Quelle parole? Amice, ad quid venisti? Voilà le dernier mot. Ah! n’accusez pas trop Judas. L’apostat trahit pour de l’argent. Vous, chrétiens pieux, depuis quand ne l’avez-vous pas trahi, ou plutôt quand ne le trahissez-vous pas pour vos satisfactions personnelles?

Qui cherchez-vous? Jesus Nazarenun. Ils sont renversés. Il veut mourir, mais il veut mourir seul. Dixi vobis, quia ego sum. Si ergo me quaerittis, sinite hos abire. Et ils s’en allèrent. Et nous aussi, dans notre lâcheté, nous nous en allons. Voici donc l’histoire perpétuelle des chrétiens. Jésus se livre toujours et les chrétiens fuient sans cesse. Jésus le voit, le sait, et sa volonté est toujours la même. Les chrétiens savent les souffrances de Jésus, et la même aussi est leur volonté.

Allez dans votre force, ô divin maître; allez à votre condamnation; mais tandis que l’on vous conduit à vos juges, à vos bourreaux, permettez que nous saluions la croix qui vous est destinée. O crux, ave..

II. Jésus triomphe par son humilité de l’orgueil et des injustices de ses ennemis.

Il est donc conduit devant ses juges. Voyez ceux qui d’avance ont préparé sa mort et en ont payé le prix à Judas. Il le savait, pouvait s’enfuir, mais il avait dit, lui l’éternité, lui la lumière: Nunc est hora vestra, et potestas tenebrarum.

Il veut -et il l’a prédit -que s’accomplisse la prophétie qui le montre au milieu des scélérats: Et cum sceleratis reputatus est. Voilà son humiliation; il la savoure. Devant la haine des prêtres quel est, en effet, cet homme nouveau? Il vient renverser le Temple, mais c’est vous qui l’y forcerez, ô conservateurs d’alors. Quoi, est-ce une mauvaise chose que de conserver? Oui, de conserver la loi de Dieu, les intérêts de Dieu,la gloire de Dieu. Mais quand, sous prétexte de conserver, ô prêtres sacrilèges, ô scribes, ô pharisiens, ô hypocrites, vous ne songez qu’à vos intérêts personnels, vous méritez tous les châtiments. Là se trouve le mystère des châtiments qui pèsent sur les conservateurs sans religion, des adorateurs de leur science, des gens qui sacrifient tout à leur immense égoïsme. Jésus devant cet orgueil sacerdotal, rabbinique, pharisaïque, bourgeois s’humilie.

Vient l’homme de la légalité et de la peur, Pilate. Il ne trouve rien en Jésus: Non inveni in eo sausam. Mais le représentant du peuple qui fait trembler le monde, tremble lui (aussi). O Jésus, vous êtes la loi: Et erit ipse lex. La loi s’humilie devant le juge impie et politique. Voilà la règle: il accepte d’être condamné.

Je ne parlerai pas d’Hérode et des décisions que ses railleries adultères se permettent sur l’innocence de mon Sauveur. Mais écoutez cette foule ameutée par les chefs, les tribuns d’alors. Que faire? Condamner Barabbas? Oh! non, condamnons Jésus: Morte turpissima condemnemus eum. Mais quoi? Ce peuple qui crie: Crucifigatur, n’est-ce pas celui qui, quatre ou cinq jours avant, criait: Hosannah? Oui, sans doute. Allez fiez-vous à la popularité! Le Sauveur le sait bien, mais il veut avant tout expier cette vanité des applaudissements. Il accepte les soufflets, les crachats, les chaînes, les cris de fureur et de blasphème; il accepte les clameurs de la populace. « Voilà l’homme! dira Pilate. Voilà votre roi! » Jésus veut tout cela.

O peuple, ô peuple, qu’es-tu donc et combine insensés sont ceux qui t’aiment pour eux? Jésus s’élève au-dessus de toutes ces pensées. Oui, il souffrira pour ces bêtes féroces qui réclament son sang sur leur tête et sur leur postérité. Oui, il souffrira, parce qu’il les aime et qu’à quelques jours de là Pierre en convertira plus d’un.

Allez donc, réclamez la sentence, ô docteurs de la loi; poussez Pilate à la prononcer. Hérode, mets-y du tien par tes railleries. O peuple, peuple de Dieu qui t’acharnes à ne plus vouloir l’être, mets le comble à tes sacrilèges, et tes révoltes. Tu étais le peuple aimé, deviens le peuple maudit par l’iniquité, l’abomination de tes fureurs. Jésus le voit, le veut, et dans l’énergie de son sacrifice, il va mourir pour toi, pour sauver les débris d’Israël. Car ni les prêtres, ni les docteurs, ni les soldats, ni la veletaille, ni Pilate, ni Hérode, ni toute la populace ameutée n’eussent pu faire périr Jésus, s’il ne l’eût pas voulu. Mais en face de ces haines, de cet orgueil, de cette tempête, de ces iniquités incomparables, il veut mourir dans l’humiliation, dans l’opprobre, avec toutes les apparences d’un criminel. Il le veut et il en sera ainsi: Oblatus est, quia ipse voluit.

Venez-pendant qu’on prépare la croix de Jésus, venez vous rendre compte de ce que vos injustices, vos iniquités, votre vanité, votre amour-propre, votre orgueil ajoutent aux douleurs du Fils de Dieu. Les docteurs, Pilate, la foule sont coupables sans doute, mais ils ne sont que des instruments. Et, d’autre part, voyez combien de temps vous voulez écraser votre volonté si faible sous le poids de vos révoltes et de ce déplorable orgueil. Combien de temps serez- vous injustes envers Dieu? Combien de temps votre orgueil lui fera-t-il la guerre? Quand voudrez-vous? à votre tour, être victimes humbles, et avec lui être victimes dans votre innocence recouvrée dans (=par) son sang?

Voilà le modèle d’une volonté qui va au-delà de tout. Quand le suivrez-vous? Mais la croix est prête. On la met sur les épaules du divin condamné, et, pendant qu’elle commence à se teindre du sang de la victime volontaire, saluons-la encore une fois. O crux, ave..

III. Sacrifice des sens à la croix.

Déjà la flagellation, déjà la couronne d’épines n’avaient fait du corps du Sauveur qu’une plaie, après les préludes des liens, des soufflets, des crachats. Maintenant voilà le bois infâme, désormais glorieux, où Jésus va être attaché. Ne puis-je pas demander si tant de douleurs étaient nécessaires? Non, sans doute, elles ne l’étaient pas; Dieu (eut) pu sauver le monde autrement. Mais la victime l’a voulu: Oblatus est, quia ipse voluit. Et pourquoi? Ce sont les excès de l’amour de Dieu envers le monde: Sic Deus dilexit mundum; la lutte de l’amour virginal de Jésus contre ces impuretés qui réduisent l’homme à l’état de la brute: Sio Deus dilexit. Allez donc, ô Jésus, dans cette effroyable solitude que vous fait la haine, allez à la consommation du sacrifice.

Je me trompe. D’humbles femmes veulent vous consoler. Vous repoussez cette sympathie, vous voulez être seul. Filias Jerusalem, nolite flere super ne, sed super vosipsas flete, et super filios vestros. En ce moment suprême il veut souffrir seul. Si Simon de Cyrène est angarié pour porter sa croix, c’est que ses chutes peuvent faire craindre qu’il ne succombe. Enfin, il s’avance sous ce poids, voulant souffrir.

Il est au sommet. La croix est prête, qu’il s’y étende, et il le veut. Les clous s’enfoncent dans les mains du Dieu, par qui tout a été fait, et il le veut. Le voilà immobile, celui dont la nature divine est le principe de toute action. Voyons, qu’on le suspende. Et cet atroce supplice, il le veut.

La soif le dévore, et il ne l’indique que pour subir un supplice de plus.

Marie est là, et il veut que Marie le supplie comme prêtre auprès de Dieu, auprès des hommes. Mulier, ecce filius tuus. Quoi! Les bourreaux de votre fils? Oui. Quoi! les pécheurs qui le mettent à mort? Vous en serez par la volonté de ce fils le plus précieux refuge, refugium peccatorum.

Est-ce assez de force, de volonté et d’amour? Non, il y a quelque chose de plus. Après avoir confié les hommes à sa mère, au milieu des insultes des Pharisiens qui viennent blasphémer jusqu’au dernier moment, au milieu de la stupide indifférence des soldats qui au pied de la croix se partagent ses vêtements et tirent au sort sa tunique, il se tourne vers son Père. Il faut que non seulement la terre, mais aussi le ciel l’abandonne. « Mon Père, mon père, pourquoi m’avez-vous abondonné? » Et son père est muet, et la sainte humanité est la victime en apparence inutile, et les prêtres et les pharisiens triomphent. Vah! qui destruis templum Dei. Si Filius Dei est, descendat de cruce. La vieille loi, les prêtres, les scribes, les pharisiens triomphent. Hérode rit, Pilate calcule. O Juifs, vous triomphez. Le scandale est à son comble.

Attendez, le voile du Temple va se déchirer. Velum templi scissu est. Voilà le prélude de la destruction du Temple. Les mains immobiles du crucifié ébranlent la terre dans un affreux craquement, elles soulèvent les pierres des sépulcres, elle déchirent le voile du Temple, en attendant que le plus doux des empereurs romains n’en laisse pas pierre sur pierre, et commence le supplice du peuple déicide en massacrant les Juifs par millions. Or Jésus accepte l’abandon, et il n’en continue pas moins à perdre sa volonté dans celle de son père: Pater, in manus tuas commendo spiritus meum. Il jette un coup d’oeil sur les prophéties, il les a toutes accomplies: Consummatum est.

O vous qui avez été immolé, parce que vous l’avez voulu, apprenez-nous, Jésus, sauveur des hommes, par l’adhésion de notre volonté à vos mérites à changer toutes nos douleurs en sacrifices méritoires!

L’imagination nous emporte, qu’elle soit subjuguée et qu’elle tourne en tristesses utiles, comme au jardin des Olives. Le coeur a pour nous des angoisses comme indicibles, et elles sont méritées, parce que nous nous sommes éloignés de vous. Quand donnerons-nous à ce coeur torturé un mérite, dont vous seul connaîtrez l’étendue, en voulant souffrir par amour pour vous dans cette partie si noble de notre être? L’orgueil nous attaque de tous côtés, et les injustices des hommes aussi. Quand notre humilité, quand notre acceptation des insultes, des procédés offensants nous rendra-t-elle maîtres de nous-mêmes? Quand l’amour de l’humilité, la joie dans la persécution nous donneront-ils la paix que le monde ne connaît pas, ne connaîtra jamais, le vrai bonheur dans l’union à votre volonté divine? Quand votre croix et (=avec) ses clous et ses angoisses voulues de vous, acceptées par vous, nous enivrera-t-elle? O (=le) sang de Jésus répandu sur ce bois infâme me donnera-t-il cette ivresse qui transporte le chrétien en le purifiant?

O Jésus, purifiez-nous, apprenez-nous l’humilité en face des hommes qui vous condamnent! O Jésus, que notre imagination ne se représente qu’une vie de sacrifice et de sainteté, qu’elle réalisera par votre grâce; et que les saintes ardeurs de votre coeur qui vous ont conduit à la douleur, à la mort, fassent de nous des victimes, qui dans l’amour et la volonté nous conduiront là où nous pourrons mettre notre âme tout entière -et pour l’Eternité -dans les mains de Dieu, et avec un grand amour et une volonté parfaite dire avec vous: Pater, in manus tuas commendo spiritum meum!

Notes et post-scriptum
1. Cette instruction, dont les notes manuscrites portent la date de 1873, fut vraisemblablement donnée à Paris le Vendredi Saint 11 avril 1873, en la chapelle de Notre Dame de Salut, rue François 1er, où le P. d'Alzon avait prêché cette année-là, la retraite des hommes, du mercredi 2 avril au dimanche des Rameaux, 6 avril. En 1873, Pâques tombait le 13 avril.