Informations générales
  • TD47.354
  • [Méditation sur l'] HUMILITE
  • Orig.ms. CT 89; T.D. 47, pp. 354-355.
Informations détaillées
  • 1 AUGUSTIN
    1 HUMILITE
    2 BERNARD DE CLAIRVAUX, SAINT
    2 DAVID, BIBLE
La lettre

Discite a me, quia mitis et humilis sum corde. Voilà l’enseignement de Jésus-Christ. Il est doux et il est humble, et si nous ne sommes pas humbles, nous ne sommes pas les disciples de Jésus-Christ. 1° Qu’est-ce que l’humilité? 2° Quels sont les motifs de l’humilité?

1. Qu’est-ce que l’humilité?

Humilitas est virtus qua homo verissima sui cognitione sibimetipsi vilescit. (s. Bernard). Il faut en venir là, se connaître et connaître son néant d’origine. Mais cela ne suffit pas. Il faut de plus, voir son néant de péché, c’est-à-dire toute la corruption que le péché originel a apportée à notre âme, et quand nous envisageons tout ce que nous avons honte de laisser voir aux autres, alors nous pouvons sans peine nous mépriser.

En effet, qui dira nos ignorances et nos erreurs volontaires, nos défauts de sincérité, nos colères, nos impatiences? Qui dira la honte de certaines tentations, nos chutes secrètes? Qui dira le mobile de nos actions, nos jalousies, nos haines, nos hypocrisies? Ah! qu’il y a sujet d’être fier! Oui, l’humilité nous montre ces choses et nous humilie à nos propres yeux. Humilitas est virtus qua homo verissima sui cognitione sibimetipsi vilescit. Ainsi David se rendit vil en dansant devant l’arche et Dieu le bénit à cause de son humilité.

Mais on peut prendre l’humilité par un autre côté, et l’on vous rapporte le texte de saint Augustin, par lequel il indique l’idée fondamentale de son traité De la cité de Dieu. Civitates duas fecerunt amores duo: amor sui usque ad contemptum Dei, et amor Dei usque ad contemptum sui. Voilà l’univers et dans l’univers les deux mondes reposant sur deux amours. Si je m’aime avec exagération, je méprise Dieu, et c’est le partage des pécheurs qui se préfèrent à tout. Que si, ai contraire, j’aime Dieu par-dessus toutes choses, je le contemple et je n’ai que le temps de penser à lui, je me perds dans son essence. Seulement je ne m’y perds pas comme les anges, esprits purs qui sont humbles par la connaissance de leur néant; moi, j’ai à m’humilier par la connaissance de l’opposition qui subsiste entre les perfections de Dieu et mon péché.

Quand serai-je assez humble, c’est-à-dire assez dans la vérité, en face de l’être de Dieu? Quand donc le contraste entre Dieu, tel que la foi me permet de le connaître, et mes misères me fera-t-il comprendre à quel point, ver de terre révolté, je suis méprisable?

2. Motifs d’humilité.

Mais il n’y [en] a pas d’autres, à proprement parler, que ceux qui se puisent dans les deux définitions que je viens de rapporter. Je dois être humble, parce que je suis un être très méprisable, et l’étude de mon néant, de mon péché suffit pour me rendre humble à coup sûr.

D’autre part, la contemplation des perfections de Dieu me montrera très clairement à quel point je suis cendre et poussière. Mais Dieu dans sa bonté m’a montré son Fils, mon modèle, qui lui s’est anéanti à l’incarnation: Exinanivit semetipsum. Il s’est anéanti à l’eucharistie. Quels motifs d’humilité!

J’en ai encore un autre, le mal que je voile: Priusquam humiliarer, ego deliqui. Quel avantage immense! J’étais sous le coup du péché, Dieu m’envoie une humiliation et voilà que le péché se manifeste à moi. J’en ai honte, je le confesse, et dans ma confusion, je trouve une sauvegarde pour ne pécher plus: Priusquam humiliarer, ego deliqui.

Quelles lumières l’humilité ne donne-t-elle pas? Je comprends l’exclamation du prophète: Bonum mihi, quia humiliasti me, ut discam justificationes tuas. En effet, oratio humiliantis se nubes penetrabit. Quelle pitié Dieu a-t-il de l’orgueilleux! Il lui résistera toujours: Deus superbis resistit, humilibus autem dat gratiam. Mon Dieu, donnez-moi une véritable humilité.

Notes et post-scriptum