A des dames ou jeunes filles

JAN 1864 Alès Dames Miséricorde
Informations générales
  • A des dames ou jeunes filles
  • Retraite commencée le 18 janvier 1864
    Neuvième instruction [L'appel à la perfection]
  • BZ 6, pp. 81-87 (notes de Cécile Varin).
Informations détaillées
  • 1 CIEL
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 EPREUVES SPIRITUELLES
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 IMITATION DE DIEU
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MORT
    1 PERSEVERANCE
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 SAINTETE
    1 SAINTS DESIRS
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SOUMISSION DE L'ESPRIT
    2 ABRAHAM
    2 MARIE-MADELEINE DE PAZZI, SAINTE
    2 THERESE, SAINTE
    2 VARIN d'AINVELLE, CECILE
  • Dames de la Miséricorde d'Alès
  • Dames Miséricorde
  • Du 18 au 24 janvier 1864
  • JAN 1864
  • Alès
La lettre

Soyez saints parce que je suis saint.

Ces paroles adressées à Abraham par le Seigneur nous sont aussi adressées, mesdames, par N.S.J.C. lorsqu’il dit: Soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait. Ces paroles qui impliquent non une égalité, mais une similitude de perfection avec Dieu lui-même, je viens ce soir vous les expliquer et vous dire que toutes vous êtes appelées à la perfection, chacune selon l’état où Dieu vous a placées. Je vous dirai d’abord quelques-uns des caractères de la perfection, ensuite les motifs qui doivent nous y porter, et vous verrez, mesdames, que je n’exagère pas en disant que la perfection est pour tout le monde, car chacun dans sa position peut en accomplir les devoirs parfaitement.

Examinons en premier lieu les exigences de la perfection. Dans le long et pénible travail qui occupe toute vie humaine, il y a cette différence entre le sillon tracé par une main toute charnelle et le sillon que trace la main dirigée par des vues surnaturelles, que le premier va et vient sans cesse sur le même terrain, tandis que le second ne se termine qu’à l’éternité. Voilà le travail de la perfection avec ses exigences; lorsqu’on a mis la main à la charrue, il ne faut plus regarder en arrière, mais aller, aller toujours devant soi sans jamais s’arrêter, car le terme de toute âme c’est Dieu. Oh! oui, mesdames, Dieu exige beaucoup d’une âme qui se donne à lui, il faut qu’elle marche malgré les obstacles, malgré les pierres et les épines, malgré toutes les douleurs qui se rencontrent sur ce chemin aride et raboteux.

La perfection a des délicatesses que le coeur des femmes devrait comprendre, elles qui ont tant de tact pour deviner ces mille nuances de l’affection qui nous paraissent presqu’insaisissables. Sachez donc, mesdames, répondre aux délicates avances de votre Dieu, voyez combien il vous a aimées et comment il ne s’est pas laissé décourager par toutes vos chutes, par vos désertions et par ces fautes sans nombre qui affligent tant N.S.J.C. A votre tour soyez donc délicates avec N.S., mettez tous vos soins à enlever de votre coeur tout ce qui pourrait offenser ses yeux, et soyez persuadées que jamais vous ne pourrez assez faire pour répondre à l’amour de N.S.

Enfin une troisième condition de la perfection, c’est la persévérance de l’effort. Après une retraite on est saisi d’un beau zèle et il semble que rien ne coûtera pour devenir des saints. Mais il faut que cela dure, et sachez bien, mesdames, qu’il n’est pas facile d’avancer dans le chemin de la perfection. Il faut, lorsqu’on est engagé dans ce chemin, persévérer à travers toutes les difficultés, toujours lutter, toujours combattre, et si Dieu dans sa miséricorde ne nous cachait tous les sacrifices de cette longue route, il y aurait bien de quoi effrayer. Mais Dieu a mis sur ce chemin comme une série de voiles qu’il ne soulève qu’à mesure que l’âme avance, et lorsqu’elle se retourne, elle est quelquefois étonnée d’être si loin de son point de départ.

Courage donc, mesdames; pensez d’ailleurs que Dieu a le droit d’exiger de vous la perfection; s’il vous assure sa grâce à certaines conditions, qui êtes-vous pour la refuser? Qui êtes-vous pour lui dire: je n’irai que jusque-là, tandis qu’il veut que vous alliez plus loin?… Dieu est le maître de toutes choses, il peut donc exiger de vous tout ce qu’il voudra, et vous n’avez le droit de rien refuser. A quoi songez-vous d’ailleurs lorsque vous refusez de vous rendre semblables au divin modèle qui vous est proposé? N.S.J.C. s’est fait homme afin qu’en lui vous ayez un parfait modèle. C’est donc à sa suite que vous marcherez. Les saints étaient des créatures comme vous, mais la grâce trouvant leur coeur vide des choses de la terre s’y écoulait avec abondance, et alors leurs âmes marchaient à grands pas à la suite de J.C. dans les désolations, dans les souffrances, dans les humiliations. Alors Ste Thérèse disait: Ou souffrir ou mourir, car pour moi, ô mon Dieu, la souffrance me donne l’occasion de vous prouver mon amour, et si dans cet exil, pendant que je suis séparée de vous, je ne puis consumer mon âme dans la souffrance, oh! alors, mon Dieu, faites-moi mourir afin que j’aille jouir de votre présence! Ste Madeleine de Pazzi disait: Toujours souffrir et jamais mourir, car la souffrance m’est une douceur ineffable; en souffrant je vous prouve mon amour, tandis que dans le ciel je jouirai de vous et, la souffrance étant finie, mon âme ne pourra plus rien pour vous. Une autre sainte, poussant encore plus loin les saintes folies de l’amour divin, s’écriait: Ni souffrir, ni mourir, car l’un et l’autre sont trop doux! Ici, mesdames, arrêtons-nous car nous ne saurions comprendre ces ravissements des saints. Voyez seulement jusqu’où peut aller une âme qui se laisse dépouiller par Dieu de toutes ses imperfections, et remplir chaque jour davantage de cette grâce qui l’unira à Dieu dès cette vie et la conduira ensuite dans les splendeurs des cieux où l’âme sera d’autant plus glorieuse que sur la terre elle aura été plus sanctifiée.

Notes et post-scriptum