OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.

Informations générales
  • ES-0760
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.
  • RETRAITE COMMENCEE A SAINT-EUSEBE
  • Ecrits Spirituels, p. 760-765.
  • CR 10; TD 43, P. 255-259.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 CONFESSION SACRAMENTELLE
    1 CREATION
    1 LOUANGE
    1 MORT
    1 NOTRE-SEIGNEUR
    1 PAIX DE L'AME
    1 PECHE
    1 PRETRE
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 RECHERCHE DE DIEU
    1 RETRAITE SPIRITUELLE
    1 SAINTE VIERGE
    1 VOIE UNITIVE
    2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
    2 IGNACE DE LOYOLA, SAINT
    2 JEAN CHRYSOSTOME, SAINT
    2 JEAN, SAINT
    2 JOSEPH, SAINT
    2 PAUL, SAINT
    3 CEVENNES
  • novembre-décembre 1834
  • Rome
La lettre

Je prends pour patrons: Notre-Seigneur, qui est mon patron particulier, la Sainte Vierge, saint Joseph, saint Jean l’Evangéliste, saint Paul, saint Jean Chrysostome, saint François de Sales et saint Ignace.

30 novembre

Combien de fois, en méditant sur les premières vérités, n’ai-je pas cherché à en faire des applications aux autres, sans songer que c’était à moi-même que je devais les appliquer! Je croyais que je n’avais pas besoin de m’appesantir sur cette pensée que je suis créé pour connaître, aimer et servir Dieu, parce que je suis disposé en général à me dévouer à son service. Mais de combien d’ingratitudes ne me suis-je pas rendu coupable, pour n’avoir pas donné une assez grande attention à une vérité qui m’aurait fait mieux comprendre l’importance de mes devoirs!

Je vous adore, ô mon Dieu, dans l’ordre admirable que vous avez établi parmi les hommes qui, placés dans des états si différents, peuvent tous arriver au même but qui est votre gloire et leur salut. Donnez-moi, ô mon Dieu, dans la position où vous m’avez placé, la grâce d’être bien convaincu que tout est indifférent, une seule chose exceptée. Donnez-moi la grâce de ne vouloir d’autre instrument que celui que vous m’avez mis entre les mains pour accomplir ma tâche, persuadé que je dois être que l’instrument que vous m’avez donné est le plus propre à bien faire l’ouvrage que vous m’avez commandé.

Diligentibus Deum omnia cooperantur in bonum. Que je vous voie toujours ô mon Dieu, comme terme de toutes mes actions! Que j’aie toujours présentes ces paroles: Nemo venit ad Patrem nisi per me! Et alors tout me sera indifférent, car que je sois riche ou pauvre, honoré ou méprisé, bien portant ou malade, jeune ou vieux, peu m’importera. Ce qui m’importera sera de vous chercher, et comme je saurai que personne ne va au Père que par vous, je saurai aussi que vous avez indiqué d’avance la route, que vous voulez faire suivre à vos disciples: Si quis vult venire post me, abneget semetipsum, tollat crucem suam, et sequatur me. Donc une abnégation complète. Donc une indifférence absolue sur les moyens d’arriver, pourvu que j’arrive à vous, ô mon Dieu, source de tout bien.

1er décembre

Voilà donc que commence le mois, dans lequel Dieu fera de si grandes choses pour moi! Mourir sans qu’on parle de moi sur la terre. Et qu’importe, pourvu que Dieu en parle dans le ciel! Je veux vivre longtemps. Est-ce pour augmenter le nombre de mes péchés?

Lorsque j’ai voyagé, je me suis confié sur les grands chemins aux postillons, sur mer, aux matelots, comptant sur leur propre intérêt pour me conduire au terme de mon voyage. Et je ne me rapporterais pas à Dieu pour me conduire à la grande affaire de mon salut? Lorsque je veux apprendre une science, je fais ce que me prescrit le Maître. J’emploie, pour le dessin par exemple, le crayon ou l’estampe, selon qu’il lui plaît. Et pour mon salut, je n’emploierai pas les divers objets qui sont entre mes mains, selon qu’il plaira à la Providence?

La vie de saint Ignace, dans l’endroit où il est question des combats qu’il avait à se livrer avant sa conversion, a fait sur moi une vive impression. O mon Dieu, pourquoi ne puis-je pas dire, comme saint Augustin: Tu non poteris quod isti et istae? Si, mon Dieu, je le pourrai avec votre grâce. Je me donne à vous. Je me considère comme un rien, comme un atome entre vos mains. Et, après tout, que suis-je autre chose? Vous voulez que je sois missionnaire. Eh bien! mon Dieu, je le serai. Je mourrai jeune, si ma poitrine ne résiste pas aux prédications. Je souffrirai du froid des Cévennes. Je serai méprisé par ceux qui diront que je suis appelé à faire un autre genre de bien. Je serai malade. Peu importe, pourvu que ce soit là votre volonté.

Donnez-moi, ô mon Dieu, la force de résister à cet amour-propre, qui est si puissant en moi et qui gâte toutes mes actions; ou, si vous voulez, laissez-le moi, afin que je le combatte sans cesse et que la crainte de me laisser séduire par ses illusions m’empêche de trop faire attention au peu de bien que je m’imagine faire.

2 décembre

Dieu crée le monde pour se rendre une gloire extérieure. Il crée les anges, il crée les hommes. Les anges se révoltent en partie contre Dieu et les rebelles sont précipités dans l’enfer. Dieu crée le premier homme qui l’outrage, et le désordre entre dans le monde. Un seul péché a fait l’enfer; un seul péché fait la mort. Et moi, combien de fois n’ai-je pas péché! Ce n’est pas un autre, c’est moi qui me suis mille fois révolté contre mon maître, qui mille fois ai mérité d’être anéanti; et parce que la bonté de Dieu me supporte, je n’y pense pas. O mon Dieu, gravez cette pensée dans mon coeur. Que toujours je pense que je suis sous la main de votre justice, afin que je n’ajoute pas l’ingratitude à tant d’autres fautes!

3 décembre

Voilà bien longtemps que je médite sur le péché, ô mon Dieu, n’en ai-je pas conçu l’horreur qu’il devrait m’inspirer? Je me présente à vous comme à mon juge, et vous ne vous montrez à moi que comme un ami. Tu qui dulces mecum capiebas cibos. Voilà ce que vous me dites et vous ne voulez pas me faire comprendre votre justice. Oh! si je comprenais au moins votre amour! Mais j’en suis incapable et je demeure froid. Oh! que cet état est cruel!

Que vous êtes bon, ô mon Dieu! Je ne puis sentir que je vous ai offensé qu’en faisant un acte d’amour. Alors je vois tout ce qui me sépare de vous. Alors, comme un époux reproche à l’épouse coupable qui se présente à ses embrassements les fautes qu’elle a commises, alors vous me reprochez avec douceur toutes mes infidélités. Oh! mon Dieu, je ne veux plus en commettre. Votre bonté m’accable.

Quel terrible contraste en moi! Je sens que j’aime ce qui est beau, bon, saint, juste; je suis transporté d’amour pour la chasteté, et puis je fais le mal: je m’enivre d’orgueil, je me laisse aller aux plus sales images, je déchire mon prochain, je me livre à la paresse. Pourquoi cette lutte continuelle entre votre grâce et ma nature corrompue? Jusques à quand, Seigneur? Jusques à quand? Usquequo Domine? Usquequo?

4 décembre

Qu’elle est belle la mort du prêtre qui, à sa dernière heure, se voit entouré de toutes les âmes qu’il a sauvées et qui l’ont précédé dans la gloire; des anges de toutes celles qui sont encore sur la terre, mais qui prient pour celui qui a ouvert leurs yeux à la lumière! Avoir vécu comme Jésus-Christ en médiateur entre Dieu et les hommes, s’être fait victime pour le salut de ses frères, n’avoir jamais songé à soi que pour s’exciter à servir Dieu en véritable apôtre, avoir eu le coeur brûlé des feux de l’amour divin, quelle vie admirable, quelle mort à désirer après une telle vie, quel avenir à espérer!

5 décembre

Prenez pitié, ô mon Dieu, d’un pauvre enfant prodigue qui ne comprend pas assez ni combien il a été prodigue, ni combien il y a de bonheur à se reposer dans vos bras de toutes ses souffrances passées. Faites qu’en vous il trouve le repos, qu’en vous il ne cherche que votre gloire. Oh! Dieu de mon coeur, il me semble cependant que je veux vous aimer et que ces velléités d’amour me donnent quelque regret de mes fautes.

Le 5 décembre 1834, j’ai reçu l’absolution d’une confession générale de toute ma vie, et, comme il me semble l’avoir faite de bonne foi, je n’ai plus qu’à compter sur l’infinie miséricorde de Dieu qui aura égard, je l’espère, à la misère d’un pauvre pécheur et à son désir de revenir dans le chemin de la vertu.

Grâces vous soient rendues, ô mon aimable époux qui avez voulu donner la paix à mon âme! Cette paix, je me la rappellerai lorsque je croirai n’avoir pas tout dit. Vous ne me l’auriez pas accordée, ce me semble, si je n’avais pas eu le bonheur d’être réconcilié avec vous.

O mon Sauveur, nous sommes donc en paix. Vous êtes mon père, vous êtes mon frère, vous êtes mon ami, mon Seigneur et mon Dieu, Deus meus et Dominus meus.

Donnez-moi, je vous en conjure, une grande abondance d’amour pour vous. O fleuve de vie, coulez dans mon âme; ô Sauveur du monde, inondez-moi de votre sang! Je ne veux aimer que vous, ne vivre que pour vous, me donner tout à vous, n’importe sur quel point, sur quelle partie de votre champ vous vouliez que je travaille, de quelque façon que vous vouliez m’employer.

Mon Dieu, venez habiter mon âme, venez vivre en moi, afin que je vive en vous et que je sois en vous consommé dans cette unité mystérieuse, dont vous parliez à vos disciples pendant cette dernière Cène, entre les deux plus grandes marques d’amour que l’homme ait reçues de son Dieu, l’Eucharistie et le Calvaire.

Je me souviendrai toute ma vie d’avoir une confiance sans bornes à Jésus dans les moments les plus terribles de ma vie.

Notes et post-scriptum