[Autres notes et fragments de sermons et de conférences]

Informations générales
  • TD46.342
  • [Autres notes et fragments de sermons et de conférences]
  • III. Sermon. Pécheresse pénitente.
  • Orig.ms. CS 150; T.D. 46, pp. 342-345.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DU CHRIST
    1 BON EXEMPLE
    1 CONTRITION
    1 GLOIRE DE DIEU
    1 PECHE
    1 PECHEUR
    1 VERTU DE PENITENCE
    1 VIE DE SACRIFICE
    2 JEAN CHRYSOSTOME, SAINT
    2 MARIE-MADELEINE, SAINTE
    2 SIMON LE LEPREUX
  • 1838-1839
La lettre

Vides hanc mulierem?

Paroles de Jésus à Simon scandalisé de ce que le Sauveur accueillait ainsi une pécheresse à ses pieds. Paroles de reproche envers cet homme qui croyait accomplir la loi. Paroles de reproche envers ces chrétiens austères qui ne croient pas à la possibilité de la conversion. Paroles d’encouragement envers cette femme par le parallèle que Jésus va faire entre elle et Simon. Paroles d’encouragement pour les pécheurs qui voulant se donner à Dieu craignent d’être arrêtés par certains rebuts qu’ils pourraient rencontrer.

Voyez-vous cette femme, mes frères; la voyez-vous, vous surtout qui dans quelque position que vous vous trouviez, comprenez peut-être enfin qu’il est temps de faire pénitence? Vides hanc mulierem? Voilà votre modèle. Jésus vous invite avec moi à méditer sur sa pénitence. Elle a deux caractères principaux: sa publicité envers les hommes, sa ferveur envers Dieu.

La pénitence doit être publique. Ce que j’entends par pénitence publique. Par pénitence publique je n’entends pas la pénitence des premiers siècles; je n’entends pas, non plus, qu’il faille manifester par des regrets extérieurs des fautes commises en secret et que la prudence veut faire tenir cachées; mais j’entends que la plupart des chrétiens ne se gênant pas pour offenser Dieu doivent, quand ils reviennent à Dieu, compter pour rien de laisser connaître au monde leur retour, et, s’il le faut, les réparations qu’ils ont commises. Mais voilà ce qu’on ne veut pas. On s’est converti, mais on ne veut pas le paraître. – La publicité de la conversion. Les plaisanteries que l’on essuiera est [= sont] le plus grand obstacle.

Montrons par l’exemple de la femme pécheresse ce que nous avons à faire. Je trouve trois motifs de publicité, trois motifs pris dans la gloire de Dieu, l’édification du prochain et notre propre avantage.

A.

1° La pénitence doit être publique, parce que Dieu offensé publiquement veut une réparation publique. Voyons cette femme coupable de tant de crimes; elle affronte la honte de venir les avouer, et c’est dans un festin qu’elle vient se présenter à Jésus. Ce qui fait que nous avons honte, c’est que nous ne nous figurons pas assez en général l’insulte que le péché fait à Dieu, et par conséquent la satisfaction que Dieu a le droit d’exiger. Qu’est-ce que la majesté de Dieu et qu’est-ce que nous sommes? Quid superbit pulvis et cinis? Le pécheur attaquant Dieu dans sa gloire doit rendre, autant que possible, à Dieu la gloire qui lui est due. Et voilà ce qu’il ne veut pas. Mais si la gloire de Dieu est son bien, gloriam meam alteri non dabo, le pécheur qui la lui ravit se rend coupable de vol; il faut qu’il la lui restitue et qu’il la restitue comme il la lui a prise. Il la lui a enlevée devant les hommes, il faut qu’il la lui rende devant les hommes et qu’il la lui rende aussi grande qu’il la lui a voulu prendre; car si vous ne le voulez pas, Dieu saura bien la reprendre au jugement et aux enfers.

2° [La pénitence doit être publique,] parce que les hommes scandalisés par votre péché doivent être édifiés par votre retour. Vous avez scandalisé, il y a responsabilité: mandavit unicuique de proximo suo. Et vous avez péché devant vos frères, le sang d’Abel crie vers les cieux. Mère, vous avez perverti votre fille – elle était pieuse; père, votre enfant; maîtres, vos domestiques. Un ami s’était confié à vous; vous vous en êtes servi pour le perdre. Vox sanguinis fratris tui clamat ad me de terra. Il faut une réparation. Eh bien, vous la ferez en leur manifestant votre repentir, votre changement, en avouant moins encore par vos paroles que par votre pénitence.

Mais, me direz-vous, on ne croira pas à ma conversion et l’on s’en servira contre les prêtres qui admettent avec trop de facilité. Hic si esset propheta, sciret utique quae et qualis est mulier, quae tangit eum, quia peccatrix est. Mes frères, laissez parler le monde. Jésus qui prend la défense de la pécheresse connaîtra le fond de votre coeur. Les vrais disciples de Jésus ne vous blâmeront pas. Vous serez blessé par les pharisiens et par ceux qui dans votre conversion verront la condamnation de vos [= leurs] retards.

3° [La pénitence doit être publique,] parce qu’ayant offensé Dieu vous devez prouver qu’aucun obstacle ne vous arrêtera désormais. Combien de fois, mes frères, n’avez-vous pas promis à Dieu de devenir meilleurs et n’êtes-vous pas restés les mêmes? C’est qu’autre chose est faire, et autre chose est tenir. Votre pénitence doit donc être extérieure, afin que vous donniez à vous-même la preuve que votre contrition n’est pas un sentiment stérile. De plus, vous avez comme un engagement à prendre vis-à-vis de vous-même. Quand une fois vous aurez eu le courage de confesser Dieu devant les hommes, vous serez comme engagé à le servir.

En troisième lieu cela vous coûte. Tant mieux! Vous détruisez l’orgueil, vous le foulez aux pieds, vous écraser votre plus cruel ennemi.

Note. – Saint Jean Chrysostome fait observer que ce n’est pas pour rien qu’on remarque que Jésus était chez Simon le lépreux. Cette femme avait compris, dit-il, que le Sauveur venait pour guérir non la lèpre du corps, mais le péché, cette lèpre de l’âme. Tandis que les autres viennent chercher la guérison du corps, elle [cherche] la guérison de l’âme.

B. – [Pénitence] sincère.

Madeleine donne quatre marques de sa pénitence.

1° Larmes qu’elle répand, regret de ses fautes passées. Où sont les personnes, mes frères, qui ont ce regret de leurs fautes et qui ont toujours devant les yeux la tache de leur péché? Où sont les personnes qui arrosent leur couche de leurs larmes? et lacrymis meis stratum meum rigabo. Ah! quelle est-elle l’âme pénitente? Plorans ploravit in nocte, et lacrymae ejus in maxillis ejus. Mais ces larmes on les a, quand on a l’horreur du péché, quand on comprend la plaie qu’il fait à l’âme. Qui a cette pénitence? A peine peut-on obtenir quelque sentiment, quelques promesses qui s’échappent vite. Et c’est pourtant ce regret qui pousse Madeleine à aller trouver son médecin.

2° Elle essuie les pieds du Sauveur avec ses cheveux. Sacrifice des superfluités. La voyez-vous aux pieds de son maître? Elle lui sacrifie tout ce qu’elle a de plus précieux. Ce que ces créatures préfèrent, ce sont leurs cheveux. Ah! vous voulez vous aussi vous convertir, offrez à Dieu ce que vous préférez. Si c’est une cause de péché, le sacrifice est indispensable; si ce n’est qu’une occasion éloignée, je ne l’exigerais pas impérieusement, mais que je serais assuré de la sincérité de votre conversion, si je vous voyais offrir à Dieu vos superfluités, et offrir à Dieu ce que vous aviez jusques à aujourd’hui consacré au monde! – Et c’est ce qui lui fait trouver son Dieu en mettant aux pieds de Dieu [Jésus] un ornement naturel qui aux yeux du monde avait du prix. Elle proteste quitter le monde pour appartenir à Jésus-Christ. Courage, vous aussi. – Elle trouve Jésus-Christ.

3° Elle les [les pieds] baise – Marque de son amour. – Pieds qui vont être percés pour elle, pieds qui sont venus au-devant d’elle. Et Jésus l’accueille. Quoi! une si indigne créature? Ah! si vous vouliez! Son amour augmente sa foi et elle mérite le pardon. Opposition entre l’amour de cette femme et celui du pharisien. Il [celui-ci] aimait un peu puisqu’il invitait Jésus, mais il n’aimait pas beaucoup, parce qu’il ne croyait pas avor beaucoup de péchés. Mais vous êtes également débiteurs. Vous n’avez pas péché, mais vous êtes débiteurs à Dieu de toutes les fautes que vous n’avez pas commises par sa grâce. Et si vous aimez moins Dieu, ce n’est pas qu’il ait moins fait pour vous, mais parce que vous croyez qu’il a moins fait.

4° Elle les parfume. – Offrande de ses bonnes actions – Obtient la paix. La bonne odeur de sa foi, dit saint Jérôme, jointe aux oeuvres, car sans les oeuvres qu’est-ce que la foi?

Mais voyez le double travail. Tandis qu’elle arrose Jésus de ses larmes, Jésus la lave par avance de son sang; tandis qu’elle le couvre de ses cheveux, Jésus l’embellit de ses vertus. Elle baise avec amour, et Jésus donnait à son âme le baiser de paix; elle l’inondait de parfums, et Jésus l’inondait des parfums de la grâce.

Notes et post-scriptum