[Conférences aux hommes sur l’organisation des catholiques]

Informations générales
  • TD46.108
  • [Conférences aux hommes sur l'organisation des catholiques]
  • II. DE L'ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE ET DE LA HAINE QU'IL EXCITE CHEZ LES LIBRES PENSEURS.
  • Orig.ms. CS 55; T.D. 46, pp. 108-110.
Informations détaillées
  • 1 ATHEISME DE L'ETAT
    1 EGLISE ET ETAT
    1 ENSEIGNEMENT CATHOLIQUE
    1 INFAILLIBILITE PONTIFICALE
    1 LIBRE PENSEE
    1 PAPE
    2 HENRI VIII
    2 JURIEU, PIERRE
    2 LOUIS XIV
    2 LUTHER, MARTIN
    2 PHILIPPE LE BEL
    2 PHILIPPE LE MAGNANIME, DE HESSE
    3 ALLEMAGNE
    3 FRANCE
  • Hommes de Nîmes
  • Entre le 14 et le 21 janvier 1872
  • Cathédrale de Nîmes
La lettre

Nous avons vu hier que l’enseignement gratuit, obligatoire, laïque, tel qu’il était entendu par le ministre de l’Instruction publique, était: 1° contraire au bon sens; 2° à la notion de la liberté nécessaire de nos jours; 3° aux intérêts les plus chers des catholiques.

Nous avons prouvé que la gratuité était un mensonge, l’obligation un vol, le laïcisme une impiété; et nous avons conclu que ceux qui se faisaient les instruments de pareilles machinations voulaient, en matière de croyance, non seulement imposer à la place du joug de Dieu le joug de l’homme, mais à la place de la religion d’Etat mettre l’irréligion d’Etat. Pratiquement nous avons conclu à la nécessité de pétitions contre la loi sur l’enseignement primaire.

Mais cela ne suffit pas. Il faut aller plus avant, et reprenant notre affirmation que nous allons directement à l’irréligion d’Etat, il faut, d’une part, dire comment on a été fatalement conduit à cette conséquence abominable, de l’autre, indiquer le remède que Dieu y a opposé.

En disant comment nous avons été conduits à l’irréligion d’Etat, j’attaquerai de front les doctrines révolutionnaires, – ce qui me préoccupe peu – mais je serai forcé de combattre certains hommes aussi honorables que peu logiques, ceux qu’on appelle les catholiques libéraux et que je serai tenté d’appeler les esprits faux du catholicisme, parce que acceptant les principes de la révolution leur honnêteté les conduit par un raisonnement de travers à rentrer dans les conclusions de l’Eglise.

Ceci dit, j’entre en matière.

A remonter à la conjuration de l’homme contre Dieu, il faudrait reprendre à l’origine du monde; mais je passe au déluge, je passe plus loin, aux empereurs allemands du Saint-Empire et en France à Philippe le Bel. Ils étaient gênés, ces princes souillés de tous les crimes par les reproches des Papes.

Les luttes furent longues, Luther arriva. Parmi les princes ceux qui, comme le Landgrave de Hesse, avaient besoin d’avoir plusieurs femmes à la fois, ou de les renvoyer comme Henri VIII, ne manquèrent pas de se précipiter dans la Réforme. D’autres en restant catholiques trouvèrent très bonne la doctrine qui les maintenait dans une certaine dépendance par la séparation de l’Eglise et de l’Etat, et en ce sens Louis XIV fut un des premiers socialistes français.

Mais Louis XIV, en faisant proclamer des principes désastreux, n’en gardait pas moins une certaine mesure. Les parlements ne la gardèrent pas, le protestantisme encore moins, encore moins les sociétés secrètes, encore moins la philosophie. La philosophie, le protestantisme, les sociétés secrètes s’étaient donné la main. J’admire comment un système formulé par les ennemis de l’Eglise peut avoir [quelque chose] de bon aux yeux de certains catholiques. Et c’est ainsi que les sectes religieuses, les sectes philosophiques, les sociétés secrètes se sont donné la main.

On a dit, séparons l’Eglise de l’Etat. Les évêques gallicans, les parlements jansénistes, les protestants, les philosophes, les sociétés secrètes ont suivi à des degrés divers. Où était-on arrivé? A dire: la raison suffit au peuple. Et encore? Car disait Jurieu: Le peuple n’a pas besoin d’avoir raison pour valider ses actes. C’était logique. S’il n’y a pas une raison divine, il n’y en a pas.

Mais où la trouver? Le philosophe, l’homme d’Etat, le protestant l’ont réprouvée. Est-ce une raison pour qu’elle ne soit pas chez les catholiques? Mea doctrina non est mea.

Deux Eglises: enseignante et enseignée. Et on se perdait. Quand parle l’Eglise enseignante? Par les conciles. – Aujourd’hui cela ne suffisait plus. Par le Pape. L’Eglise n’a pas rendu le Pape infaillible en le proclamant tel, mais elle l’a proclamé tel parce qu’il était infaillible.

Mais l’infaillibilité proclamée, vous soyez la lutte entre la raison de l’homme et la raison de Dieu.

Opportunité. Au moment des plus épouvantables cataclysmes les catholiques ont un phare. Mais vous soyez l’objet de la fureur des libres penseurs, des légistes, des sociétés secrètes, je ne parle pas des protestants de France, mais des protestants d’Allemagne et des Juifs de tous les pays.

Si le pape est infaillible, si l’infaillibilité a ses martyrs, tous les plans révolutionnaires sont déjoués. Eh bien, ils le seront. Salutem ex inimicis nostris, et de manu omnium qui oderunt nos. Que résultera-t-il de ceci? Les catholiques plus éclairés se poseront tous les jours plus nettement là où ils devront triompher. Les catholiques libéraux honnêtes viendront à nous, les libéraux logiques à la révolution. Il n’y aura que deux camps.

Seulement le chef des catholiques reconnu plus nettement aura un pouvoir moral bien autrement grand, mais les devoirs, eux aussi, deviendront plus clairs. Il faut entourer notre chef, le défendre, l’assister par les pétitions, par le Denier de Saint-pierre, par l’action parlementaire. Prouvons que le catholique est citoyen.

A demain sur les associations.

Notes et post-scriptum