- TD48.160
- SERMON SUR LE SACRIFICE (Notes incomplètes)
- Orig.ms. CU 7; T.D. 48, pp. 160-163.
- 1 CONSEQUENCES DU PECHE
1 CORRUPTION
1 DECADENCE
1 DON DE SOI A DIEU
1 GLORIFICATION DE JESUS-CHRIST
1 HUMILITE
1 IMITATION DE JESUS CHRIST
1 INCARNATION DE JESUS-CHRIST
1 JESUS-CHRIST MODELE
1 REDEMPTION
1 SACRIFICE DE JESUS CHRIST
1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
1 VERTU DE PENITENCE
1 VIE DE JESUS-CHRIST
1 VIE DE SACRIFICE
2 ADAM
2 PAUL, SAINT
3 BETHLEEM - 1836-1837
Nonne oportuit haec Christum pati, et ita intrare in gloriam suam.
Transportez-vous par la pensée, mes frères, au temps marqué par les prophètes pour la venue du Messie. Jetez les yeux sur l’état du monde et voyez où en étaient les hommes, alors que le flambeau des traditions presque éteint laissait la raison plongée dans les ténèbres les plus épaisses; alors que l’orgueil ayant rompu toute digue un égoïsme désolant avait glacé tout sentiment généreux, et poussant chaque individu à ne regarder que lui-même, à ne rapporter rien qu’à lui seul, brisait tout lien social, et soufflant à la fois des germes de révolution et de tyrannie, préparait la ruine des états par les guerres et les proscriptions; alors enfin que le désordre universel et le triomphe du mal ayant conduit les âmes les plus pures à douter de tout, le monde intellectuel était devenu pour elles une chimère et que disant à la vertu: « Tu n’es qu’un rêve », elles renonçaient à toute autre jouissance qu’à celle que donnent les sens. Voyez-les, marqués d’un sceau terrible que le doute a imprimé sur leur front, tantôt frémir de ne pouvoir le briser, tantôt se plongeant avec un désespoir douloureux dans la nuit qui se faisait sans cesse plus profonde, chercher dans les excessives inventions d’une débauche inouïe une pâture à des désirs qui les portaient, malgré eux, vers un monde meilleur et retomber du poids du découragement dans leurs chaînes immondes.
Les erreurs et les crimes s’unissant, et par un enfantement hideux produisant sans cesse des crimes nouveaux et des errreurs nouvelles, semblaient ne montrer au monde un terme à ses maux que dans une destruction, un anéantissement inévitable. Et maintenant portez vos regards fatigués sur une petite bourgade d’une nation déjà méprisée des autres peuples. Voyez dans une pauvre étable naître d’une mère inconnue un enfant exposé à toutes les rigueurs de la pauvreté et de la saison, forcé de fuir dans une terre étrangère la persécution à un âge où l’on ne sait d’ordinaire discerner le bien du mal, revenir plus tard dans sa patrie et travailler, artisan inconnu dans l’atelier de celui qu’on croyait son père. Cherchez, si vous le pouvez, à travers l’obscurité dont est entourée sa jeunesse, les privations, les fatigues, les travaux volontaires qu’il joint aux privations, aux fatigues, aux travaux de son état. Plus tard, voyez-le suivant une voie nouvelle, appeler autour de sa personne quelques pêcheurs pauvres comme lui, attirer la multitude par des prodiges et faire entendre au monde étonné des paroles bien plus prodigieuses que la résurrection des morts. Heureux les pauvres, heureux ceux qui pleurent, heureux les persécutés! Séduits par ses miracles, des disciples nombreux vont se former autour de lui; il les arrête par ces mots: « Les renards ont des tanières et les oiseaux du ciel des nids, mais le fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête ».
Pour annoncer aux nations sa doctrine, il fait choix de quelques pauvres ignorants, et, loin de leur promettre des honneurs, des richesses, il ne leur annonce que les persécutions et la mort: « Vous serez haïs de tous, à cause de mon nom ». Lui-même est l’objet de la haine la plus acharnée. Livré à ses ennemis, il est condamné à mort et subit un supplice infâme, au milieu de tous les tourments inventés par une haine implacable. Mais écoutez: trois jours se passent et voilà qu’il a vaincu le trépas et que, ressuscité, il apparaît à deux de ses disciples qui s’entretenaient de sa mort, et leur reprochant leur peu de foi: « Ne fallait-il pas, dit-il, que le Christ souffrît tout cela et entrât ainsi dans sa gloire »? Nonne oportuit haec Christum pati, et ita intrare in gloriam suam. En effet, Jésus-Christ meurt et prend par sa mort possession de l’héritage des nations que son père lui avait promis. Postula a me, et dabo tibi haereditatem gentium.
Il meurt volontairement et par son sacrifice il amène la vérité, la liberté, le bonheur, l’ordre là où régnaient le mensonge, l’esclavage, les calamités de tout genre et l’anarchie la plus effrénée. Comment un tel renouvellement s’est-il opéré? Par la vertu du sacrifice du Fils de Dieu, et c’est à ce magnifique spectacle, mes frères, que je veux vous faire assister. Par sa mort notre divin Sauveur a réparé tous les maux, fermé toutes les plaies de l’humanité; il a fait plus, il a jeté dans son sein les germes féconds d’une régénération sans terme. A la place de la terre souillée de fard et de désordres, d’un ciel obscurci par la fumée d’un encens adultère, il a créé une terre nouvelle et des cieux nouveaux.
La gloire que Jésus-Christ se propose dans sa position, c’est la manifestation de sa miséricorde et de sa justice envers l’homme qu’il vient sauver. Or si, selon la pensée de l’Apôtre, parce que Jésus-Christ s’est humilié jusqu’à la mort et jusqu’à la mort de la croix, Dieu l’a exalté et lui a donné un nom qui est au-dessus de tous les autres noms, c’est-à-dire si c’est par le sacrifice le plus rigoureux que le Sauveur a voulu entrer dans la plénitude de la gloire à laquelle nous sommes appelés, pour participer à cette gloire nous devons coopérer à la manifestation de la miséricorde et de la justice de Dieu, en suivant la voie que Jésus-Christ lui-même nous a montrée. Encore une fois, comment Jésus-Christ a-t-il opéré ces merveilles? D’abord en s’immolant pour nous, ensuite en apprenant aux hommes à immoler, de concert avec lui, toutes les parties de leur être souillé par le péché. Et c’est à cette dernière pensée que je m’attarde aujourd’hui.
Mes frères, l’homme coupable ne peut de lui-même payer la dette immense qu’il a contractée envers son auteur. Dieu dans sa bonté lui donne son Fils, et Jésus-Christ par sa mort attache à la croix la sentence de notre condamnation. Dès ce moment, l’homme réconcilié avec son auteur peut de nouveau faire valoir ses droits à l’héritage céleste. Affranchi de l’esclavage de la mort, il redevient enfant de Dieu, et voilà le premier but de l’Incarnation. Mais il en est un autre. Je veux vous faire considérer Jésus-Christ, je veux vous le montrer rendant à la nature humaine sa dignité perdue, lui apprenant à se relever elle-même, quoique avec le secours de la grâce, de l’abîme au fond duquel la révolte d’Adam l’avait plongé, et à accomplir, selon la parole si profonde de saint Paul, ce qui manque à la passion de Jésus-Christ. Car, nous ne pouvons nous le dissimuler, Jésus-Christ sur l’autel de la croix n’est pas seulement le prix de notre rachat, notre victime, il est encore notre maîte, notre modèle. Il nous y apprend que si nous ne nous faisons victimes comme lui, nous ne pouvons espérer de participer au mérite de son sang. A côté du sacrifice qu’il a offert une fois sur le Calvaire et qui se renouvelle sans cesse sur nos autels, nous devons offrir le sacrifice particulier de notre être; et plus ce sacrifice sera pur, absolu, parfait, plus nous serons semblables à Jésus-Christ et plus, par conséquent, nous mériterons de participer à cette gloire qu’il a conquise par son sacrifice et dont il parlait aux disciples d’Emmaüs, lorsqu’il leur disait: « Ne fallait-il pas que le Christ souffrît ces choses, afin d’entrer dans sa gloire »? Nonne, etc.
Jetant donc un regard sur l’homme et voyant le triple ravage que le péché lui avait fait subir en le livrant à l’ignorance, à la concupiscence et à la mot, je dis que:
1° Jésus-Christ par son Incarnation nous apprend que l’humilité est le moyen de parvenir à la possession de la vérité;
2° par l’acceptation de ses souffrances, il nous apprend que l’obéissance est le moyen de rentrer dans la liberté et dans l’ordre;
3° Enfin il nous apprend, par le sacrifice de la croix, que la pénitence est pour l’homme pécheur un principe de bonheur et de vie.
Mais vous comprenez, mes frères, que pour être traité dans toute son étendue un pareil sujet demande plus de temps que celui qu’il m’est permis de vous consacrer, et, d’un autre côté, qu’un coup d’oeil trop rapide serait à la fois incomplet et défectueux. Je m’arrêterai donc à la première considération. [Le reste manque]