[Analyses et extraits d’ouvrages des Pères. 1837-1840]

Informations générales
  • TD49.322
  • [Analyses et extraits d'ouvrages des Pères. 1837-1840]
  • Analyse du traité *de la Trinité* de Saint Hilaire.
Informations détaillées
  • 1 ACTE DE CREATION
    1 ACTION DE DIEU
    1 APOTRES
    1 ATHEISME
    1 AUTHENTICITE BIBLIQUE
    1 BAPTEME
    1 BEAUTE DE DIEU
    1 BIEN SUPREME
    1 CONNAISSANCE
    1 DIEU LE FILS
    1 DIEU LE FILS SOURCE DE L'ESPERANCE
    1 DIEU LE PERE
    1 DIVINITE DE JESUS-CHRIST
    1 DOCTRINE CATHOLIQUE
    1 DONS DU SAINT-ESPRIT
    1 ECRITURE SAINTE
    1 ENSEIGNEMENT DE LA PATROLOGIE
    1 EPREUVES
    1 ETERNITE DE DIEU
    1 EVANGILE DE JESUS-CHRIST
    1 EVEQUE
    1 FAUSSE SCIENCE
    1 FOI
    1 FONDEMENTS DE LA THEOLOGIE
    1 GLOIRE DE DIEU
    1 GLORIFICATION DE JESUS-CHRIST
    1 HERESIE
    1 IMMORTALITE DE L'AME
    1 MIRACLES DE JESUS-CHRIST
    1 MYSTERE
    1 ORGUEIL
    1 PENSEE
    1 PERFECTIONS DE DIEU
    1 RUSE
    1 SAGESSE HUMAINE
    1 SAINT-ESPRIT
    1 SERVICE DE L'EGLISE
    1 SOUVERAINETE DIVINE
    1 SPIRITUALITE TRINITAIRE
    1 TEMOIN
    1 TRADITION
    1 TRINITE
    1 VIE HUMAINE
    1 VISION BEATIFIQUE
    1 VOLONTE DE DIEU
    2 AGAR
    2 ARIUS
    2 EBION
    2 HIERACAS
    2 HILAIRE, SAINT
    2 JACOB
    2 MOISE
    2 NESTORIUS
    2 NOE
    2 PAUL, SAINT
    2 SABELLIUS
    2 THOMAS APOTRE, SAINT
    2 VALENTIN, GNOSTIQUE
    3 GRECE
    3 SODOME
  • 1837-1840
La lettre

Livre premier.

1. – Lorsque je considère, dit saint Hilaire, ce qui peut rendre la vie agréable, je trouve deux choses: richesse et repos. L’un ne saurait aller sans l’autre, sans que l’homme souffrît. On ne jouit pas des richesses avec une vie agitée, on ne goûte pas le bonheur du repos dans la pauvreté. Mais ces deux avantages sont accordés aux animaux qui vivent dans les solitudes fertiles où ils trouvent, avec le repos, tout ce qui est nécessaire à leurs besoins.

2. – Mais lorsque je considère que la plupart des hommes méprisent cette vie animale et se croient appelés à quelque chose de plus élevé, (ce que leur apprennent les maladies, les souffrances, tout ce qu’ils ont à endurer sur la terre); d’où je conclus qu’ils sont faits pour quelque chose de plus élevé et que cette vie mortelle n’est que le chemin de l’immortalité. Car il ne serait pas digne d’un Dieu bon de troubler le sentiment de la vie par la crainte incessante de la mort.

3. – Et quoique je partageasse l’opinion de ces philosophes qui veulent [pour] purifier la conscience de toute tache, prévoir toutes les angoisses de la vie ou les supporter avec patience, cela ne me suffirait pas et j’étais entraîné par un désir ardent de connaître ce Dieu, auteur de toute bonté, au service duquel l’homme s’ennoblit et dans le sein duquel il se repose avec toutes ses misères, comme dans un port très sûr: in cujus bonitate inter tantas praesentium negotiorum calamitates tanquam tutissimo sibi portu familiarique requiescunt.

4. – Malgré tout ce qu’en avaient dit tant de philosophes, mon esprit me le présentait comme parfait, tout-puissant, éternel. (Voyez le passage entier en latin).

5. – Or, tandis que ces pensées agitaient mon esprit, je tombai sur ces paroles de Moïse, qu’il met dans la bouche de Dieu: Qui est misit me ad vos; – Ego sum qui sum, et je fus frappé de la force de ces paroles qui nous donnent l’idée la plus juste de la notion incompréhensible de Dieu. Il est l’être par essence, il est l’être absolu. Par conséquent, il n’y a en lui ni commencement ni fin. Il n’y a jamais eu un moment où il ne fut pas. Et comme en Dieu tout est essentiel, il n’y a rien en lui qui puisse cesser de participer à l’éternité.

6. – Ces paroles peuvent servir encore à comprendre son immensité, mais la magnificence de ses oeuvres nous en donne aussi une juste idée. Qui tenet coelum palma, et terram pugillo. Et ailleurs: Coelum mihi tronus est, et terra scabellum pedum meorum. Comment cela? Il contient dans la paume de sa main le ciel, qui est son trône, et la terre, son marchepied? C’est qu’il nous montre par là combien il dépasse tout ce qui est créé, et comment il le remplit en même temps. Nullus sine Deo, neque ullus non in Deo locus est. In coelis est, in inferno est, ultra maria est; inest interior, excedit exterior, ita cum habet atque habetur, neque in reliquo ipse, neque non in omnibus est.

7. – Lorsque je me le représentais ainsi infini, je cherchais à lui trouver une certaine beauté dans son immensité même et je dis: De magnitudine enim operum et pulchritudine creaturarum, consequenter generationum conditor conspicitur. Ainsi il est l’auteur de la grandeur dans les choses les plus grandes, l’auteur de la beauté dans les choses les plus belles. Jugez par là ce que doit être la sienne propre; car, quoiqu’on ne puisse exprimer [la beauté] d’un être, on peut cependant la comprendre; mais la beauté de Dieu ne peut être ni comprise ni exprimée.

8. – Plein de ces pensées, je songeais à une certaine joie que l’on ne peut avoir aucune idée de Dieu, sinon qu’on n’en peut comprendre la grandeur.

9. – Joignez à cela l’espérance d’une vie future, car comment Dieu nous aurait-il créés pour nous donner un avant-goût de l’immortalité et nous faire ensuite périr? De plus, Dieu a créé l’homme, afin que n’étant pas il fût, et non afin qu’étant il cesse d’être.

10. – Cependant mon esprit était fatigué par les craintes de son avenir et par la crainte du corps, lorsque je lus: In principio erat Verbum, etc. Par ces paroles l’âme pénètre au-delà de l’intelligence du sens naturel et apprend à connaître de Dieu bien plus qu’elle ne pensait. Creatorem enim suum ex Deo discit Verbum Deum, et apud Deum in principio esse audit, mundi lumen in mundo manens, et a mundo recognitum intelligit, venientem quoque in sua a suis non receptum, recipientes autem sub fidei suae merito in Dei filios profecisse cognoscit… Deinde Verbum caro factum, et habitasse in nobis, et gloriam confectam ejus, quae tamquam Unici a Patre sit perfecta cum gratia et veritate.

11. – Hic jam mens trepida et anxia plus spei invenit quam expectabat, ac primum ad cognitionem Dei Patris inducitur, et quod antea de creatoris sui aeternitate et infinitate et specie, naturali sensu opinabatur, hic enim proprium esse etiam unigenito Deo accipit, non in duos fidem laxans; quia ex Deo Deum audit, non ad naturae diversitatem in Deum ex Deo decedens, quia plenum gratiae et veritatis Deum ex Deo dixit, neque praeposterum ex Deo Deum sentiens, quia in principio apud Deum, Deum esse comperit. Rarissimum deinde hujus salutaris cognitionis fidem esse, sed maximum praemium noscit, quia et sui non receperunt, et recipientes in filios Dei aucti sunt, non ortu carnis, sed fidei, esse autem filios Dei non necessitatem esse sed potestatem. Or Jésus-Christ ne s’est fait homme que pour donner aux hommes le moyen de s’unir à Dieu. – Jésus-Christ vrai Dieu et vrai homme.

12. – L’esprit reçoit avec joie le mystère qui le fait communiquer avec Dieu même par la chair, qui lui donne une régénération nouvelle, et il tire de là un argument de son immutabilité, ne pouvant croire qu’il serait détruit par lui qui l’avait ainsi créé; sachant fort bien que les bornes de la raison ne sauraient s’étendre jusqu’à la sagesse de Dieu, mais croyant par la foi que Dieu était au commencement en Dieu, et que le Verbe s’était fait chair, et ne refusant pas de croire parce qu’il ne comprend pas, mais espérant de pouvoir comprendre s’il croit.

13. – L’Apôtre lui-même nous engage en de pareilles matières à ne pas nous laisser guider par des considérations humaines. (Videte ne quis, etc., Colos., II, 8), il faut que puisqu’en Jésus-Christ se trouve et la puissance d’une éternelle infinité, et l’infinité d’une éternelle puissance, nous ne nous laissions pas arrêter par le désir de soumettre de pareils mystères aux limites de la raison. Nous devons croire que Jésus-Christ est venu prendre notre nature, afin qu’étant ensevelis avec lui par le baptême, nous puissions ressusciter avec lui. Car il a pris notre chair de péché, afin d’effacer le péché de notre chair. Mais tout cela dépasse notre intelligence, car cette opération d’une éternité infinie veut une conception infinie pour être mesurée.

Coexcitamur ergo a Deo in Christo per mortem ejus. Sed dum in Christo plenitudo est divinitatis, habemus et significationem Dei Patris nos coexcitantis in mortuo, et Christum Jesum non aliud quam in divinitatis plenitudinem confitendum.

14. – Rassuré par ces considérations, mon esprit se reposait dans cette espérance et ne regardait plus la mort que comme un moyen d’arriver à l’éternité, la vie et le support de ses angoisses que [comme] le moyen d’obtenir la récompense d’une heureuse immortalité. Bien plus, ce que je croyais pour moi, le ministère de mon Sauveur me le faisait prêcher aux autres.

15. – Cependant des hommes impies se sont élevés, prétendant soumettre à leur raison la sagesse de Dieu.

16. – Les uns n’ont point voulu reconnaître Dieu le fils de Marie, [refusant], disaient-ils, de rompre l’unité divine, en sorte que l’incarnation était plus une extension qu’une procession de la divinité. Selon eux, le Père qui s’est incarné et qui parla a pris la raison du Fils. D’autres, forcés de reconnaître qu’il n’y a pas de salut sans le Christ, ont nié sa divinité et n’ont vu en lui qu’une création, parce que la nativité, selon leurs idées, de la créature séparait le fils de Dieu. Ils ont voulu qu’il fût créé, afin qu’il n’usurpât pas les prérogatives que la nativité lui eût données.

17. – Nous entreprenons donc de procéder contre ces hérétiques et de [prouver] qu’il n’y a qu’un seul Dieu, mais qu’il faut adorer Jésus-Christ qui n’est pas la même chose que son Père et qui n’est pas une créature. Nous montrerons que le Père et le Fils ne font qu’un et que cependant ils ne sont pas une seule chose.

18. – Et vous qui voulez étudier un sujet si relevé, persuadez-vous de la nécessité d’apporter un sens nouveau, acceptez avec soumission ce que vous apprendra l’Ecriture, car la meilleure disposition consiste à recevoir la vérité des paroles et non pas de les faire plier à sa propre pensée. Dans des choses aussi surnaturelles nous pouvons sans peine en croire un témoin, qui ne peut être connu que par ce qu’il dit de lui-même.

19. – Le lecteur doit être averti que si nous nous servons de comparaisons, il ne doit pas exiger une rigueur absolue: la différence est trop grande entre les choses du ciel et celles de la terre.

20. – Nous nous sommes proposé un ordre, afin de rendre l’intelligence de la matière traitée plus facile.

21. – Après l’exposé de tout l’ouvrage, nous prouvons que par cela même que l’on baptise au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, la vérité des noms doit nous faire conclure à une génération véritable.

22. – Dans le troisième livre nous poursuivons la même pensée, car tout ce qui surpasse notre intelligence, Dieu lui-même nous l’apprend lorsqu’il dit: Ego in Patre, et Pater in me.

23. – Dans le quatrième livre on expose les opinions des hérétiques et [on] prouve, par tous les passages de la Loi et des prophètes que c’est un blasphème de croire à l’unité de Dieu sans la divinité de Jésus-Christ.

24. – Dans le cinquième nous prouvons que le titre de Dieu convient personnellement et réellement à Jésus-Christ.

25. – Dans le sixième nous répondons aux reproches que nous font certains hérétiques de tomber dans l’erreur d’autres hérétiques.

26. – Le septième prouve le triomphe de l’Eglise par l’opposition des hérétiques entre eux.

27. – On s’efforce de montrer d’après l’Evangile la divinité du Verbe, selon son nom, sa naissance, sa nature et sa puissance.

28. – Huitième livre: unité de Dieu.

29. – Neuvième livre: réfutation des objections tirées de l’Ecriture.

30. – Distinction entre les natures.

31-32. – Réponse aux arguments tirés de la Passion.

33. – Livre 11. Réponse aux objections tirées des textes où Jésus-Christ semble comme nous soumis à son Père. Explication du sens dans lequel est est soumis.

34. – Après avoir fortifié la foi du lecteur par des considérations diverses, nous en viendrons directement à attaquer les Ariens. Ils prétendent que le Fils de Dieu n’est pas éternel. Sed nos evangelicis atque apostolicis semper Patrem, semper Filium praedicantes, non post aliqua Deum omnium, sed ante omnia esse docebimus, neque incidere in eum in religiosae hujus intelligentiae temeritatem, ut de non extantibus nasceretur, sitque in eo non innascibilitatis exceptio, sed nativitatis aeternitas, quia et nativitas auctorem habeat, neque careat aeternitate divinitas.

35. – Réponse à l’objection tirée des paroles: Dominus creavit me ab initio viarum suarum. Ce passage fait voir qu’il ne faut pas appliquer ce qu’on dit de la créature à ce qui est incréé, et que si la sagesse de Dieu est incréée, ce par quoi se manifeste cette sagesse peut être créé.

36. – Après avoir prouvé le dogme catholique de la divinité du Verbe, on prouve celui de la divinité du Saint-Esprit, afin de venger de tout outrage le mystère de la Trinité.

37-38. – Prière.

39. – Livre II.

40. – 1. Sans doute il suffisait à ceux qui ont la foi, pour croire la vérité, d’entendre ces paroles: Euntes, etc. Quand Jésus-Christ ordonna de baptiser au nom du Père et du Fils et du Saint Esprit, il ordonna de baptiser dans la foi d’un auteur, d’un fils unique, d’un don. Baptizare jussit in nomine Patris et Filii et Spiritus Sancti, id est in confessione et auctoris, et unigeniti, et doni. Auctor unus est omnium, unus enim Deus Pater, ex quo omnia; et unus unigenitus, Dominus noster Jesus Christus, per quem omnia; et unus Spiritus, donum in omnibus. Omnia ergo sunt suis virtutibus ac meritis ordinata: una potestas ex qua omnia; una progenies, per quam omnia; perfectae spei munus unum. Nec deesse quidquam consummationi tantae reperietur, intra quam sit in Patre et Filio et Spiritu Sancto, infinitas in aeterno, species in imagine, usus in munere.

2. Mais forcé par les blasphèmes des hérétiques, nous sommes forcé de parler de mystères, qu’il conviendrait bien mieux de laisser adorer à la pureté de notre foi.

3. On en a vu plusieurs qui pliant l’Ecriture à leur sens lui font dire ce qu’elle n’a pas dit, mais comment corrompre la vérité, comment ne pas voir que le nom du Père suppose la notion de fils? que l’on ne peut ôter au Saint-Esprit ce qui lui est attribué, que l’idée de paternité et d’affiliation suppose la communauté de nature, que le père n’est pas père s’il ne communique au fils sa substance, que le fils n’est pas fils s’il ne reçoit sa substance du père?

4. Ainsi donc, quoiqu’il ne soit pas permis de changer de pareils principes, cependant des hommes ont osé tenter de les altérer par leurs opinions particulières. Ainsi Sabellius détruisant la notion du fils n’a vu dans l’incarnation qu’une reproduction du Père. Ainsi Ebion ne faisait pas descendre le Fils du Père, mais seulement de Marie, niant que le Verbe qui était au commencement fût autre chose qu’un vain son. Ainsi des novateurs modernes, craignant de retrancher quelque chose au Père, ont nié la divinité du Fils. Ainsi d’autres hérétiques ont nié le Saint-Esprit en niant son usage et son auteur. Je ne parle pas d’une foule d’autres qui ont été plus loin encore.

5. L’impiété vient jeter des doutes sur les dogmes les plus certains. Nous savions que les hommes devaient être baptisés au nom…, – ces paroles sont claires -, mais le sens ne l’est pas. Les hérétiques prétendent les ployer à leur interprétation. Essayons donc de les expliquer, quoique ce soit avec peine que nous entreprenions une tâche pareille.

6. Pater est, ex quo omne quod est, consistit. Ipse in Christo et per Christum origo omnium. Caeterum ejus esse in sese est, non aliunde quod est sumens, sed id quod est, ex se atque in se obtinens. Infinitus, quia non ipse in aliquo, sed intra eum omnia; semper extra locum, quia non continetur; semper ante aevum, quia tempus ab eo est. Curro sensu, si quid ei putas ultimum esse, eum semper invenies: quia cum semper intendas, semper est quod intendas. Semper autem locum ejus intendere tibi est, ut ei esse sine fine est. Sermo in eo deficiet, non natura claudetur. Iterum revolve tempora, esse semper invenies; et cum calculi numerus in sermone defecerit, Deo tamen semper esse non deficit. Intelligentiam commove, et totum mente complectere, nihil tenes. Totum hoc habet reliquum, reliquum autem hoc semper in toto est. Reliquum enim, portio est; omne vero, quod totum est; Deus autem et ubique est, et totus ubicumque est. Ita regionem intelligentiae excedit, extra quem nihil est, et cui est semper ut semper sit. Haec veritas est sacramenti Dei, hoc imperspicabilis naturae nomen in Patre. Deus invisibilis, ineffabilis, infinitus; ad quem et eloquendum sermo sileat, et investigandum sensus hebetetur, et complectendum intelligentia coarctetur. Habet tamen, ut diximus, naturae suae nomen in Patre; sed pater tantum est. Non enim humano modo habet aliunde quod pater est. Ipse ingenitus, aeternus, habens in se semper ut semper sit. Soli Filio notus: quia Patrem nemo novit nisi Filius, et cui voluerit Filius revelare; neque Filium nisi Pater: illis scientia mutua est, illis vicissim cognitio perfecta. Et quia Patrem nemo novit nisi Filius, de Patre una cum revelante Filio, qui solus testis fidelis est, sentiamus.

7. Mais comment entreprendre de parler de ce qui est infini, éternel, incompréhensible? On ne peut savoir de lui qu’une chose, c’est que son essence est inénarrable.

8. Que dire du Fils? Progenies ingeniti, unus ex uno, verus a vero, vivus a vivo, perfectus a perfecto, virtutis virtus, sapientiae sapientia, gloria gloriae, imago invisibilis Dei, forma patris ingeniti. Que dire d’un tel Fils? Ce n’est point une séparation du Père, non est assumptio, il ne serait pas comme les autres fils; il procède d’un seul, il a la vie en lui.

9. A eux deux le secret de cette nativité, à eux seuls. Ne m’en demandez pas l’explication, personne ne la connaît. Que si vous me pressez, je vous demanderai comment vous êtes né, comment vous engendrez; et que si vous êtes forcé de dire qu’en vous il y a des choses incompréhensibles, comment voulez-vous qu’il n’y en ait pas en Dieu?

10. Et maintenant expliquez tous les passages de l’Ecriture Sainte, la foi seule les reçoit. Vos efforts pieux pourront être utiles, mais cependant vous n’arriverez jamais à une claire perfection.

11. Le Fils vient du Père, qui est fils parfait d’un père parfait, vertu de sa vertu, perfection de sa perfection, image invisible de Dieu. Car celui qui voit le Père voit aussi le Fils, Dieu de Dieu. Toutes ces choses nous savons que nous ne les comprenons pas, et c’est là le mérite de la foi de croire ce qu’elle comprend [= sait] ne pouvoir comprendre.

12. Je veux aller plus loin. Mais quoi! Je ne puis dire quand ce Fils a été engendré, et c’est une impiété d’ignorer qu’il l’a été. Qui consulter? Ce n’est ni la sagesse de la Grèce, ni les docteurs de la Loi.

13. Eh bien, j’interrogerai un pauvre pêcheur, et il me répondra: In principio erat Verbum. L’Ecriture disait: Au commencement Dieu fit, mais lui voit au-delà du commencement et dit: Au commencement le Verbe était. (Relire le passage très remarquable).

14. Mais ce Verbe n’est pas solitaire, car le même pêcheur continuant: Et le Verbe était en Dieu.

15. Mais, direz-vous, peut-être la parole n’est qu’un son qui passe, ce n’est point quelque chose de réel. Avant d’examiner comment le pêcheur répondra à cette objection, observons que la parole qui est un son passe; elle n’est pas avant qu’elle soit prononcée, elle n’est plus quand on a cessé de parler. Or nous lisons: le Verbe était. Donc le Verbe était quelque chose de subsistant, et de plus le Verbe était Dieu. Dieu n’est pas un vain mot.

16. Mais quoi! Le Verbe était Dieu, et cependant tous les prophètes déclarent qu’il n’y a qu’un seul Dieu. Mais les paroles du pêcheur expliquent tout. Le Verbe était au commencement en Dieu, c’est en Dieu qu’il est de toute éternité. L’unité n’est donc pas détruite.

17. Par lui tout a été fait, par conséquent tout a commencé par lui. Il était donc non seulement au commencement, mais avant le commencement de toute chose.

18. Mais le Verbe est-il seul à faire toutes choses? Non, car nous voyons [que] sans lui rien n’a été fait. Donc si rien n’a été fait sans lui, il y avait quelqu’un qui faisait avec lui.

19. Mais peut-être il n’a pas tout fait, quoiqu’il ait aidé à faire. Le pêcheur se tait sur cette question, mais saint Paul [dit]: visibilia et invisibilia, sive troni, sive dominationes, sive principatus, sive potestates, omnia per ipsum et in ipso.

20. …

21. Telle est la vie qui est la lumière des hommes, et les ténèbres ne l’ont pas comprise, et voilà l’explication de l’incompréhensibilité du mystère. Les ténèbres, c’est-à-dire ce qui est humain. On peut comprendre cela. Le pêcheur le comprenait, quand il était couché sur la poitrine du Sauveur. Demandons la même faveur et nous comprendrons.

22. Voilà la vraie doctrine, contre laquelle viennent buter les efforts de l’hérésie, mais inutilement, car la foi sur laquelle repose notre confiance est inébranlable. Elle répond à toutes les hérésies en particulier. Qu’elles s’unissent pour l’attaquer, elle les renversera toutes.

23. C’est cette autorité apostolique, dont le témoignage répond à tous les hérétiques.

24. (à relire). Dieu prend la chair de l’homme, ut homo factus ex virgine naturam in se carnis acciperet, perque hujus admixtionis societatem sanctificatum in eo universi generis humani corpus existeret. Dei igitur imago invisibilis pudorem humani exordii non recusavit, et per conceptionem, partum, vagitum, cunas, omnes naturae nostrae contumelias transcucurrit.

25 à 28. Histoire de la naissance du Christ, preuve de sa divinité. Ces passages sont à lire, mais ne sont pas susceptibles d’être analysés.

29 et 30. Il n’est pas nécessaire aussi de parler du Saint-Esprit, à cause des hérétiques qui l’attaquent et qui prétendent qu’il n’est pas. Cependant combien de fois l’Ecriture ne nous le représente-t-elle pas comme procédant du Père et du Fils? Il est vrai que le nom même qu’on lui donne le fait, aux yeux de certains, confondre tantôt avec le Père, tantôt avec le Fils. Cependant nous avons la preuve qu’il existe à part.

31. On demande alors pourquoi il est dit: Deus spiritus est. On répond que Jésus-Christ s’est servi de cette expression pour répondre à la Samaritaine et pour lui expliquer que Dieu n’était pas enfermé dans un certain espace, et que par conséquent les vrais adorateurs n’auraient plus besoin d’aller au Temple. Il fallait nécessairement qu’il dît: Dieu est esprit.

32 à 35. C’est là ce que saint Paul a aussi exprimé, lorsqu’il a dit: Là où est l’esprit de Dieu, là est la liberté. Mais aussi il a expliqué ce que c’est que l’esprit de Dieu; il l’a fait en plusieurs autres endroits. Voulons-nous comprendre ce qu’il est? Voyez la manière dont Jésus-Christ promet le Saint-Esprit à ses apôtres. Nous ne pouvons recevoir le Père ni le Fils. L’Esprit est un don que nous tenons de l’un et de l’autre, et comme sa grâce nous est nécessaire, il faut la demander sans cesse.

S. Hilaire. Traité sur la Trinité. Livre III.

1. Il paraît difficile d’expliquer cette parole de Jésus-Christ: Ego in Patre, et Pater in me. L’esprit humain ne peut comprendre comment un être peut en contenir un autre, dans lequel il est lui-même contenu. Essayons donc d’expliquer ce que signifient ces paroles.

2. Nous avons dit dans le livre précédent que Dieu ne pouvait être mesuré ni par le temps ni par l’espace. Il est éternel, infini, incompréhensible.

3. Il engendre le Fils non pas d’une manière quelconque; car tout a été fait par le Fils, non du néant, car le Fils procède de lui, non par enfantement, car il ne se partage pas, il ne perd rien. Mais en lui communiquant de toute éternité sa perfection, son infinité, sa toute-puissance, le Fils ensuite n’a revêtu la chair humaine que par sa volonté et pour se conformer à notre misère.

4. Fils parfait d’un Père parfait, il dit avec raison: Pater in me, et ego in Patre. Tout ce que le Père est, lui aussi l’est. Le Père est lumière et lui est lumière. Le Père est Dieu et lui est Dieu. Le Fils tout entier est né du Père tout entier. Ce qui est dans le Père est aussi dans le Fils. L’un vient de l’autre. Uterque unum, non duo unus, sed alius in alio, quia non aliud in utroque; Pater in Filio, quia ex eo Filius; Filius in Patre, quia non aliunde quod Filius; unigenitus in ingenito, quia ab ingenito unigenitus.

5 à 8. Mais Dieu n’a-t-il pas fait des prodiges incompréhensibles? Comprenez-vous l’eau changée en vin aux noces de Cana? Comprenez-vous la multiplication des cinq pains? Pourquoi Dieu fait-il ces choses? Pour s’attirer les applaudissements des hommes? Il n’en avait pas besoin, lui qui est sans cesse loué par les intelligences célestes. C’était pour confondre l’orgueil de ceux qui prétendent n’admettre que ce qu’ils comprennent. Que de prétendus sages ne viennent donc plus dire: Dieu le Père n’a pas engendré seul son Fils, toute génération exigeant le concours de deux êtres. Il ne peut pas rester parfait après la génération, car ce qu’il a donné au Fils, il l’a perdu pour lui. C’était de ces hommes que l’Ecriture disait: Perdam sapientiam…

9. Le Fils est venu sur la terre et a pris un corps, afin de pouvoir ramener les hommes à Dieu. Il s’est annoncé comme faisant la volonté de son Père, non pas qu’il ne fît pas la sienne propre, mais afin de montrer qu’elle était confondue avec la volonté de celui qui l’envoyait.

10. Vient le moment où Dieu glorifie son Fils. Mais comment le glorifie-t-il? Par sa mort. Alors le soleil s’arrête, les éléments sont troublés et reconnaissent que la nature ne peut contenir l’Homme-Dieu.

11. Quoi de plus? Le centurion reconnaît lui-même que celui-là était vraiment le Fils de Dieu. Mais Jésus-Christ avait dit: Clarifica (Filium) tuum, Glorifiez votre Fils. Nous sommes le Fils de Dieu, mais non pas aussi particulièrement que lui.

12. Et qu’on ne dise pas qu’il avait besoin de cette glorification et que par conséquent il est moins que son Père; car s’il dit: Glorifiez votre Fils, il ajoute: Afin que votre fils soit glorifié. Gloire mutuelle qu’ils se renvoient mutuellement pour leurs véritables rapports entre eux.

13. Mais que veut dire cette gloire? Car Dieu étant immuable ne peut ni recevoir plus de gloire, ni en recevoir moins qu’il n’en a. L’évangéliste nous l’apprend. Sicut dedisti ei potestatem omni carni, ut omne quod dedisti, ille det vitam aeternam. Haec est autem vita aeterna, ut cognoscant te solum verum Deum, et quem misisti Jesum Christum. Voilà la gloire: ce sera de se faire connaître des hommes. Et comme le Père donnera au Fils d’être connu des hommes, de même les hommes connaîtront par le Fils le Père. Ainsi le Père glorifiera le Fils, ainsi le Fils glorifiera le Père.

14 et 15. Mais qu’est-ce que cette vie éternelle? La connaissance du seul vrai Dieu et de celui qu’il a envoyé. Cette vie éternelle consiste donc dans la connaissance de Dieu et de Jésus-Christ, c’est-à-dire de celui qui envoie et qui est envoyé. Voilà tout le mystère.

16. Maintenant quelle gloire le Fils demandait-il pour lui? Il avait été envoyé par le Père. Nunc quid est hoc quod apud Patrem clarificationis exspectet? Nempe hoc quod habuit apud eum, priusquam mundus esset. Habuit plenitudinem divinitatis, atque habet, namque Dei Filius. Sed qui erat Dei filius, et hominis coeperat esse filius; erat enim Verbum caro factum. Non amiserat quod erat, sed coeperat esse quod non erat; non de suo destiterat, sed quod nostrum est, acceperat: profectum ei quod accepit, ejus claritatis expostulat unde non destitit. Ergo quia Filius Verbum, et Verbum caro factum, et Deus Verbum, et hoc in principio apud Deum, et Verbum ante constitutionem mundi Filius: Filius nunc caro factus orabat, ut hoc Patri caro inciperet esse quod Verbum; ut id, quod de tempore erat, gloriam ejus quae sine tempore est claritatis acciperet, ut in Dei virtutem et spiritus incorruptionem transformata carnis corruptio absorberetur.

17. Mais Dieu n’était-il pas déjà connu? Les prophètes ne l’avaient-ils pas annoncé? Oui, mais le fils de Dieu n’était pas assez connu, et cela était nécessaire pour avoir une pleine notion de Dieu.

18. Mais le Fils lui-même par les miracles qu’il opère, par le changement de l’eau en vin, par la multiplication des pains, veut nous prouver qu’il est des choses que l’on voit et qu’on ne comprend pas, dont l’effet est incontestable quand l’effet ne peut être saisi, et nous apprendre par là à ne pas chercher à pénétrer le mystère de sa naissance.

19. Vous me demandez comment le Fils est né de l’Esprit, je vous demande comment il a pu naître d’une Vierge. – Cet argument prouve que saint Hilaire écrivait avant Nestorius.

20. Mais enfin voulez-vous un autre exemple? Expliquez-nous comment il apparaît à ses disciples, les portes fermées, comment il se montre à Thomas. Comprenez-vous cela? Comprenez-vous la nature de son corps qui passe à travers les murs? Si vous ne comprenez pas ce qui est visible, comment comprendrez- vous ce qui est invisible?

21. Telle est notre ardeur. Nous voulons détruire la nature de Dieu, parce que nous ne la comprenons pas. Mais si nous détruisons ce qui est au-dessus de notre intelligence, ne nous faudrait-il pas détruire, puisque nous le pouvons, la nature entière?

22. Le Fils a dit: Mon Père, j’ai manifesté votre nom aux hommes. Quel nom? Le nom de père. Vous entendez le Fils qui parle, croyez donc qu’il y a un Fils. Vous entendez le Père, croyez donc aussi qu’il y a un Père. Le Fils l’appelle son Père; il ne nous le fait pas connaître comme créateur, mais comme père. Scito Patrem esse qui genuit, Filium esse qui natus est; natum ex eo Patre, qui est, veritate naturae. Memento non tibi Patrem manifestatum esse quod Deus est, sed Deum manifestatum esse quod Pater est.

23. Vous avez entendu ces paroles: Ego et Pater unum sumus. Pourquoi donc séparer le Fils du Père, ils ne sont qu’un. Unum sunt: scilicet is qui est, nihil habens quod non sit, etiam in eo a quo est. Le Fils est l’image et la substance du Père, mais image vivante, et comme tel il a tout ce qu’a le Père. Il faut qu’ici la raison humaine se taise, il faut qu’elle se garde de prétendre comprendre. Elle est souverainement imparfaite, et comme telle incapable de saisir ce qui est parfait. C’est aussi ce que l’Apôtre répète en plusieurs circonstances. Toute infidélité est folie, parce qu’on compte sur ce qui est faible pour juger ce qui est au-dessus de tout.

24-26. C’est pour cela que l’Apôtre sachant ce que peut la sagesse humaine, n’a point voulu l’appeler [ainsi]; il a voulu, au contraire, s’appuyer sur la folie, c’est-à-dire briser la raison humaine, la forcer de reconnaître son impuissance, qu’il est des choses qu’elle ne peut atteindre et qu’au-dessus d’elle il y a la parole de Dieu.

Saint Hilaire. De Trinitate. Livre IV.

1. Quoique nous croyons avoir suffisamment exposé les preuves de la tradition apostolique sur le dogme de la Trinité, nous croyons cependant devoir, pour n’avoir rien de commun avec les hérétiques, examiner quelle est la témérité de leur doctrine, leur opposition avec la foi catholique, comment ils corrompent par leur malice l’autorité des Livres Saints.

2. Insuffisance de la langue humaine à traiter les choses divines.

3. Les hérétiques prétendent que le Verbe n’est pas Dieu, que de même que nous sommes les fils de Dieu, lui l’est aussi par la volonté de Dieu, non par sa nature. Il y en a qui ajoutent que comme les autres êtres il a été créé de rien.

4. Mais ayant entendu que les anciens évêques appelaient le Fils omoousion, pour montrer l’unité de nature avec le Père, ils ont prétendu soit que le Père s’était manifesté comme Fils par l’Incarnation, soit que ce mot exprimait une nature communiquée à une seconde, soit enfin que ce mot était inexact, parce que la communication de nature comportait séparation et par conséquent imperfection.

5. Ils prétendent pour nous combattre s’appuyer sur le témoignage des apôtres et des prophètes.

6. Mais l’Eglise repousse tous leurs abominables efforts. Elle connaît un Dieu éternel, un Père éternel, un Fils sorti du Père de toute éternité, un Dieu Esprit, impassible, indivisible, toujours un.

7-8. Mais il faut repousser leur impiété et répondre aux différents textes sur lequels ils prétendent s’appuyer.

9. Ils prétendent qu’ils ne connaissent qu’un Père innascible, sans doute celui qui n’est pas né, de qui tout est sorti et qui est nascible; mais le Fils est sorti de lui.

10. Que si nous entreprenons de faire l’éloge du Fils, nous espérons que l’on ne sera pas assez injuste pour prétendre que nous voulions abaisser la gloire du Père; le Fils n’a rien en soi qu’il n’ait reçu du Père.

11. Mais il faut savoir ce qu’ils pensent du Fils. Ils croient qu’il a été créé, non d’aucune substance, ni du Père, mais qu’il est la première et la plus parfaite des créatures. Ils ont plusieurs textes qu’ils proposent à l’appui de leur opinion.

12 et 13. Exposition de la foi arienne d’après laquelle le Fils, la plus parfaite des créatures, est regardé comme créé par Dieu le Père; d’après laquelle encore il y a trois substances: le Père, le Fils et le Saint-Esprit.

14. Telle est leur erreur. Comme l’homme ne peut comprendre les choses de Dieu, comme il ne peut les expliquer de lui-même, il est obligé de s’en tenir humblement à ce que Dieu veut bien lui enseigner de lui. Mais ces paroles, il faut les entendre dans le sens que Dieu les a prononcées. Il ne faut donc pas les prendre au hasard, mais avec tout ce qui peut les faire comprendre.

15. Nous nous souvenons, disent-ils, que Dieu ordonna par Moïse de n’adorer qu’un seul Dieu. Et nous aussi, mais nous disons que le Père et le Fils ne forment qu’un seul Dieu.

16. Et voulez-vous la preuve que Moïse ne contrarie point ce dogme? Vous avez saint Paul qui dit que tout a été fait par Jésus-Christ. Or Moïse dit que Dieu créa le firmament, qu’il sépara les eaux. C’est Dieu qui fait cela. Accordez donc Moïse avec saint Paul, si Jésus-Christ n’est pas Dieu. Vous avez l’évangéliste qui dit que tout a été fait par lui, et le

Notes et post-scriptum