- TD49.052
- Notes diverses.
- [La lecture]
- Orig.ms. CU 120, p. 1; T.D. 49, p. 52.
- 1 ENSEIGNEMENT
1 LIVRES
1 REFLEXION - 1829-1830
- Paris
Il en est des livres comme de la terre, les uns stériles, les autres pleins de fécondité. Une seule lecture emporte toute la moisson qu’on peut attendre des premiers. Mais les seconds, même lorsqu’on les a lus et relus, qu’on les a confiés à la mémoire, présentent encore des matériaux immenses à nos méditations. On ne peut les relire, sans s’apercevoir qu’on n’avait pas tout remarqué et sans se dire: Voilà une idée neuve qui m’avait échappé tout d’abord. Sans doute ces ouvrages sont très rares, mais quand on a eu le bonheur de les rencontrer, on ne saurait trop y demeurer dessus. Nocturna versate, versate diurna.
On peut les lire avec avantage plusieurs fois. Mais après qu’on s’en est bien pénétré, on peut, pour en retirer des fruits plus grands encore, recommencer des lectures en les considérant sous divers points [de vue]. Alors, la plume à la main, on peut noter ce qu’on y voit de plus remarquable. Mais parce que l’esprit ne peut souvent vaquer sur le même objet à divers travaux, pas plus que le jardinier ne peut arracher à la fois les mauvaises herbes d’une plate-bande, l’arroser et y semer des fleurs, il est impossible que l’homme, pour étudier complètement un bon ouvrage, exerce sa critique et en fasse le sujet de ses méditations tout à la fois. Autre chose est le travail de l’esprit qui, se pénétrant d’un sujet qui lui a plu, l’élabore et se plaît à en tirer des conséquences. Autre chose encore est le travail de l’esprit qui taille en quelque sorte son sujet, avant de le déclarer digne d’admiration ou de blâme, et l’on sent que la disposition de l’entendement doit nécessairement changer avec la direction qu’on lui donne, et qui ne saurait être propre à retenir à la fois tout ce qu’on voudrait lui communiquer.