- ES-1206
- OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.
- VETURE DE SOEUR THERESE-AUGUSTINE.
- Ecrits Spirituels, p. 1206-1211.
- CT 44; TD 47, P. 256-260.
- 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
1 ACTION DE DIEU
1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
1 APOSTOLAT
1 EPOUSES DU CHRIST
1 ESPERANCE
1 HUMILITE
1 IMITATION DE JESUS CHRIST
1 JESUS-CHRIST AUTEUR DE LA GRACE
1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
1 MANQUEMENTS A LA VIE RELIGIEUSE
1 OBLATES
1 PAIX
1 PRATIQUE DE L'OBEISSANCE
1 PUISSANCE DE DIEU
1 SALUT DES AMES
1 SUPERIEUR
1 VERTUS DE L'APOTRE
1 VERTUS RELIGIEUSES
1 VETURE RELIGIEUSE
1 ZELE APOSTOLIQUE
2 ANDRE, SAINT
2 JACQUES, SAINT
2 JEAN, SAINT
2 JEROME, SAINT
2 PAUL, SAINT
2 PIERRE, SAINT
2 SUDRE, THERESE-AUGUSTINE
3 ASSYRIE
3 ATHENES
3 ROME - Oblates
- 25 septembre 1878
- Nîmes
Quam pulchri super montes pedes praedicantis pacem, evangelizantis bonum. (Is. LII, 7.)
Qu’il est beau, sur les montagnes, Jésus-Christ annonçant la paix, évangélisant le bien! Les montagnes sur lesquelles il s’appuie sont les apôtres, dit saint Jérôme; mais les pieds des apôtres sont très beaux, et les pieds de ceux qui annoncent la paix, évangélisent le bien, le sont également. Ils sont beaux vos pieds, ma chère fille, puisqu’ils sont aussi destinés à porter la paix et le bien. Et si vos pieds, comme ceux de Jésus et des apôtres, sont beaux, que dirai-je de vos mains destinées à porter les bienfaits de la charité; de votre tête, qui doit être le trésor de la vérité pour la publier; de votre coeur qui doit être un volcan d’amour, dont les flammes bienfaisantes doivent porter au loin les flammes de la charité de Jésus-Christ. Je viens donc vous dire: Oui, vous êtes toute belle, aux yeux de celui qui veut devenir votre époux, mais à une condition: c’est qu’en dehors des vertus religieuses auxquelles vous devez vous exercer, vous devez vous parer des vertus de la vierge missionnaire, que je veux réduire à trois principales, le mépris de vous-même, l’amour et la confiance.
1° Le mépris de vous-même
Que dit l’apôtre: Infirma mundi elegit Deus, ut confundat fortia, et ea quae non sunt, ut ea quae sunt, destrueret. Cherchez ce caractère apostolique. Qui l’a mieux connu que l’apôtre des nations? Il faut, pour être un instrument puissant de Dieu, être un instrument infirme. Pourquoi? Parce que là où l’instrument est plus faible, la force de la main qui l’emploie éclate davantage. Il ne suffit pas que vous soyez faible, il faut que vous en soyez profondément convaincue, il importe que vous compreniez que vous n’êtes rien. C’est par le néant que Dieu détruit ce qui est: Et ea quae non sunt, ut ea quae sunt destrueret. Qu’est-ce à dire? Est-ce que Dieu veut la destruction des êtres qu’il a créés? Nullement, mais il veut la destruction de leurs erreurs, de leur ignorance, de leurs vices, de leurs péchés. Mais pour cela, il veut que l’on sente que c’est lui qui agit, et non la créature. Il faut que Dieu agisse tout entier; mais plus c’est Dieu qui agit, plus la créature sentant qu’elle n’est rien, doit se mettre sous l’action de Dieu manifestée par les supérieurs.
Or, telle est l’infirmité, que je ne saurais trop condamner certaines religieuses. Elles sont comme ces idoles dont parle le psalmiste. Elles ont des yeux et ne voient pas, elles ne font attention à rien: oculos habent, et non videbunt; elles ont des oreilles et n’entendent pas: aures habent, et non audient; on leur parle, et c’est comme si on ne leur disait rien; nares habent, et non odorabunt, incapables de respirer les parfums célestes que leur époux répand pour elles, elles restent dans je ne sais quelle vulgarité qui les rend incapables de recevoir l’impulsion que Jésus-Christ voudrait leur donner. Pourquoi? Parce que leurs yeux se portent sur la règle et qu’elles n’en comprennent pas l’esprit, parce que leurs oreilles reçoivent les ordres des supérieurs et que leur inattention est incapable de se fixer sur les ordres donnés; parce qu’elles ont beau respirer dans l’atmosphère de la vie religieuse, elles manquent du tact nécessaire pour en saisir et la mystérieuse beauté et les saintes exigences.
Vous ne serez point de ces vierges folles, parce que plus vous vous sentirez peu de chose, plus vous sentirez le besoin de respirer l’air vivifiant de la perfection, d’écouter la direction que l’on vous donnera, de fixer vos regards sur les moindres signes de ceux à qui vous venez demander la formation de la vie religieuse. Ecce sicut oculi servorum in manibus dominorum suorum, sicut oculi ancillae in manibus dominae suae; ita oculi nostri ad Dominum Deum nostrum, donec misereatur nostri.
2° L’amour de Dieu
Ignem veni mittere in terram, et quid volo, nisi ut accendatur, disait Notre-Seigneur. Or, quiconque veut s’unir à l’oeuvre de Jésus-Christ, doit être embrasé d’un immense amour. C’est le cri de l’apôtre: Charitas Christi urget nos. Il faut sentir ces flammes de l’amour, et, comme le divin Maître, jeter un regard sur ces nations semblables à des brebis privées de leur pasteur: Tamquam oves non habentes pastorem. Le pasteur manque là où l’on vous enverra un jour. Les brebis surabondent, puisque ces victimes si nombreuses ont été baptisées. Mais où est le véritable berger? Jésus-Christ n’y a plus que des mercenaires.
Mais sondez le mystère. Le royaume du ciel est semblable à un filet jeté dans la mer et qui ramène des poissons de toutes les espèces. Ils sont baptisés ces schismatiques, comme le sont aussi tant de catholiques indignes du caractère qui leur a été imprimé. Eh bien! quand viendra le moment,les anges, ces aides des pêcheurs apostoliques, sépareront les bons des mauvais. Mais voici le mystère. Qu’étaient les apôtres, qu’étaient les premiers disciples? Ne pouvait-on pas les ranger parmi les poissons mauvais, dangereux? Qui les a rendus bons? Qui a fait cette pêche merveilleuse de 153 excellents poissons? Ce sont les apôtres; mais le véritable auteur a été Jésus-Christ. Or, pourquoi Jésus-Christ? Parce qu’il nous a aimés, parce qu’il venait de répandre son sang pour nous.
Eh bien! ma chère fille, l’amour de Jésus-Christ a fait ces prodiges, et, à l’imitation de Jésus-Christ, vous en ferez autant, si vous le voulez. Et l’amour des âmes consumant votre coeur, sous la pression des pieds du divin Sauveur vous travaillerez à la conversion des âmes, vous leur ferez un grand bien, vous transformerez ces poissons et vous ferez une pêche abondante. Aimez donc les âmes dans un oubli complet de vous-même; aimez les âmes de vos supérieurs, pour leur obéir exactement, en vérité et intelligence; aimez les âmes de vos Soeurs, pour les édifier; aimez les âmes des hérétiques et des schismatiques, pour les convertir et les éclairer. Là est votre vocation; l’amour de Notre-Seigneur vous en rendra digne.
3° La confiance en Dieu
Quelle folie humaine que de vouloir travailler à renverser le schisme grec, oriental, russe, avec quelques pauvres filles! Rappelez-vous, ma fille, la vision de ce roi d’Assyrie, devant qui, pendant son sommeil, se dressa une immense statue; et, malgré sa hauteur, une petite pierre la renversa et la réduisit en poudre. Qui peut dire que Dieu aujourd’hui ne prépare pas de ces petites pierres, de ces grains de poussière, pour opérer de grands renversements? Dieu se sert de tous les moyens, et il se servira même de vous, pauvre fille, aussi et plus incapable que Pierre, André, Jacques ou Jean, dont il fit pourtant ses apôtres. A quelle condition? C’est que vous soyez convaincue que vous pouvez tout en celui qui vous fortifie. Qu’allez-vous avoir en face de vous? Un immense empire, mais que l’incrédulité, le vice, l’ivrognerie rongent du haut en bas. Qu’êtes-vous? Rien. Qu’était saint Paul, quand il parla pour la première fois à Athènes? Qu’était saint Pierre, quand il vint, lui, homme grossier, se poser en face de la Rome des Césars? Mais il a été dit: Perdam sapientiam sapientium, et prudentiam prudentium reprobabo.
Qu’il se prépare en ce moment des bouleversements immenses, qui le nie? A qui appartient l’avenir, selon la sagesse humaine? Aux hommes de révolution et d’anarchie. Selon la folie de Dieu, à moins que nous ne tombions au règne de l’Antéchrist, aux plus humbles, aux plus aimants, aux plus confiants non en eux-mêmes, mais en Dieu.
Venez donc, ma fille, recevoir le saint habit et vous exercer, dans le mépris de vous-même, dans l’amour de Jésus-Christ et la divine confiance, aux grandes choses auxquelles Dieu appelle votre néant. Cachez-vous dans les ombres fécondes du noviciat; enfermez-vous pendant trois ans, comme Jésus s’enferma pendant trois jours dans son tombeau. Vous en sortirez victorieuse, en apprenant à mourir à vous-même. L’humilité vous aura donné la mort au péché, l’amour vous transformera, et la confiance en Dieu vous fera raconter vos victoires, que votre époux couronnera pour l’éternité. Ainsi soit-il.