SERMON SUR L’AUTORITE DE L’EGLISE

Informations générales
  • TD42.054
  • SERMON SUR L'AUTORITE DE L'EGLISE
  • Première partie. [L'autorité de l'Eglise]
  • Orig.ms. CP 122; T.D. 42, pp. 54-63.
Informations détaillées
  • 1 APOTRES
    1 AUTORITE DE L'EGLISE
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 DOGME
    1 DROIT CANON
    1 EGLISE
    1 EPISCOPAT
    1 EVANGILES
    1 EVEQUE
    1 FOI
    1 JESUS-CHRIST
    1 JUIFS
    1 JURIDICTION ECCLESIASTIQUE
    1 LOI ECCLESIASTIQUE
    1 MAGISTERE
    1 MINISTERE SACERDOTAL
    1 MIRACLE
    1 PAGANISME
    1 PAPE
    1 POUVOIR DES CLEFS
    1 PRETRE
    1 PRIMAUTE DU PAPE
    1 PUISSANCE DE DIEU
    1 SAINT-SIEGE
    2 BOSSUET
    2 HERODE AGRIPPA I
    2 JACQUES, SAINT
    2 JEAN, SAINT
    2 JUDAS
    2 MARIE-MADELEINE, SAINTE
    2 PIERRE, SAINT
    3 JERUSALEM
    3 ROME
  • Paroisse du Vigan
  • 1838-1839
La lettre

L’Eglise a le droit de nous commander; et, pour nous en convaincre, il suffit de réfléchir sérieusement sur la nature, sur l’étendue et sur la force de cette puissance, qui lui est nécessaire pour régir et gouverner l’ensemble et la partie de la société chrétienne. Cette puissance est une puissance suprême, puisqu’elle émane de ce même pouvoir qu’a Jésus-Christ dans le ciel et sur la terre: data est mihi omnis potestas in caelo et in terra: puisque c’est en vertu de ce pouvoir que les apôtres et les disciples furent envoyés pour enseigner toutes les nations et leur faire observer toutes les choses qui leur avaient été prescrites, euntes ergo, docete omnes gentes…, docentes eos servare omnia quaecumque mandavi vobis. L’objet de cette puissance s’étend sur tout ce qui intéresse l’enseignement: c’est-à-dire les mystères, le dogme, les sacrements, le culte divin et la hiérarchie. C’est effectivement au corps des successeurs des apôtres, qu’il appartient de fixer définitivement la doctrine, de l’annoncer aux fidèles, de déterminer le vrai sens des divines écritures; en un mot, de définir tout ce que nous devons croire et rejeter en matière de foi: car c’est à eux qu’en la personne des apôtres Jésus-Christ confie le pouvoir de lier et de délier sur la terre, et ecce ego vobiscum sum omnibus diebus, usque ad consummationem saeculi.

Cette puissance qui se transmet, quoique d’une manière très subordonnée, aux ministres inférieurs de l’Eglise; dont on trouve une émanation plus essentielle dans les Pasteurs du second ordre; qui est répartie sur chacun des évêques dispersés, et dont la plénitude réside dans le corps moral de l’épiscopat, n’a d’autre fin que de conduire à Dieu et ses dépositaires et tous ceux qui sont confiés à leur sollicitude. Mais, dans cette plénitude du sacerdoce qui constitue l’épiscopat, c’est-à-dire la continuité de l’apostolat institué par Jésus-Christ, nous devons distinguer le successeur de saint Pierre avec le même soin que saint Pierre lui-même doit être distingué de tous les autres apôtres: car s’il est certain que nos évêques succèdent réellement aux apôtres, il n’est pas moins certain que le Pape succède aussi à saint Pierre. Si donc nous voulons nous former une idée claire et précise des prérogatives, ou pour mieux dire, des devoirs de la papauté, il ne faut qu’examiner les prérogatives et les devoirs qu’exerça l’apôtre saint Pierre.

Je vois dans le saint évangile, et j’ai la certitude que l’Eglise a toujours enseigné, qu’outre les pouvoirs d’ordre et de juridiction que les apôtres reçurent collectivement, Jésus-Christ en confia de spéciaux à saint Pierre, pour être transmis à ses successeurs. Vous savez en effet, mes frères, que Simon Pierre est toujours désigné le premier dans les saints évangiles, en qualité de chef du collège apostolique, Primus Simon qui dicitur Petrus. Le Sauveur lui donna le nom de Céphas, qui veut dire Pierre, pour désigner la solidité du fondement sur lequel il allait bâtir son Eglise, tu es Petrus, et super hanc petram aedificabo ecclesiam meam. Dans une autre occasion, il lui promit de lui confier les clefs du royaume des cieux: tibi dabo claves regni caelorum. Et après lui avoir annoncé qu’il aurait la faiblesse de le renier trois fois, Jésus-Christ ajoute: mais j’ai prié pour vous, afin que votre foi ne défaille pas; lors donc que vous aurez été converti, ayez soin d’affermir vos frères dans la foi, et tu aliquando conversus, confirma fratres tuos. Enfin pour le récompenser du témoignage d’amour qu’il en reçut, en présence de tous les apôtres et des disciples, l’homme-Dieu lui confia le soin de paître ses agneaux et ses brebis, c’est-à-dire les pasteurs et les fidèles, pasce agnos meos…, pasce oves meas.

Voilà, chrétiens mes frères, les titres de la primauté de Pierre et de ses successeurs; titre qui ne consiste pas seulement dans une supériorité d’honneur, mais qui renferme une véritable supériorité de juridiction, comme l’a solennellement déclaré le saint concile de Trente. Et il faut remarquer que saint Pierre exerça la fonction de sa primauté du vivant même de son divin Maître. C’est effectivement à Pierre que Jésus-Christ adresse pour l’ordinaire la parole, lorsqu’il parle collectivement à ses apôtres: et c’est lui, qui toujours se charge de parler au nom de tous. C’est à Pierre le premier que Madeleine annonça le fait de la Résurrection; c’est lui qui, le premier, entra dans le saint Sépulchre, quoique saint Jean y fût arrivé avant lui. Après l’Ascension du Sauveur, Pierre se lève au milieu des frères, pour promouvoir l’élection de celui qui devait remplacer le traître Judas, oportet… testem resurrectionis…nobiscum fieri unum ex istis. Aussitôt après la descente du Saint-Esprit, c’est Pierre, qui, assisté des onze, prêche aux Juifs la résurrection et la divinité de Jésus-Christ. Conduit en prison avec saint Jean, c’est lui qui prend la parole devant le Conseil des Juifs, pour rendre solennellement hommage à la divinité du Sauveur. C’est lui enfin qui en présence des autres apôtres, et dans l’assemblée des fidèles, fait des reproches à Ananie et à Saphire, et les punit pour avoir osé mentir au Saint-Esprit.

Tous les apôtres opéraient sans doute des prodiges et des miracles en présence du peuple, pour appuyer la vérité de leur mission. Mais ce peuple lui-même recherchait jusqu’à l’ombre de saint Pierre, dans les rues et les places publiques de Jérusalem, espérant qu’elle seule aurait la vertu de guérir les malades. C’est encore Pierre qui, au nom de tous ses collègues déclare ne pouvoir obtempérer à la défense que le grand-prêtre leur fait d’enseigner au nom de Jésus, déclarant qu’il était juste d’obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes, obedire oportet Deo magis quam hominibus. Toute l’Eglise se met en prière pour demander à Dieu la prompte délivrance de Pierre qu’Hérode avait fait mettre en prison, dans l’intention de le faire mourir après la fête de Pâques, pratique que nous ne voyons pas avoir eu lieu avant le martyre de l’apôtre saint Jacques, quoique évêque de Jérusalem. Oratio autem fiebat sine intermissione ab Ecclesia ad Deum pro eo. Enfin, au Concile de Jérusalem, où tous les apôtres assemblés examinaient l’importante question des observances légales, Pierre fut le premier qui démontra que, dans la suite, les Juifs et les Gentils ne pouvaient être sauvés que par la grâce du Seigneur Jésus, per gratiam Domini Jesu Christi credimus salvari quemadmodum et illi.

Pourriez-vous, mes frères, désirer des preuves plus convaincantes pour reconnaître et la primauté de saint Pierre au-dessus des autres apôtres, et cette supériorité de juridiction qu’il reçut de Jésus-Christ lui-même? Pourriez-vous, d’après les faits que j’ai mis sous vos yeux, pourriez-vous nier que, du vivant même et en présence des apôtres, saint Pierre ait exercé les fonctions de cette juridiction? Mais me direz-vous peut-être, est-il certain que ces prérogatives ne fussent pas personnelles à saint Pierre? Sommes-nous assurés qu’elles dussent être transmises à ses successeurs dans le siège de Rome? Sans doute, Jésus-Christ voulut récompenser dans saint Pierre et la promptitude de sa foi, et l’ardeur de son zèle, et la vivacité de son amour. Mais nous devons reconnaître dans le Sauveur une intention toute particulière, en favorisant Simon Pierre au préjudice (si je puis m’exprimer ainsi) de cet autre apôtre que l’évangile nous désigne sous le nom de disciple bien-aimé. Le chef du Collège apostolique devait avoir une véritable prééminence sur tous ses collègues dans l’apostolat. Il devait être le centre de l’unité par la charité et la foi: j’ajoute que ce centre de l’unité devenait plus néccessaire encore après la mort des apôtres que de leur vivant. D’où je conclus que saint Pierre devait transmettre à ses successeurs les éminents privilèges qu’il avait reçus de Jésus-Christ.

En effet, la prérogative de la primauté n’était pas absolument nécessaire du vivant des apôtres, puisque chacun d’eux était autant d’oracle inspiré et dirigé par l’Esprit-Saint. L’infaillibilité personnelle, la permanente assistance du Saint-Esprit, le don des miracles leur était nécessaire, pour remplir le grand objet de leur mission, c’est-à-dire pour établir et fonder l’Eglise chrétienne. Mais les Evêques, leurs successeurs qui, sans avoir part aux privilèges extraordinaires de l’apostolat, ne succèdent qu’aux pouvoirs ordinaires de ce même apostolat, sont chargés d’unir tous les peuples par les liens extérieurs de la communion ecclésiastique, par la profession de la même foi, par la participation aux mêmes sacrements, par la communion des prières et par la soumission aux mêmes lois, afin d’affermir tous les fidèles par les liens intérieurs de la charité. Or vous conviendrez sans doute avec moi, mes frères, que le propre des passions humaines étant de troubler, de bouleverser cette belle harmonie qui doit caractériser une Eglise toute divine, son divin Auteur dut la mettre à l’abri des efforts continuels de l’homme-ennemi, en lui donnant un chef chargé de veiller avec autorité à la conservation de l’unité, et d’être un antidote ou la terreur du schisme et de l’hérésie. Ce chef suprême, dont vous devez maintenant sentir la nécessité, existe dans le pontife romain qui reçoit comme héritage cette primauté que saint Pierre avait reçue de Jésus-Christ.

Oui, mes frères, l’Eglise a toujours reconnu que les Papes sont les héritiers nécessaires des privilèges que Pierre reçut du Sauveur; elle professe que cet Apôtre est le canal par lequel ses successeurs reçoivent de Jésus-Christ la primauté d’honneur et de juridiction. Et la seule raison nous dicte qu’à défaut de droit divin, supposé que celui-ci ne fût pas la source de la puissance des Papes, il eût été de la sagesse de l’Eglise de l’établir. Rejetez donc avec indignation toute suggestion perfide, tout principe captieux, toute prétention outrée qui tendrait à vous faire méconnaître la véritable source de l’autorité papale, à en affaiblir les ressorts, à atténuer ce que la foi nous enseigne sur la force et l’étendue de sa juridiction. Cette primauté, cette juridiction qu’exerce le Pontife romain ne sont pas effectivement de vains noms, les fonctions qui y sont annexées sont en exercice depuis saint Pierre jusqu’au Pape actuellement régnant; et elles seront en vigueur jusqu’à la consommation des siècles, parce que la chaire de Pierre, dans quelque lieu qu’elle puisse exister, doit durer autant que l’Eglise de Jésus-Christ. Reconnaissez, et la foi vous en fait un devoir, qu’il existe dans l’Eglise une véritable hiérarchie établie de Dieu, composée de ministres, de prêtres et d’évêques; que si le Pape, quant à l’ordre, n’est pas plus que les autres évêques, parce que sous le rapport seul de l’ordre il n’y a rien au-dessus de l’épiscopat, il est réellement supérieur aux autres évêques, quant à la juridiction: et je pourrais dire, dans un sens, qu’il est l’évêque des évêques, Episcopus episcoporum, puisqu’en qualité de successeur de saint Pierre, sa sollicitude doit s’étendre à toutes les Eglises particulières qui sont en communion avec l’Eglise romaine, pasce agnos meos…, pasce oves meas.

N’allez cependant pas croire que cette sollicitude générale, que cette juridiction, que le Pape exerce dans l’Eglise universelle, affaiblisse ou anéantisse cette autre autorité annexée à l’épiscopat, en vertu de laquelle chaque évêque doit régir le troupeau que l’Eglise lui a particulièrement assigné. Chaque évêque, comme successeur des apôtres jouit de toute l’autorité de l’apostolat dans le diocèse qui lui est assigné par l’Eglise: et si le Pontife romain exerce, depuis plusieurs siècles, dans les diocèses particuliers certains actes de juridiction épiscopale qui, radicalement, appartiennent à l’épiscopat, c’est qu’il existe des temps critiques, où l’abus de la force exposant les évêques à des persécutions personnelles, il était essentiel que ces actes de juridiction fussent exclusivement exercés par le chef de l’épiscopat. Son influence dans le système politique, le soutien qu’il trouvait dans quelques potentats, lorsque d’autres princes élevaient des prétentions exagérées, la situation de son siège dans un état libre et indépendant de toute autorité étrangère lui donnaient beaucoup plus de moyens pour déjouer l’intrigue, pour s’opposer au relâchement, pour résiter à la force, pour faire respecter les dispositions des saints canons. Tout en avouant que cette juridiction n’est qu’accessoire à la papauté, j’ajouterai que si l’Eglise a réservé au Saint-Siège, ou l’a maintenu dans le fait d’exercer une sorte de juridiction qui n’est pas essentielle à sa primauté, nous devons respecter la sagesse de ces dispositions, nous devons nous y soumettre avec humilité; nous devons professer hautement que de telles dispositions doivent être sacrées pour chacun des évêques particuliers, parce qu’il n’appartient qu’à l’Eglise seule, et non à quelques évêques particuliers de changer la discipline générale.

Mais quant à cette partie de la juridiction, qui est essentielle à la primauté de la chaire de Pierre, l’Eglise toute entière ne peut y porter la moindre atteinte, parce que les Papes l’ont de droit divin. Elle consiste à maintenir les lois de l’Eglise dans toute leur force, à veiller à ce que les évêques s’y conforment et les fassent observer dans leurs diocèses respectifs; à défendre le dogme, la morale et la discipline générale; à punir les transgresseurs obstinés, dans quelque état, dans quelque ordre, dans quelque dignité qu’ils se trouvent. En un mot, Le Pontife de l’Eglise romaine, nous dit l’illustre et savant évêque de Meaux, est placé sur le premier siège, il est revêtu d’un pouvoir tout divin qui s’étend à toute l’Eglise, pour maintenir les saints canons, tant par la force de son exemple que par tous les ressorts de son autorité. Oui, chrétiens qui m’écoutez, le Saint Siège apostolique a toujours été, il est, et il sera toujours le vrai centre de la communion ecclésiastique. L’Eglise romaine est la mère et la maîtresse de toutes les autres Eglises. Elle est l’Eglise choisie de Dieu pour unir tous ses enfants par les liens de la même foi et de la charité. Son Pontife a dans l’Eglise, la principale autorité, toutes les causes majeures, celles qui concernent le bien général doivent être portées à son tribunal, et les affaires qui touchent au dogme, à la morale et à la discipline générale ne sont censées jugées en dernier ressort, lorsque l’Eglise n’est pas assemblée en concile, que quand il a prononcé en sa qualité de chef suprême de la société chrétienne.

Qu’il me soit permis encore d’emprunter ici les explications du grand évêque de Meaux et de m’écrier avec lui: « Que vous êtes terrible, ô Eglise sainte, lorsque vous marchez Pierre à votre tête, et la chaire de l’unité vous unissant toute entière, abattant les têtes superbes et toute hauteur qui s’élève contre la science de Dieu; pressant vos ennemis de tout le poids de vos bataillons serrés, les accablant tout ensemble et de toute l’autorité des siècles passés, et de toute l’indignation des siècles futurs; dissipant les hérésies et les étouffant souvent dès leur naissance; prenant les petits de Babylone et les hérésies naissantes, pour les briser contre votre Pierre; Jésus-Christ, votre chef, vous mouvant et vous unissant, mais vous mouvant et vous unissant par des instruments proportionnés, par des moyens convenables, par un chef qui le représente, qui, en tout, vous fait agir toute entière, et rassemble toutes vos forces dans une seule action ». Tel est, chrétiens auditeurs, l’effet que produit cette hiérarchie ecclésiastique qui consiste dans une merveilleuse suite de ministres, dont les différentes fonctions et la juridiction graduée forment l’Eglise enseignante que l’Ecriture compare à une armée rangée en bataille. A la subordination de ses ministres entre eux, à la variété de leurs fonctions respectives, à cette concorde, à cette union qui, malgré nos faiblesses personnelles, n’en font qu’un seul corps dont le Pape est centre et chef, pourriez-vous méconnaître cet organe divin qui seul peut vous frayer le vrai chemin du salut?

Le principal objet de notre ministère est sans doute de diriger les hommes dans la science et dans les voies du salut. Mais pourrions-nous y parvenir, sans avoir nous-mêmes des règles à suivre, des lois à faire exécuter, des peines et des récompenses à proposer? Mais ces règles et ces lois, ces récompenses et ces peines qui en sont la sanction nécessaire pourraient-elles avoir quelque force, si l’Eglise n’était autorisée à préposer une classe de ses ministres, pour surveiller l’exécution de ses décisions et de ses décrets? Car gardez-vous bien, mes frères, de croire que la sanction des lois ecclésiastiques ne consiste que dans les biens et les maux qui, dans une autre vie, doivent terminer la carrière du chrétien! Cette sanction est la plus forte sans doute, puisqu’elle présente des récompenses et des châtiments éternels. Mais comme société visible, dont la durée doit être égale à celle de l’univers, l’Eglise devait avoir, elle possède réellement un pouvoir nécessaire pour faire respecter les lois, afin d’être à l’abri de l’instabilité et des vicissitudes humaines: elle doit avoir, elle a une force coactive conforme à la nature de son objet, elle peut donc, elle doit donc imposer des peines proportionnées à la nature et à la gravité des délits.

Au reste cette force coactive ne consiste pas à obliger les particuliers d’entrer ou de demeurer dans sa société. L’instruction et la persuasion sont les seuls moyens, dont elle puisse légitimement user pour appeler les uns, et retenir les autres. Mais vous, qui librement, reconnaissez l’Eglise pour votre mère, vous qui appréciez avec tant de raison l’auguste titre de catholiques, tremblez en considérant la nature et les effets des peines que vous encourriez si vous vous constituiez rebelles à ses ordres. Je conviens que ces peines ne portent ni sur vos corps ni sur vos biens, ni sur les fonctions que vous confie l’autorité civile. Elles frappent seulement l’âme des coupables, en suspendant, dans les uns, l’exercice des fonctions de leur ordre et de leur juridiction; en privant les autres de la participation aux sacrements; en menaçant ceux-là de tarir pour eux la source des biens spirituels, en retranchant ceux-ci de sa société. Ces peines une fois portées, atteignent les coupables, malgré qu’ils en aient, dans quelque état qu’ils se trouvent, de quelque condition qu’ils soient, dans quelque lieu qu’ils se retirent. Elles le suivent et s’attachent à eux, lors même que sans attendre une sentence formelle, ils se retranchent eux-mêmes du nombre des fidèles, ils en portent l’empreinte jusqu’aux pieds du tribunal de Dieu, auquel il est réservé de mettre le dernier sceau à leur réprobation.

Si vous avez la foi, chrétiens qui m’écoutez, vous devez voir maintenant combien il est essentiel pour vous de vous soumettre à une autorité dont les effets rejaillissent jusque dans l’éternité. Il vous importe donc beaucoup de connaître la nature et l’étendue de la soumission que vous devez à l’Eglise, et c’est des caractères que doit avoir cette soumission que je vais vous entretenir dans la seconde partie de cette instruction.

Notes et post-scriptum