OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.

Informations générales
  • ES-0692
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.
  • L'APOSTOLAT
  • Ecrits Spirituels, p. 692-697.
  • BR 5; TD 52, P. 335-340.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AMOUR DIVIN
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 AMOUR-PROPRE
    1 APOSTOLAT
    1 ASSOMPTION
    1 BON EXEMPLE
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 DROITS DE DIEU
    1 ESPRIT APOSTOLIQUE DE L'ASSOMPTION
    1 ESPRIT D'INDIFFERENCE
    1 ESPRIT DESINTERESSE A L'ASSOMPTION
    1 ESPRIT GENEREUX A L'ASSOMPTION
    1 EXTENSION DU REGNE DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE
    1 MAITRE DES NOVICES ASSOMPTIONNISTE
    1 OEUVRE DE JESUS-CHRIST
    1 OEUVRES DIVERSES
    1 PAUVRETE SPIRITUELLE
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 PROVINCIAL ASSOMPTIONNISTE
    1 PRUDENCE
    1 REGNE
    1 SAINTS DESIRS
    1 SALUT DES AMES
    1 SERVICE DE L'EGLISE
    1 SOUMISSION SPIRITUELLE A JESUS-CHRIST
    1 SUPERIEUR
    1 SUPERIEURE
    1 SUPERIEURS ASSOMPTIONNISTES
    1 SUPERIEURS MAJEURS
    1 TIERS-ORDRE DE L'ASSOMPTION
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 VIE DE PRIERE
    1 ZELE POUR LE ROYAUME
    2 DANIEL, PROPHETE
    2 PAUL, SAINT
    2 THERESE, SAINTE
  • 1876
La lettre

Praedicate evangelium omni creaturae.

L’Assomption considérée dans son ensemble est une oeuvre apostolique. Toutefois si chaque religieux et chaque religieuse ont à y exercer un apostolat, les supérieurs doivent se considérer comme les directeurs des apôtres. Et, à ce point de vue, voici les conditions qui me semblent essentielles à leur mission.

1. L’amour très large du royaume de Dieu, où est compris l’amour de toutes les âmes qui leur sont spécialement confiées.

2. Le désintéressement absolu de tout sentiment personnel dans l’oeuvre de Dieu.

3. L’immensité des saints désirs pour donner tout ce que l’on peut donner et faire donner.

4. La limite de l’action personnelle et de l’action de la communauté, fixée par la prudence.

1. L’amour très large du royaume de Dieu

Vous vous êtes consacrées à étendre le règne de Jésus-Christ dans les âmes. Mais est-ce Jésus-Christ dont vous voulez étendre le royaume et n’est-ce pas votre empire? Le royaume de Jésus-Christ, c’est la plus grande des causes. Hélas! que d’obstacles ne s’y opposent pas: la prudence, la paresse, la fatigue, le dégoût, le vôtre et celui des autres!

A chaque instant, vous vous trouvez en face de personnes qui, si vous comprenez, ne comprennent pas; qui, si vous aimez, n’aiment pas ou aiment à leur façon. Il faut élargir les intelligences et les coeurs dans la grande question de la cause de Dieu, il faut ouvrir des horizons pour les myopes, il faut allumer des brasiers pour des gens qui ne réclament que leur chauffe-pieds et ont peur qu’on leur donne un rhume en leur donnant trop de chaleur. Heureux les supérieurs qui embrassent le monde entier dans leur ambition, parce qu’ils sont ambitieux de faire régner Jésus-Christ partout!

Or, vous n’avez pas seulement à travailler directement sur les âmes, vous avez à faire école. Autrefois il y avait l’école des prophètes; sous de saints supérieurs il faudrait voir l’école des apôtres. Je me représente un supérieur aimant Jésus-Christ de toute son âme, et l’Eglise, le corps, le royaume de Jésus-Christ, et se disant: « J’ai dix, vingt, trente âmes, qui avec moi peuvent être les instruments de l’accroissement de ce beau royaume. J’ai trente, soixante, cent élèves, sur qui je dois agir, par qui je puis atteindre autant de familles. J’ai des enfants de Marie, des Tertiaires, que je puis prendre comme autant de coopérateurs et de coopératrices de mon oeuvre, et de même que je vais chercher des flammes dans le coeur de Jésus-Christ, de même je dois jeter celles dont mon coeur est embrasé dans le coeur de mes filles ».

2. Le désintéressement personnel

Ayant passé des jours, des mois dans ce travail, cette admirable supérieure se repose, et jetant un regard de satisfaction autour d’elle, elle se dit: « J’ai bien travaillé, » et une douzaine de diables, formant écho autour d’elle répètent très agréablement

« Vraiment, elle a bien travaillé. » Quelle joie infernale pour ces atroces créatures, si l’amour-propre de cette âme apostolique se complaît dans ces éloges partis de l’enfer! Ah! Jésus-Christ donnait d’autres leçons à ses apôtres: Cum feceritis ea quae praecepta sunt vobis, dicite: servi inutiles sumus: quod debuimus facere, fecimus. (Luc. XVII, 10).

Sachez donc premièrement que vous n’êtes capables de rien dans le monde surnaturel, que si vous faites naturellement un bien surnaturel, vous n’en pouvez retirer aucun mérite et que dès lors toute récompense est perdue pour vous; en second lieu, que le bien fait surnaturellement, s’il se tourne en amour-propre, vous est un immense péril, puisque l’orgueil s’en nourrit et vous rend semblables à Satan qui se complaît en lui-même; enfin, que vous perdez la plus magnifique occasion de consoler Jésus-Christ et de lui ménager une oeuvre durable, élevée par vos mains et consolidée par votre humilité.

Le désintéressement au service de Jésus-Christ est la chose la plus rare. Pourquoi tant d’âmes religieuses se laissent-elles aller à des chutes honteuses, après avoir perdu leur vocation? Parce qu’on peut dire d’elles ce que saint Paul disait de certains prêtres des premiers jours de l’Eglise: Caeteri quae sua sunt quaerunt, non quae Jesu Christi. Et pourquoi arrive-t-on à cette extrémité? Parce que l’on n’a pas vu chez les supérieurs un désintéressement suffisant. On les imite avec excès et l’on se perd. Qui en est cause? Les supérieurs qui n’ont pas été suffisamment désintéressés de l’amour-propre. Oh! bienheureuse pauvreté spirituelle, non moins importante que la pauvreté des voeux et peut-être plus importante chez les supérieurs, quand dans l’amour de Jésus-Christ tiendra-t-elle entière chez nous?

3. L’immensité des saints désirs

Nous ne ferons jamais pour Dieu tout ce que nous désirons, mais le désir est une disposition précieuse. Daniel fut un homme de désirs et à cause de cela agréable au Seigneur. Jésus-Christ, dans l’oraison dominicale, nous a appris à être des hommes de désirs. Bornez les vôtres à ceux de l’oraison dominicale, et sainte Thérèse vous prouvera qu’il n’en faut pas davantage pour parvenir à la plus haute perfection dans la vie contemplative. Il en est de même dans la vie apostolique. La gloire de Dieu, l’avènement de son règne, l’accomplissement absolu de sa volonté, que voulez-vous de plus?

Aussi n’est-ce pas sur l’objet des désirs qu’il importe de s’arrêter, mais sur leur intensité. Or ces désirs ne s’enflamment que par la prière. Voyez saint Pierre proposant l’institution des diacres: Nos autem orationi et ministerio verbi instantes erimus. Prier et parler, voilà leur fonction, mais prier d’abord.

Prier pour l’ensemble de sa communauté, prier pour les besoins de chaque religieuse, de chaque élève, de tous ceux avec qui on est en relation. Prier pour les pécheurs, prier pour les saints. Prier pour la perfection des oeuvres dont on est chargé. Prier pour les âmes qui vous font souffrir n’importe comment, et si elles vous font souffrir par un sentiment mauvais contre vous, quelle divine vengeance que de dire: « Mon Père, pardonnez-leur, car elles ne savent ce qu’elles font. » C’est la vengeance de Jésus-Christ sur la croix, qui a converti le monde par l’immensité des désirs de son amour pour les pécheurs.

4. La limite de l’action personnelle

Pour bien faire, il ne faut pas trop faire et il ne faut pas trop faire faire. Souvenez-vous de votre but, de votre caractère, de votre esprit, ne les dépassez pas. N’imposez pas un travail au-dessus des forces. Il faut se servir de l’éperon, il faut aussi se servir du frein pour soi et pour les autres.

Les supérieurs qui demandent trop, ont tort; ils s’exposent à épuiser et à rendre les inférieurs incapables de donner tout ce qui était en eux. Ceci se rapporte encore aux supérieurs qui veulent tout faire par eux-mêmes.Voyez le peu qu’a fait Notre-Seigneur. Il a pris la souffrance, la mort; mais son action extérieure, telle que l’évangile nous le rapporte, se réduit à peu. Il a formé les apôtres et les a envoyés à travers le monde. Grande leçon pour les supérieurs qui trouvent que rien n’est bien fait que ce qu’ils font par eux- mêmes! Ce n’est pas le moyen de fonder les traditions de l’apostolat.

Enfin, il faut s’en tenir à certaines oeuvres fixées par les supérieurs majeurs, laisser les dévotions personnelles. Tel Maître des novices ou supérieur, avant les voeux de l’Ordre ou de la Congrégation, imposera des voeux infinis; tel autre des pénitences, tel autre des processions, tel autre des dévotions de son genre. Excellent moyen, avec toutes ces dévotions d’empêcher de suivre la règle. Restez dans ce qui est réglé, et que le superflu n’absorbe pas le nécessaire.

L’apostolat des supérieurs de communauté a ce caractère excellent, c’est que: les autres apostolats ont pour but de faire des chrétiens, l’apostolat des supérieurs a pour but de faire des saints. Si, à ce point de vue, il est plus restreint, à un autre il est plus relevé.

Que Dieu vous fasse les apôtres de la sainteté en vous rendant saintes vous- mêmes! Commencez à faire, puis enseignez, comme Notre-Seigneur de qui il est dit: Coepit facere, et docere. Que votre plus efficace prédication soit l’exemple, et votre apostolat aura toute la fécondité que Dieu en attend.

Notes et post-scriptum