OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.

Informations générales
  • ES-1212
  • OEUVRES SPIRITUELLES EDITEES.|TEXTES DIVERS PARUS DANS LES ECRITS SPIRITUELS.
  • BENEDICTION DE LA CHAPELLE
    15 AVRIL 1880
  • Ecrits Spirituels, p. 1212-1215.
  • CT 54; TD 47, P. 286-288.
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE GRACES
    1 AUGUSTIN
    1 BEAU CHRETIEN
    1 BENEDICTION
    1 CHAPELLE
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 EGLISE
    1 EGLISE CELESTE
    1 ENGAGEMENT APOSTOLIQUE DES LAICS
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 FONDATRICE
    1 GENEROSITE
    1 LOI ANCIENNE
    1 LOI NOUVELLE
    1 MISSIONS ETRANGERES
    1 OBLATES
    1 PEUPLE DE DIEU
    1 PRIERES POUR LES DEFUNTS
    1 VIERGES CONSACREES
    2 JEREMIE
    2 REGIS, EULALIE DE
    2 SALOMON
    2 ZOROBABEL
    3 FRANCE
    3 JERUSALEM
    3 NIMES
    3 ROCHEBELLE, FAUBOURG DU VIGAN
    3 VIGAN, LE
  • Oblates
  • 15 avril 1880
  • Nîmes
La lettre

Avant de célébrer, pour la première fois, les saints mystères dans cette chapelle qu’un homme de l’art appelait, il y a quelques jours, un monument unique dans Nîmes, non pour l’ampleur et l’étendue, ni pour le choix de toutes les pierres extérieures, mais pour la pureté des lignes, l’harmonie de l’ensemble, la perfection des détails, laissez-moi évoquer le souvenir et la pensée de tous ceux pour qui je vais offrir la victime par excellence.

Combien qui depuis quinze ans sont venues donner à l’association naissante des Oblates leurs noms et ne sont plus aujourd’hui! soit qu’elles aient rendu le dernier soupir sur la terre de France; soit qu’elles aient voulu, avant de partir pour le ciel, faire un essai d’apostolat auquel Dieu les avait appelées.

Laissez-moi surtout prononcer le nom d’une vaillante chrétienne avec qui j’avais préparé pendant longtemps une oeuvre qu’elle ne pouvait saluer que de loin, mais qui pourtant sur son lit de mort a voulu donner son nom à cette famille naissante et qui, du haut du ciel, où probablement elle prie pour ses soeurs, continue l’affection qu’elle leur portait sur la terre. Mlle Eulalie de Régis était venue assister aux humbles commencements de Rochebelle, et quand une colonie d’Oblates se transporta du Vigan à Nîmes, elle l’entoura de soins. Elle est à coup sûr, par l’aide qu’elle m’a donné, par sa générosité, une des fondatrices des Oblates de l’Assomption.

Comment ne prierai-je pas pour l’habile et consciencieux directeur de ces travaux! Avec quelle science il a préparé les plans, poursuivi l’exécution de son oeuvre! Comment ne prierai-je pas pour son dévoué collaborateur! Voyez cet homme, un des beaux types du bon Nîmois, chez qui l’intelligence, l’énergie, la persévérance, la bonté s’unissent si bien avec cette foi antique, prête à tous les dévouements, et qui font de Nîmes une cité à part dans notre belle France.

Je prierai pour vous tous, Messieurs, qui vous êtes si bien groupés pour l’oeuvre commune. Je prierai même pour ceux qui n’ont pas été fidèles à leur parole; car si les religieuses ne peuvent s’asseoir aujourd’hui dans les stalles demandées depuis longtemps, ne pouvons-nous pas, peut-être, nous en féliciter, puisqu’une délicate attention a couvert ces murs de magnifiques tapisseries, et nous prouve que toutes les formes du beau ont, dans Nîmes, des hommes capables de les reproduire avec un art parfait. Je prierai pour vous, puissants ouvriers qui secondiez si bien vos chefs et au milieu de qui j’aimais à me retrouver tous les jours, parce que dans le concours que vous leur donniez, vous sembliez ne former qu’une famille catholique, unie comme on ne le retrouve que bien rarement.

Mais élevons-nous au-dessus de l’édifice matériel. Qu’il nous inspire des pensées plus hautes, et disons avec saint Augustin ce qu’est une église dédiée à Dieu.

Une église offerte à Dieu est un enseignement perpétuel. Des pierres sont un symbole; elles représentent les pierres vivantes du temple saint que ceux qui viennent prier doivent élever au Seigneur. Avant la chapelle, vous aviez déjà construit pour Notre-Seigneur un lieu sacré plus précieux: c’était votre association même. Vous, ma Mère, vous en êtes la pierre angulaire. Mais, voyez, à mesure qu’une pierre est extraite ici-bas, le divin architecte semble prendre plaisir à la transporter au ciel pour le temple de la Jérusalem céleste, en sorte que deux édifices semblent se préparer: celui de la terre et celui de là-haut. Et tout cela pour la gloire de Dieu.

Mais ici se présente une apparente contradiction. Tandis que Jérémie pleurait sur les ruines de Jérusalem, sur le renversement du Temple, et proclamait comme un des plus grands malheurs que les pierres du sanctuaire eussent été dispersées: dispersi sunt lapides sanctuarii; tandis que nous demandons que le Christ protège cette chapelle, afin que les vierges, qui sont prêtes, y viennent tous les jours plus nombreuses prendre part aux noces du céleste époux: Et quae paratae erant, intraverunt cum eo ad nuptias, nous prenons les pierres de l’édifice spirituel et nous semblons prendre plaisir à les disperser au loin. Et, loin de nous affliger comme le prophète des lamentations, nous nous réjouissons, quand nous pouvons dire dans un autre sens: Dispersi sunt lapides sanctuarii. Quel est le mot de cette contradiction, le sens de ce mystère?

Jésus-Christ, l’architecte divin par qui tout a été fait, veut faire dans le monde quelque chose de plus beau que le monde. Il pose les jalons d’un édifice immense: ce sont les pierres qu’il jette, afin qu’elles servent d’indication à son plan. Ainsi a-t-il fait par les apôtres, ainsi fait-il par les missionnaires; il les disperse pour élever un temple plus grand.

Jésus-Christ en a fait deux: celui de la loi ancienne, le temple de Salomon, celui de Zorobabel, continuateur du premier; il en a fait un autre avec des pierres vivantes. Quand celui de Zorobabel fut dédié, on chanta le psaume: Cantate Domino canticum novum. Qu’est-ce que ce cantique, sinon le commandement nouveau donné par Jésus-Christ? dit saint Augustin. Quid enim habet canticum novum, nisi amorem novum. Cantare amantis est: vox hujus cantoris fervor est sancti amoris. Amemus, gratis amemus: Deum enim amamus quo nihil melius invenimus. Ipsum amemus propter ipsum; et nos in ipso, et tamen propter ipsum. Ille enim veraciter amat amicum, qui Deum amat in amico, aut quia est in illo, aut ut sit in illo. Haec est vera dilectio. Propter aliud si nos diligimus, odimus potius quam diligimus (1).

Dieu est le ciment de ce temple spirituel, où se prêche la vérité, où s’enflamme la charité, où s’élève la sainteté. La lumière même chante dans ce temple: cantabit claritas.

Notes et post-scriptum
1. Le P. d'Alzon portait ce texte de saint Augustin (P.L.XXXVIII 1472, Sermo 336, 1 et 2), dans son bréviaire comme un sujet habituel de méditation.