1838-1839

Informations générales
  • TD48.144
  • [Du Saint-Esprit. Notes de sermon]
  • Orig.ms. CU 3; T.D. 48, pp. 144-148.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE DIEU POUR SA CREATURE
    1 CHRETIEN
    1 CREATION
    1 CREATURES
    1 DECADENCE
    1 EGLISE
    1 HAINE CONTRE DIEU
    1 MAUX PRESENTS
    1 PECHE ORIGINEL
    1 PECHEUR
    1 REDEMPTION
    1 SAINT-ESPRIT
    1 THOMAS D'AQUIN
  • 1838-1839
La lettre

Charitas Dei diffusa est in cordibus nostris per Spiritum Sanctum qui datus est nobis.

C’est sans doute, mes frères, un grand et divin spectacle que celui de l’Esprit-Saint venant inaugurer sur la terre l’Eglise de Jésus-Christ. C’est quelque chose de merveilleux que ces premiers commencements d’une société, qui, depuis quatre mille ans, plonge ses racines dans l’humanité corrompue et qui se manifeste enfin à la terre. Mais en reconnaissant en vous la toute-puissance d’un Dieu qui opère de pareilles merveilles, je me propose d’offrir à vos méditations, en ce jour, quelque chose qui satisfera davantage votre piété.

Sans doute l’art d’un architecte consiste à déployer dans un vaste édifice et l’harmonie des lignes, et l’unité du plan, et la proportion des détails extérieurs; mais ce n’est point aux insultes de l’air, à l’intempérie des saisons qu’il expose ses travaux les plus délicats, il les réserve pour l’intérieur du monument, où ils seront admirés par ceux qui sont frappés de la majesté extérieure de l’édifice. Il en est de même des choses saintes. Jésus-Christ, le divin architecte de l’Eglise, a sans doute imprimé l’empreinte de sa divinité sur cet édifice spirituel. Mais en même temps que, selon l’expression des Pères, l’Esprit-Saint a été comme le ciment qui en joint les diverses parties, il a voulu que ce même Esprit offrît aux yeux de la foi qui cherche avec humilité le spectacle le plus beau, le chef-d’oeuvre de l’action dans la sanctification du chrétien. Et tel est le sujet dont je me propose de vous entretenir. Je veux vous montrer le Saint-Esprit agissant non pas sur l’ensemble de l’Eglise, mais sur chaque membre en particulier, et voici le plan auquel je m’arrête: le Saint-Esprit, dans sa communication avec les hommes, force du chrétien et grandeur du chrétien.

Marie, chaste épouse de cet Esprit de sainteté et de lumière, obtenez-nous de correspondre, à votre exemple, aux pures influences de l’amour de Dieu. Ave, Maria.

Première partie: Le Saint-Esprit, force du chrétien.

Sans entrer ici dans de trop longues considérations sur la dégradation du premier homme par le péché, qu’il me soit seulement permis d’observer que les causes de sa révolte se résument dans un amour désordonné de lui-même. L’homme s’aima plus que Dieu; voilà pourquoi il se préféra à Dieu, voilà pourquoi il se révolta contre Dieu. Or considérez avec moi, je vous prie, le triple effet de cet amour désordonné de soi. Premièrement, il le porte à la haine contre Dieu; secondement, il le sépare des créatures; troisièmement, il laisse l’homme dans une impuissance absolue.

Haine contre Dieu. En effet, qu’est-ce que la haine poussée au plus haut point, sinon le désir de l’anéantissement de l’objet qu’on déteste? Mais l’homme aspirant à être Dieu, que fait-il que désirer l’anéantissement de son auteur, puisque l’existence de deux dieux implique contradiction. Donc l’acte qui porte l’homme à chercher à être Dieu est l’acte le plus violent de haine contre Dieu même.

Séparation des créatures. Mais l’homme n’a de rapports avec les créatures que ceux qu’il a plu à Dieu d’établir. Les créatures ne sont sous le domaine de l’homme qu’autant qu’il plaît à Dieu de lui en laisser la jouissance. Et il est naturel de penser que si Dieu lui laisse le pouvoir d’en jouir, ce sera à la condition qu’il en fera un légitime usage; comme aussi son droit est nul sur tout objet créé, du moment qu’il prétend le tourner contre le créateur.

D’autre part, ses rapports envers ses semblables ne reposant que sur une chaîne de devoirs et de droits, dont le premier anneau touche au trône de Dieu, du moment que cet anneau est brisé, la chaîne retombe sur la terre et ne peut plus resserrer les liens des rapports sociaux. Dès ce moment aussi les hommes, livrés à eux-mêmes et puisant dans des intérêts contraires des motifs d’agir opposés, ne peuvent plus trouver une apparence d’ordre que sous le joug de la force et le sceptre de l’erreur et de la nécessité.

Troisièmement, je vous prie de le considérer avec moi, séparé de ses semblables et de l’univers, en haine avec Dieu, que reste-t-il à l’homme, jeté sur la terre pour y maudire sa destinée et pour gémir sur ses irrémédiables déceptions, qu’une immense faiblesse, qu’une impuissance infinie à sortir de lui-même, de cet état? Car à quoi se prendra-t-il pour en sortir? A l’univers? Mais qu’est-ce que les créatures inanimées pourront apporter de bien à cet être qui a été blessé dans son intelligence? Que pourront ses semblables, courbés sous la même destinée, traînant la même chaîne, s’avançant vers le même tombeau.

Il ne peut rien que par son Dieu. Et ce Dieu, il l’a insulté, il a blasphémé contre lui, il lui a déclaré qu’il se passerait de lui. Voulez-vous qu’il aille se prosterner à ses pieds? Non, non, il ne le peut; l’orgueil l’arrêtera toujours, et de ce sentiment de haine qui s’irrite sans cesse à la vue des déplorables résultats, surgira une irrémédiable déception. Contemplez cet être déchu, luttant contre la sentence qu’il a portée contre lui-même, lorsqu’il a dit à Dieu: « Retire-toi », et dites si des douleurs peuvent être comparées à ses douleurs. Et cependant il s’affaissait sans cesse, il a trouvé des jours d’angoisse inexprimable et il ne découvre, au terme de cette voie de haine, que la dissolution et l’éternelle mort.

Dieu laissera-t-il sa créature suivre la voie fatale où elle est entrée? Ne le pensons pas. La faiblesse même de cette créature touchera la miséricorde divine, et le Seigneur mettra sa gloire à faire briller la splendeur de sa face sur cette créature dégradée. Le monde n’était qu’un vaste chaos, mais l’esprit de Dieu y reposera de nouveau et le chaos sera de nouveau fécondé.

Comment aura lieu ce prodige? Cum inimici essemus, reconciliati sumus per mortem filii ejus. La mort de Jésus-Christ a préparé la réconciliation. Mais avant que Jésus-Christ fût mort, Dieu aima déjà le monde: Sic Deus dilexit mundum. C’est pour cela qu’il a donné son Fils. Mais cela ne suffisait pas, il a envoyé son amour même dans le monde. Et c’est ainsi qu’éclatera la puissance de Dieu; car l’amour qu’il manifesta aux hommes sera une seconde création. Car, selon saint Thomas, les hommes appelés à la sainteté par l’amour de Dieu reçoivent un nouvel être tiré du néant: in novo esse constituuntur ex nihilo.

Que dis-je? L’oeuvre de la réparation sera pour Dieu quelque chose de plus extraordinaire que la création, puisque tous les jours l’Eglise dans sa célébration des saints mystères lui dit: Deus qui humanae substantiae dignitatem mirabiliter condidisti, et mirabilius reformasti. Et c’est qu’en effet le prophète l’invite à s’approcher pour manifester l’effort de sa toute- puissance: Excita potentiam et veni. Il viendra, en effet, manifester la toute-puissance de son amour. Mais cela ne suffira pas. Car cette force de son amour agira incessamment contre le principe de haine déposé dans le coeur de l’homme et tendra sans cesse à le détruire; l’amour de Dieu descendra dans le coeur des fidèles et y sera un principe de force.

Le voyageur qui contemple en passant les monuments à demi détruits de la vanité des hommes, en s’asseyant au milieu des ruines de temples, d’amphithéâtres, de palais jadis peuplés, aujourd’hui silencieux et déserts, les reconstruit par la pensée, les remplit avec son imagination d’habitants et de bruit, et quand il a médité un moment sur ce qui n’est plus, il s’éloigne, n’emporte de ses illusions éclipsées que la tristesse et le sentiment du néant de l’homme. Je veux vous faire assister à quelque chose de semblable, mais bien autrement consolant. Voyez les ruines de l’humanité, contemplez ces sublimes débris, encore fumants des foudres vengeresses. Eh bien, ce ne sera pas l’esprit de l’homme, mais l’esprit de Dieu qui ne les relèvera pas en rêve, mais en réalité. Venez et voyez.

Jésus va quitter monde, il promet son Esprit à ses disciples: Repleti sunt omnes Spiritu Sancto. Mais qu’est-ce que cet esprit? C’est la troisième personne de la sainte Trinité. Si les cieux ont été posés par le Verbe de Dieu, c’est de son esprit qu’ils tiennent leur force: Verbo Domini caeli firmati sunt, et spiritu oris ejus omnis virtus eorum. Eh bien, c’est ce même esprit qui doit venir habiter en nous. Et que fera-t-il? Il viendra aider notre faiblesse: Spiritus adjuvat infirmitatem nostram. Rom., VIII. Il nous en fera sortir, nous apprendra ce que nous devons demander. – Et Dieu. – Ecoute. –

Aussitôt voilà l’ordre rétabli: Diligentibus Deum, omnia cooperantur in bonum. – Développement du texte.

Appuyer sur la prière. – Ensuite les applications.

L’action de Dieu dans la prédestination.

Diligentibus Deum. – Pour les hommes de profiter des événements.

Omnia possum. – Si Deus pro nobis. – Pour les obstacles au salut.

Notes et post-scriptum