Conférences sur les protestants.

Informations générales
  • TD51.269
  • Conférences sur les protestants.
  • [Huitième conférence] L'Ecriture, propriété des catholiques.
  • Orig.ms. BT14, pp. 53-63; T.D. 51, pp. 268-272.
Informations détaillées
  • 1 ECRITURE SAINTE
    1 EGLISE
    1 PROTESTANTISME ADVERSAIRE
    2 CALVIN, JEAN
    2 LUTHER, MARTIN
    2 NEANDER, JOHANN-WOLFGANG
    2 PAULUS, HEINRICH
    2 SACY, LOUIS ISAAC LE MAISTRE DE
    2 SEMLER, JOHANN-SALOMON
    3 GENEVE
  • décembre 1853-février 1854
  • Cathédrale de Nîmes.
La lettre

Il ne nous suffit pas, mes frères, de prouver que les protestants n’ont pas le droit de posséder la bible, il faut prouver qu’elle nous appartient. Voici comment.

1° Elle est à eux ou à nous. Elle n’est pas à eux; donc elle est à nous.

Mais cela ne suffit pas. Il faut d’autres preuves. Pour plus d’intelligence supposons une société: elle a ses lois, mais elle a ses magistrats. Histoire de la formation des sociétés. Les lois venues après que la société s’était formée; de même pour l’Eglise.

Fondateurs, lois, magistrats pour conserver l’intégrité des lois et l’interprétation de la loi.

Si donc je viens à l’Eglise catholique, voyez que j’arrive à la connaissance de la loi de Dieu, comme un français arrive à la connaissance des lois de son pays. Les lois établissent les magistrats, les magistrats sont les gardiens de la loi.

Le pays où il y a le plus de procès est celui où les paysans lisent le plus le code.

2° La bible n’est pas tombée du ciel. Dieu s’est servi de la main des hommes pour la promulguer.

Dieu se sert de la main des hommes pour la conserver.

Ils doivent prouver leurs droits de deux manières: 1° par des preuves prises en dehors de la bible; 2° par des preuves prises dans la bible.

Hors de la bible, sans quoi il y aurait cercle vicieux; dans la bible, sans quoi il serait à craindre qu’il n’y eût contradiction.

Preuves hors de la bible.

Nous sommes une société. Une société se prouve par l’histoire. Nous sommes une société remontant jusqu’à Jésus-Christ. Société corrompue, tant qu’il vous plaira, j’accorde cela pour le moment; mais enfin le nom de prêtres, d’évêques remonte jusqu’à Jésus-Christ.

Constamment le code a été entre nos mains. Nous y avons ajouté, dites-vous; c’est ce que nous discuterons plus tard. Nous remontons jusqu’à Jésus-Christ. Vous ne pouvez le contester, c’est un fait plus clair que le soleil que dans les premiers siècles la même méthode a été employée. Voilà comment ke possède la bible par cette société fondée depuis Jésus-Christ.

Vous au contraire, ce sont des traductions faillibles, des ministres faillibles, des imprimeurs faillibles, sans rien pour surveiller.

Vous ne voudrez donc jamais dénier que l’on peut faire dire tout à une lettre morte, qu’il faut une parole vivante pour l’expliquer. Quelle hérésie ne s’est pas appuyée sur un passage de la bible?

Preuve du dedans.

Allez, enseignez, je suis avec vous. Qui vous écoute m’écoute, qui vous méprise me méprise. Vous êtes la lumière du monde. Super cathedram…

Preuve du dedans, preuve du dehors.

Si vous me demandez sur quoi je crois la bible nôtre.

1° parce que nous la possédions, quand vous n’existiez pas.

2° nous la possédons telle que nous l’avons depuis 1200 ans.

3° nous la possédions ainsi, avec ce que vous appelez les livres apocryphes. Or, voici ce que nous disons: Ou ces livres sont inspirés ou ils ne le sont pas. S’ils ne le sont pas, laissant de côté les premiers siècles, sur lesquels nous ne voulons pas insister, comment une parole menteuse a-t-elle été reçue par l’Eglise de Dieu sans contradiction pendant 1100 à 1000 ans? S’ils sont la parole de Dieu, pourquoi les avez-vous retranchés? D’autre part, si vous les avez retranchés, au nom de quel principe?

Et si vous avez eu raison de les retrancher, il y a 300 ans, pourquoi les rationalistes, en vertu du même principe, n’en retrancheront-ils pas d’autres? et si les rationalistes n’en peuvent pas retrancher, pourquoi l’avez-vous pu?

Il ne s’agit pas de savoir si les livres apocryphes le sont ou ne le sont pas, il s’agit de savoir en vertu de quel principe vous les avez retranchés et si en vertu du même principe on ne peut pas en retrancher d’autres.

Vous aurez beau faire, vous êtes ici avec deux principes inconciliables, la bible et le libre examen. Qui l’emportera? la bible? mais je la vois mutilée, la bible. Quelle bible? la bible arienne de Genève, ou la bible janséniste de Sacy, ou la bible anglaise? enfin quelle bible?

La bible. Mais avec les 12 livres que vous en retranchez, ou sans ces livres? Encore une fois quelle bible? Est-ce la bible de Néander, la bible avec le seul évangile de Saint Jean?

Ne venez pas me dire: le canon est providentiel, donc il est infaillible. Car c’est là la question. Quel canon, s’il vous plaît? est-ce pendant les cinq ou six premiers siècles, où vous accumulez à plaisir les nuages.

Est-ce du sixième au 16e siècle, où les 12 apocryphes sont admis sans contestation?

Est-ce du 16e à 1800 où l’Eglise catholique, qui doit bien compter pour quelque chose après tout, retient l’ancien canon et où Luther et Calvin ne s’entendent pas pour savoir quels livres il faut retrancher. Calvin appelant oeuvre de satan le retranchement de l’épître de saint Jacques, que les bibles protestantes anglaises ont définitivement repoussée, si je ne me trompe, depuis 1826.

Est-ce depuis 1800, où Semler et Paulus ont attaqué si fortement la bible par morceaux? Et Neander lui-même? Enfin, que reste-t-il de la bible? Et si c’est le libre examen, ne sentez-vous pas que la bible tombe comme par morceaux?

On dit le canon providentiel. Mais vous-même ne l’attaquez-vous pas? Vous mettez en doute le passage de saint Paul sur la chasteté. Et le canon est tout d’une pièce. Nous l’avons conservé, nous; vous l’avez mutilé, vous avez enlevé douze pierres, le reste de la voûte croulera.

Quelle providence que vous ayez dans vos attaques cherché à renverser le canon!

Vous l’invoquez, il ne peut plus rien pour vous!

Mais, dites-vous, la bible, les catholiques la refusent. Oui, comme un médecin à un malade! Tel aliment qui lui est utile à certains moments, lui est nuisible en d’autres.

Encore une fois, comment vous est-elle venue? et à quoi vous a-t-elle servi? Ne venez pas me dire que la vérité est un diamant taillé en facettes. Le diamant ne montre pas à la fois le blanc et le noir.

A quoi vous a-t-elle servi? Quel prix, quelle unité, quelle décadence!

Cur a vobis processit verbum Dei? cur ad vos solos pervenit?

Notes et post-scriptum