A des dames ou jeunes filles

OCT 1862 Nîmes ENFANTS de Marie
Informations générales
  • A des dames ou jeunes filles
  • Retraite aux Enfants de Marie du Prieuré de Nîmes, 1862
    Vingtième instruction. [La charité envers le prochain].
  • BZ 6, pp. 37-42 (cahier de Cécile Varin d'Ainvelle).
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DU CHRIST
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 MEDISANCE
    1 MERE DE DIEU
    1 ORGUEIL
    1 PARDON
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 VANITE
    2 BASILE, SAINT
    2 PAUL, SAINT
  • Enfants de Marie du Prieuré de Nîmes
  • ENFANTS de Marie
  • Octobre 1862
  • OCT 1862
  • Nîmes
  • Prieuré des Religieuses de l'Assomption
La lettre

Je vous parlerai dans cet entretien sur un sujet que je pourrais étendre à l’infini, sur la charité à l’égard du prochain. Je la réduis à trois points principaux: je considère une chrétienne seule pensant à son prochain, une chrétienne avec d’autres parlant du prochain, et enfin une chrétienne dans ses rapports directs avec le prochain, c’est-à-dire la charité dans les sentiments, dans les jugements et dans les rapports de société.

Examinons en premier lieu quels sont vos sentiments par rapport au prochain, et d’abord écoutons St Paul: on nous maudit et nous bénissons, on nous persécute et nous le souffrons, etc., et cependant voyez comme les apôtres étaient traités: Nous sommes regardés, dit encore St Paul, comme les balayures du monde, etc. Je vous le demande, mesdames, si vous étiez traitées comme des balayures, qui penseriez-vous de ceux qui vous traiteraient ainsi? Il faudrait penser que vous le méritez, et aimer les personnes qui vous traiteraient de la sorte, car enfin qu’êtes-vous comparées aux apôtres?… C’est difficile, c’est très dur, j’en conviens, mais si vous lisez le sermon sur la montagne, vous verrez que N.S. nous apprend que le plus grand bonheur est d’être maltraité, persécuté, etc. Et N.S. a prêché cette doctrine non seulement par ses paroles, mais par ses exemples, en se livrant à toutes les ignominies pendant sa vie et pensant sa passion, et en priant pour ses bourreaux. Entre le sermon sur la montagne et le calvaire, où donc placer cette chère dignité à laquelle nous tenons tant. Puisqu’elle n’a pas sa place, il faut donc y renoncer et imiter N.S. Ainsi, mes filles, lorsque vous avez été blessées par quelqu’un, non seulement ne vous plaignez pas, mais pardonnez du fond du coeur et priez pour ceux qui vous ont causé quelque peine. Voilà quels devraient être les sentiments d’une chrétienne à l’égard de son prochain.

Ecoutez maintenant deux personnes chrétiennes et même pieuses, parlant d’une troisième personne absente. Que de défauts ne lui trouve-t-on pas?… Comme elle est bien habillée et bien jugée!… Pourquoi s’ériger ainsi en juge de son prochain. C’est l’orgueil qui nous y pousse: en effet, en jugeant on se place au-dessus de la personne jugée, car le juge est toujours au-dessus de l’accusé. Puis on est bien aise de passer pour une personne qui sait bien juger, et les applaudissements qu’on reçoit augmentent le désir qu’on a de faire le portrait de son prochain et souvent le portrait se change en caricature. Il est agréable de s’entendre dire qu’on a de l’esprit et qu’on sait bien peindre les caractères. Il est des cas où dire la vérité est un devoir, suivant cette règle de St Basile: « Il est permis de dire du mal de son prochain lorsqu’il doit en résulter l’utilité du prochain ou une utilité plus grande. » Mais il faut prendre garde à l’intention qui fait dire la vérité.

Maintenant, dites-moi, mes chères filles, quelle charité vous mettez dans vos rapports avec le prochain. Il m’est arrivé quelquefois, quoique bien rarement, de rencontrer dans le monde des chrétiennes véritablement pénétrées de la charité de N.S.J.C., et qui au sortir de la Table sainte, cherchaient dans leurs rapports avec le prochain à faire sortir par tous leurs pores l’esprit de N.S. C’est ainsi que devraient agir toutes les chrétiennes: celles dont je parle ne disent, ni ne font rien d’extraordinaire, mais on voit qu’il y a en elles un ardent désir de faire aimer N.S. pour ainsi dire à travers elles-mêmes. Elles font ce que faisait la Ste Vierge pour les bergers et les mages qui venaient adorer son divin Fils. Parmi les bergers, il pouvait se trouver des gens fort désagréables, parmi les mages aussi; mais la Ste Vierge n’y faisait pas attention, elle présentait toujours son Fils. C’est ainsi qu’agit la chrétienne véritablement pénétrée de l’esprit de N.S. Elle accueille tout le monde avec bienveillance et à tous elle présente N.S. vivant en elle, par une charité qui ne s’arrête pas au corps mais qui va à l’âme. Si au lieu de cela je vous vois après la communion, médisantes, moqueuses, impatientes, etc., je me demanderai comment N.S. a-t-il pu se bien trouver sur ce fagot d’épines? Préparez votre âme comme une crèche, mettez-y un peu de paille, car vous n’êtes pas capable d’y mettre autre chose, et ensuite déposez-y N.S. Attendez ensuite, et s’il vient des bergers ou des mages, ne les repoussez pas, mais recevez-les comme faisait la Ste Vierge et présentez-leur N.S.

Notes et post-scriptum