- TD49.063
- Notes diverses.
- [Benjamin Constant et la religion]
- Orig.ms. CU 120, pp. 13-16; T.D. 49, pp. 63-65.
- 1 COLERE
1 DOGME
1 ESPECE HUMAINE
1 FOI
1 HOMME CREE A L'IMAGE DE DIEU
1 LOI ECCLESIASTIQUE
1 MATERIALISME
1 MESSIE
1 MIRACLES DE JESUS-CHRIST
1 POLEMIQUE
1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
1 REVELATION
1 VERITE
2 CONSTANT, BENJAMIN
2 LUTHER, MARTIN - 1829-1830
- Paris
P. 108. – Je voudrais bien que M.B.C. m’expliquât ce qu’il entend par croyances religieuses, et à la défense de quoi les preuves qu’il apporte pourront servir. Ces croyances renferment-elles des dogmes? Mais ces dogmes changent, qui les soutiendra? Sont-ce des vérités? Outre que je pense que la vraie religion ne peut présenter que des dogmes vrais, il me semble bien superflu d’en réserver la croyance aux hommes qui n’en veulent plus. Le droit d’examen détruit tout, et, d’après ce droit d’examen, Luther peut avoir des idées religieuses tout comme M.B.C.
P. 109. – Plaisant secours additionnel qui me paraît exister là, tout comme la venue du Messie qui existait à cause des prophètes. Les prédictions, les miracles, la révélation, ce n’était qu’un secours additionnel qui ne s’exerçait que conformément à la tendance du genre humain, tout comme l’article additionnel qui probablement aussi n’était voté que conformément à la tendance de la Charte.
Je désirerais fortement connaître ce qui fait croire à M.B.C. que la religion va toujours se perfectionnant, et ce qu’il aurait à répondre à l’adorateur du fétiche qui lui demanderait un dialogue entre M.B.C. et un fétiche.
Je suis le plus malheureux des hommes, j’ai forcé par mon imprudence M.B.C. à déroger à ses principes, et, martyr de la tolérance, j’en ai [fait] un intolérant tel qu’on n’en vit jamais même dans le parti prêtre. Indigné de ce que j’ai eu le malheur de le comparer à un magot et le mettre en rapport de société avec une pierre, une bûche, que sais-je? moi, avec un fétiche, il m’attaque moi, pauvre malheureux qui n’en puis mais, et si je ne me garais pas de ses coups, j’ai bien peur qu’il ne me jetât l’idole elle-même par la figure.
Monsieur B. est un peu inconséquent. Depuis près d’un demi-siècle, nous dit- il, il a toujours eu une unité constante de vues. « J’ai défendu quarante ans le même principe ». L’esprit humain a marché pourtant pendant ce temps, celui de Constant serait-il stationnaire? Et pourtant nous croirions, s’il n’affirme lui-même le contraire, qu’il doit être bien près de sa perfection, si pour sa perfection le changement était seul nécessaire.
On serait tenté de croire que M.B.C., pour expliquer le fétichisme, supposerait l’homme sorti de l’énergie de la matière, et que dans les commencements informes lui-même a prodigué des adorateurs à des divinités informes comme lui. Car ici une chose est certaine. Si l’on admet qu’il soit sorti des mains du créateur, ou l’on admettra qu’il en avait la connaissance, et alors le fétichisme n’est plus qu’une dégénération de la croyance révélée à l’homme; – il faut donc que ce perfectionnement commence par la dégénération, ce que M.B.C. d’après son système devrait bien nous expliquer, – ou il naîtra sans aucune connaissance de la divinité. Nous demandons dans ce cas à M.B.C. comment elle lui parviendra et ce qu’il répondra à l’admirable chapitre des Recherches philosophiques sur l’invention de la parole. Et quand il sera sorti vainqueur d’une lutte où bien de ses partisans ont déjà succombé, il lui restera à nous dire, supposé que l’homme puisse parler sans que Dieu lui donne la parole, il lui restera, dis-je, à nous expliquer pourquoi, quand et comment les hommes se sont formé des sentiments religieux.
P. 116. Qui vous a dit que votre perfectibilité était une loi naturelle? Ma raison ne me le dit pas.
P. 121. « Il fait pénétrer dans son âme la perfection du sacrifice ». Qu’est-ce que le sacrifice? je vous le demande un peu. Est-ce bien clair pour vous?
Quelque dégoût qu’inspire l’erreur parvenue à l’une de ses dernières périodes, quelque peine que l’on éprouve à signaler sa chute et les écueils contre lesquels elle va se meurtrir, lorsque poussée dans l’abîme, elle tombe jusqu’à ce qu’elle… [inachevé].
Analyse.
La religion change avec les époques comme le reste.
Qu’entendez-vous par religion? Sont-ce les dogmes ou la discipline? Les dogmes sont vrais ou faux; donc ils ne sauraient changer. La discipline, dès qu’elle n’est pas l’expression d’un dogme, n’est qu’un accessoire très faible même de la religion. Dans l’autre cas il faudrait changer le dogme et cela serait changer la vérité. C’est un sentiment intime, sur lequel reposent nos croyances. L’esprit de l’homme doit examiner, et en examinant il modifie, et cette modification est un perfectionnement. – Les dogmes stationnaires ne permettent pas la religion. – La religion qui veut s’opposer aux progrès de l’esprit est vaincue dans la lutte.
Il est des gens, et gens connus, qui dans une discussion ne se fâchent que parce que vous les avez pris trop à l’improviste pour leur donner le temps d’être de votre avis.