SERMON SUR L’EGLISE POUR LE JOUR DE SAINT-PIERRE, PATRON DE LA PAROISSE DU VIGAN

Informations générales
  • TD42.039
  • SERMON SUR L'EGLISE POUR LE JOUR DE SAINT-PIERRE, PATRON DE LA PAROISSE DU VIGAN
  • Seconde partie [Les caractères de la véritable Eglise]
  • Orig.ms. CP 121; T.D. 42, pp. 39-43.
Informations détaillées
  • 1 APOSTOLICITE
    1 APOTRES
    1 CARACTERES DE L'EGLISE
    1 CATHOLIQUE
    1 CORPS MYSTIQUE
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 EGLISE
    1 EGLISE EPOUSE DU CHRIST
    1 ENSEIGNEMENT DE JESUS-CHRIST
    1 EPISCOPAT
    1 HERESIE
    1 JESUS-CHRIST
    1 JESUS-CHRIST CHEF DE L'EGLISE
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 MISERICORDE DE DIEU
    1 PAPE
    1 SAINTETE DE L'EGLISE
    1 SALUT DU GENRE HUMAIN
    1 SANG DE JESUS-CHRIST
    1 TRADITION
    1 UNITE DE L'EGLISE
    1 UNIVERSALITE DE L'EGLISE
    1 VERITE
    2 CYRILLE D'ALEXANDRIE, SAINT
    2 CYRILLE DE JERUSALEM, SAINT
    2 MARCION
    2 PAUL, SAINT
    2 PIERRE, SAINT
    2 TERTULLIEN
    3 JERUSALEM
    3 JUDEE
    3 SAMARIE
  • Paroisse du Vigan
  • 1838-1839
La lettre

Comme je vous l’ai déjà fait observer, mes frères, il était de la justice de Dieu de rendre facile la connaissance de cette Eglise, dans le sein de laquelle seule on peut assurer son salut. Car dans le chef-d’oeuvre de sa miséricorde, quoique absolument gratuit du côté de Dieu, la justice divine serait essentiellement blessée, si Dieu n’avait mis à la portée de tous ceux qu’il appelle au salut, c’est-à-dire de tous les hommes en général, le seul moyen d’y parvenir. Et comme l’Eglise est l’unique canal, par lequel les mérites du sang précieux de Jésus-Christ puissent découler jusqu’à nous, il s’ensuit que cette Eglise doit avoir des caractères divins, qui la distinguent de toutes les fausses sociétés qui se disent chrétiennes, et que ces caractères doivent être aisés à connaître. Développons ici en peu de mots les quatre caractères que je vous ai déjà annoncés.

L’unité est un caractère d’autant plus essentiel à l’Eglise de Dieu que la vérité est essentiellement une, qu’elle ne peut se trouver dans deux propositions contradictoires, qu’il lui est impossible de s’allier avec le mensonge, qu’elle réclame nécessairement contre l’erreur. Tous les membres d’un même corps ne doivent-ils pas, en effet, être liés entre eux par l’unité des mêmes principes, de la même profession, du même langage, de la même soumission? Ne serait-ce pas une véritable absurdité de supposer que les membres d’une société, dont Jésus-Christ est le chef, puissent rester membres vivants de cette société dont ils déchireraient le sein, dont ils contrarieraient l’esprit, dont ils affecteraient de méconnaître les maximes et les lois? Ne serait-ce même pas un épouvantable blasphème d’admettre que celui qui est la vérité même, qui par son divin esprit enseigne toute vérité, puisse maintenir, approuver, tolérer ou dissimuler les écarts de l’esprit et du coeur en matière de foi? D’ailleurs, nous ne formons qu’un seul corps, nous dit saint Paul, et Jésus-Christ en est le chef: Unum corpus sumus in Christo. Or Jésus-Christ ne peut avoir qu’un corps mystique, comme il n’a qu’un corps naturel. Enfin, et voici une réflexion absolument péremptoire, Jésus-Christ nous dit dans le saint évangile qu’il a d’autres brebis hors de la Judée et qu’il les rassemblera toutes dans la même bergerie, afin que dans la suite elles ne forment toutes qu’un seul troupeau, sous un seul et même pasteur: Et fiet unus pastor et unum ovile.

Il est incontestable qu’une Eglise fondée par l’auteur même de la sainteté, et dont l’objet est de diriger les fidèles dans la voie de la sainteté, doit être sainte par excellence, non seulement en elle-même, mais encore dans tous ses moyens. Car il est évident que des effets, bons par essence, ne peuvent être des résultats d’une cause vicieuse. Nous devons au reste croire avec saint Paul que l’amour de Jésus-Christ pour son Eglise le porta à se livrer à la mort pour la sanctifier, pour se former un peuple selon son coeur, pour le disposer à se prêter avec zèle à la pratique des bonnes oeuvres: Christus dilexit Ecclesiam et seipsum tradidit pro ea, ut illam sanctificaret. La sublimité de ses dogmes, la pureté de sa morale, les secours qu’elle nous prête pour soulever le voile qui nous dérobe la connaissance des attributs divins, la charité qui est l’âme de ses préceptes sont autant de témoignages en faveur de sa sainteté, et nous prouvent combien il serait scandaleux de supposer que son divin fondateur a pu manquer son objet. Placés au milieu des écueils de la vie, continuellement assiégés par une foule de passions, toujours exposés aux égarements de l’esprit et aux influences du scandale, nous avions besoin d’être éclairés, soutenus, fortifiés, guidés par une autorité dont nous ne pussions méconnaître la sainteté. Et cette sainte autorité doit se trouver dans cette Eglise qui nous dit sans cesse, au nom de Jésus-Christ: Soyez des saints, parce que je suis saint: Sancti estote, quia ego sanctus sum.

L’Eglise doit être catholique, c’est-à-dire universelle. Ce titre lui est tellement propre qu’il lui est spécialement consacré par toute l’antiquité. Nous voyons en effet que, dès le second siècle, les saints Pères l’opposaient victorieusement aux nouvelles prétentions des hérétiques qui dès lors déchiraient l’unité. C’est ainsi que Tertullien désigne l’Eglise orthodoxe contre l’inconsistance et la témérité de Marcion. C’est dans le même sens que saint Clément d’Alexandrie invoque le titre de catholique pour foudroyer le conciliabule des hérétiques de son temps. Enfin, saint Cyrille de Jérusalem nous dit que l’Eglise est appelée catholique, parce qu’elle est répandue dans le monde entier; parce qu’elle y enseigne tout ce qu’il faut croire et pratiquer pour être sauvé; parce qu’elle soumet spirituellement à son empire des hommes de tous les Etats, les rois comme les sujets; parce qu’elle a le pouvoir de remettre tous les péchés; parce qu’enfin, dans ses enfants fidèles, elle possède le trésor de toutes les grâces, la réunion de toutes sortes de vertus.

D’ailleurs, sans doute, vous conviendrez aisément avec moi, mes frères, que l’unique moyen de salut que Dieu ait mis à la disposition de l’homme ne pouvait être borné ni par le temps, ni par les lieux. Il devait être à la portée de tous les âges, de tous les sexes, de tous les états, de toutes les conditions, d’où sortent effectivement les appelés et les élus. Il doit réellement subsister jusqu’à la consommation des siècles. Il doit exercer son efficacité, du moins successivement, dans toutes les parties de la terre. Aussi Jésus-Christ annonçait-il à ses disciples qu’ils lui rendraient témoignage, non seulement à Jérusalem, dans la Judée et dans la Samarie, mais encore jusqu’aux extrémités les plus reculées du monde: Et eritis mihi testes in Jerusalem, et in omni Judea et Samaria, et usque ad ultimum terrae.

Enfin, la véritable Eglise doit être apostolique, c’est-à-dire elle doit enseigner légitimement la doctrine de Jésus-Christ. Mais pourriez-vous vous flatter d’entendre la véritable doctrine de Jésus-Christ, sans être assurés que la doctrine que nous vous prêchons nous a été réellement transmise d’âge en âge par les apôtres, et que nous vous la prêchons avec autorité? Nous avons donc deux obligations essentielles à remplir à votre égard: la première consiste à vous développer la doctrine et la morale apostolique; la seconde est fondée sur ce que nous devons vous parler avec ce pouvoir, avec cette autorité que les apôtres et les disciples reçurent de leur divin Maître. Sans le concours de ces deux conditions, nous ne pourrions exiger de vous aucune soumission, nous n’aurions aucun droit à votre confiance. Vous devriez nous fuir; vous nous fuiriez, en effet, si vous étiez fondés à croire ou que nous altérons le précieux dépôt de la foi, ou que nous vous l’annonçons sans avoir une mission légitime.

Tout, en effet, doit être apostolique dans une Eglise apostolique. Sa doctrine et sa morale doivent venir de Jésus-Christ et nous être transmises par les apôtres; notre mission doit dériver de Jésus-Christ par le canal de ses apôtres et de leurs successeurs dans l’épiscopat, qui est la continuité de l’apostolat. Mais sans entrer ici dans des détails qui prolongeraient trop cette séance, je vous dirai qu’il suffit de savoir que vous êtes dans l’Eglise et avec l’Eglise tant que, soumis vraiment à son [= vos] pasteur[s] immédiat[s], vous avez la certitude que ceux-ci sont dans la communion de votre évêque, et que votre évêque est visiblement uni à la chaire de Pierre. Car c’est effectivement là le chaînon qui vous attache à l’unité, à la sainteté, à la catholicité et à l’apostolicité de l’Eglise de Jésus-Christ.

Notes et post-scriptum