Aux Religieuses de l’Assomption

17 AUG 1860 Auteuil RA
Informations générales
  • Aux Religieuses de l'Assomption
  • Retraite prêchée par le P. d'Alzon aux Religieuses de l'Assomption d'Auteuil du 17 au 23 août 1860
    Premier jour - Première instruction - Moyens de faire une retraite
  • DA 8 (notes de Sr M.-Antoinette d'Altenheim), pp. 5-14.
Informations détaillées
  • 1 ADORATION DU SAINT-SACREMENT
    1 ANNONCIATION
    1 BON EXEMPLE
    1 CHAPELET
    1 CHEMIN DE LA CROIX
    1 CONFIRMATION
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 ETUDE DES MYSTERES DE JESUS CHRIST
    1 EVANGILES
    1 GRACE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 IMITATION DE LA SAINTE VIERGE
    1 INTELLIGENCE
    1 MYSTERES DE MARIE
    1 NATIVITE
    1 PASSION DE JESUS-CHRIST
    1 PREDICATION DE RETRAITES
    1 RESURRECTION DE JESUS-CHRIST
    1 RETRAITE SPIRITUELLE
    1 SAINT-ESPRIT
    1 VIE DE RECUEILLEMENT
    1 VISITATION DE MARIE
    2 BOURDALOUE, LOUIS
    2 FRANCOIS DE SALES, SAINT
    2 PAUL, SAINT
  • Religieuses de l'Assomption
  • RA
  • 17 août 1860
  • 17 AUG 1860
  • Auteuil
La lettre

Mes chères filles,

Ce ne sera pas une retraite que je vous prêcherai, je vous donnerai les moyens de vous unir à Dieu; ma parole sera d’une simplicité extrême, je ne ferai pas naître la moindre émotion: ce sera une retraite de bon sens, de sens commun. La sainteté repose sur 2 bases: la grâce et l’esprit de l’homme; or, l’esprit de Dieu se repose mieux sur l’esprit droit. Excellence de la retraite de Bourdaloue dont vous pourrez, s’il est besoin, lire quelques méditations.

Voici 5 moyens pour bien faire la retraite: le Nouveau Testament et l’Imitation dont je vous parlerai plus tard; le St Sacrement. Vous avez certainement l’habitude de causer avec J.C.; mais pendant cette retraite, dites-lui: mon Dieu, je veux passer ces jours non seulement dans la chapelle, dans le sanctuaire, mais dans le st ciboire; mes sens seront au réfectoire, au dortoir, dans ma cellule, etc., mais mon coeur sera là le plus souvent possible, je viendrai à vos pieds, je m’épanouirai comme une fleur devant le soleil; je ne suis peut-être qu’un pauvre petit bouton, la rosée de la grâce, le soleil de votre amour le feront éclore. Une religieuse doit être l’épouse de N.S., je ne la comprends pas autrement. Mais comme la faiblesse humaine est grande, je vous donnerai 2 autres moyens: le chemin de la Croix. C’est un exercice très utile, appliqué aux différents états de l’âme. Pour gagner les indulgences qui y sont attachées, il doit être fait de suite, on ne peut pas mettre plus d’1/4 d’heure entre les différents exercices qui composent le chemin de la croix. Mais ce n’est pas précisément à gagner les indulgences que je veux que vous vous attachiez, c’est à l’esprit du chemin de la croix. Prenons la 1ère station: la condamnation à mort. Vous avez là une méditation sur le péché, sur les effets de la mort en J.C., en nous; mort spirituelle, mort mystique. Nous devons mourir un jour. Si vous passez aux chutes de N.S., N.S. est tombé selon quelques-uns jusqu’à 7 fois, 3 chutes seulement sont honorées dans le chemin de la croix. Dans les 2 cas, c’est un nombre mystérieux. Admirons la miséricorde de N.S. qui a bien voulu tomber dans la voie du calvaire pour expier nos chutes dans la voie de la perfection; il aura pitié de nous si, lorsque nous sommes tombés, nous nous relevons par sa grâce, nous nous humilions: fussions-nous tombés sur la pierre, dans la boue, en face de ses ennemis, en compagnie de sa sainte Mère. En faisant le chemin de la croix, arrêtez-vous chaque jour à 1 ou 2 de ces stations, restez-y 1/2 h., 1 heure. La conclusion que vous tirerez de ces méditations sera qu’il faut faire pénitence. Il nous a ouvert la voie. Liez connaissance avec J.C. souffrant, insulté, dépouillé, se mourant sur la croix. Alors vous pourrez dire: que personne ne vienne m’inquiéter car je porte en moi les stigmates de J.C. De caetero nemo mihi molestus sit: ego enim stigmata Domini Jesu in corpore meo porto – Galates III, 17 -.

Quel a été le but de la vie de J.C.? La passion; la passion est le noeud de la vie de J.C., de la sanctification du genre humain. Faire le chemin de la croix avec respect. Arrêtez-vous encore à cette station si délicieuse, si je puis me servir de cette expression, où N.S. rencontre Simon le Cyrénéen. Une religieuse qui prendrait la résolution d’aider N.S. à porter sa croix comme Simon (quoiqu’il le fît un peu parce qu’il y fut forcé), faire abstraction de soi, s’abandonner éperdûment à porter la croix de N.S., attiré par les parfums du Sauveur. L’âme ayant l’intelligence du mystère de la croix s’oublie tellement qu’elle ne peut plus penser qu’aux douleurs de J.C. On deviendrait ainsi une grande sainte, l’amour propre serait effacé. Voilà en quoi consiste ce travail intérieur entre N.S. et vous. Le prédicateur doit enseigner à faire la retraite, mais c’est J.C. qui la fait.

5e moyen: Chapelet. St F. de Sales passait 1 heure par jour à dire son chapelet; le chapelet et le combat spirituel furent pour lui 2 grands moyens de sanctification. Plus je deviens vieux et plus je dis mon chapelet; il y a des jours où j’en dis 4, 5, 6. Le chapelet renferme toutes les vertus d’une âme religieuse. Le 1er mystère est une magnifique entrée en retraite: l’Annonciation – Angelus Domini nuntiavit Mariae, etc. Ecce ancilla Domini. Ecoutez l’apôtre vous dire: Mes petits enfants, je suis dans les douleurs de l’enfantement jusqu’à ce que le Xt soit formé en vous; Filioli mei quos iterum parturio, donec formetur Xus in vobis – Gal. 4, 19. C’est en compagnie de la S.V. que vous devez opérer ce mystère; l’âme a pour modèle la S.V., le prédicateur, c’est l’ange. L’intervention de la cour céleste est un enseignement de la participation que nous devons avoir aux saintes choses.

Visitation – rapports de la S.V. et de Ste Elisabeth. Modèle aux jeunes religieuses, je leur fais l’honneur de les comparer à la S.V. et les plus anciennes à Ste Elisabeth. Ce mystère peut servir de modèle à tous pour les rapports avec le prochain; priez la S.V. de vous éclairer sur tous les défauts qui se sont glissés dans vos rapports les unes avec les autres. Quand vous passeriez 5 min. sur cette dizaine. La Ste Vierge sera le prédicateur: dans cette circonstance, tu as été vive, rancuneuse, tu as eu de l’antipathie, etc. Si à chaque dizaine la Ste Vierge vous fait 10 observations, croyez-vous que ce ne sera pas un bon examen de conscience?

Nativité – Ste pauvreté, splendide pauvreté dans laquelle N.S. a voulu naître; comparez la vôtre avec celle de N.S., de la Ste Vierge… je ne m’arrête pas, nous aurons probablement à en reparler. La Présentation, modèle de la consécration à Dieu. Que les novices examinent les motifs de leur entrée en religion, que les plus anciennes voient comment elles ont conservé leur consécration.

Le recouvrement de N.S. peut être considéré comme un mystère joyeux ou douloureux. Pour la Ste Vierge, ce n’était certainement pas sa faute si elle avait perdu N.S., mais N.S. ne pourrait-il pas nous dire à nous comme St Jean écrivant aux Eglises: Habeo adversum te pauca (Apocalypse, 2, 20). Ce mystère est une figure de la réconciliation de l’âme avec Dieu. Ce n’est pas la faute de N.S. s’il n’est plus avec nous; il n’est pas mort, il est absent, ce n’est qu’une distraction. Tout le travail de la retraite consistera dans la puissance de retrouver J.C. dans nos âmes. Nous examinerons les motifs par lesquels nous l’avons perdu: désobéissance, vanité, immortification, etc. Au terme de la retraite nous le retrouverons. Tel sera le commencement et la fin de la retraite. Nous sommes dans la voie de la perfection; nous ne devons pas y reculer, mais avancer. La S.V. rétrograda vers Jérusalem; il faut quelquefois faire de même, jeter un coup d’oeil rétrospectif sur notre conduite: N.S. est-il dans notre âme? Sujet très grave.

Passons aux mystères douloureux. Vous dites: Je ne puis pas entrer en retraite, je suis encore fatiguée du travail des classes, etc., etc. Si vous avez de la difficulté à prier, je vous offre N.S. comme modèle. Voyez-le dans sa prière au jardin des olives: Coepit contristari et maestus esse (Matth.) pavere et taedere (Marc). Considérez ces 4 caractères, puis étendez-vous à terre, et je vous permets d’y rester jusqu’à ce qu’une sueur de sang découle de votre corps… Et N.S. a été bien autrement ennuyé que vous ne l’êtes! Méditez ainsi les 4 autres mystères. Ne vous découragez pas; quel mal y aurait-il si vous passiez vos 8 jours de retraite comme N.S. ses 3 h.? Si à la fin vous disiez avec lui: Non mea voluntas, sed tua. Je ne vous demande pas autre chose.

Dans les mystères glorieux, j’en prends 2 seulement: la Résurrection et la Pentecôte. Le 1er est le but de notre retraite; pour cela il faut se mettre dans le tombeau; la chapelle sera votre sépulcre; il faut se dépouiller entièrement de ce qui déplaît à N.S. Ad vesperum demorabitur fletus et ad matutinum laetitia (Ps. 29); mais vous voyez la condition de la joie. Laissons tout, le suaire, même les parfums, dont les Stes femmes enveloppèrent le corps de leur Seigneur. Après la mort que possède-t-on? Le drap mortuaire dont on vous couvre, mes soeurs les professes, n’est qu’une image de la transformation du sépulcre. – Descente du St Esprit. Nous sommes des misérables, pardonnez-moi. Nous avons à notre disposition la grâce du St Esprit: Spiritus intus aliit, comme disaient les anciens, et nous n’en profitons pas! il veut nous donner notre pâture; il est force, il est lumière, il est tout ce dont nous avons besoin; il est en nous la grâce de la perfection chrétienne. Quoi de plus pour un individu! Mais il faut satisfaire les saintes exigences et les délicatesses du St Esprit, correspondre à ces touches, à ces grâces intérieures… Spiritum nolite extinguere, dit St Paul. La confirmation a fait descendre sur nos coeurs cette flamme du St Esprit… elle peut se raviver, nous montrer ce que nous sommes, ce que J.C. veut faire de nous. Passez donc cette retraite, mes filles, en priant, réfléchissant, vous mortifiant, allant avec cet esprit droit de la S.V. par lequel elle disait: Ecce ancilla Domini. Soyez avec N.S., avec l’Esprit-Saint, avec la Ste Vierge. Vous aurez de bons livres; vos confesseurs. Suivez l’attrait de Dieu: vous savez à quoi doit être employée votre vie; ne dissimulez pas. Un défaut, une habitude, paresse, orgueil, désobéissance, pensez à ce que N.S. vous demande de sacrifier pendant cette retraite. Vous le savez; quand donc le déposerez-vous sur l’autel? N.S. veut cela pendant la retraite. Commencerez-vous aujourd’hui? peut-être N.S. demandera-t-il d’autres sacrifices alors? Ayez courage.

Que votre recueillement vienne du fond du coeur, de la persuasion où vous serez que la retraite est tout ce qu’il y a de plus précieux. Pas de tension, cependant que le recueillement soit aussi extérieur, pour l’édification. Que N.S. trouve ses délices dans cette maison et qu’il s’y dédommage de tout ce qu’il souffre ailleurs; qu’il passe dans vos âmes sa demeure dans le temps et dans l’éternité. Amen.

Notes et post-scriptum