Aux Religieuses de l’Assomption

AUG 1861 Auteuil RA
Informations générales
  • Aux Religieuses de l'Assomption
  • Retraite aux Religieuses de l'Assomption d'Auteuil en août 1861
    Dixième instruction - Travail et progrès dans la perfection
  • Cahiers d'Alzon, XI, pp. 142-157.
  • CZ 94, pp. 43-47 (Cop. dactyl. des notes de Soeur M.-Antoinette d'Altenheim).
Informations détaillées
  • 1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
    1 ADOLESCENCE DE JESUS-CHRIST
    1 AME EPOUSE DE JESUS CHRIST
    1 AUGUSTIN
    1 BAVARDAGES
    1 BERGER
    1 CELLULE
    1 CHATIMENT
    1 CIEL
    1 CONSEQUENCES DU PECHE
    1 CONVERSION SPIRITUELLE
    1 CREATION
    1 CROIX DE JESUS-CHRIST
    1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 DONS DU SAINT-ESPRIT
    1 EFFORT
    1 EMPLOI DU TEMPS
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 EXAMEN DE CONSCIENCE
    1 FATIGUE
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 FILS DU CHARPENTIER
    1 FORMATION A LA VIE RELIGIEUSE
    1 FORMATION DE JESUS CHRIST DANS L'AME
    1 GRACE
    1 GRACES
    1 HUMANITE DE JESUS-CHRIST
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 JESUS-CHRIST AUTEUR DE LA FOI
    1 JESUS-CHRIST AUTEUR DE LA GRACE
    1 JUIFS
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 PARESSE
    1 PARLOIR
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PURETE D'INTENTION
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 RECREATIONS DES RELIGIEUX
    1 REFORME DE L'INTELLIGENCE
    1 REFORME DU COEUR
    1 RESISTANCE A LA GRACE
    1 SAGESSE DE DIEU
    1 SAINT-ESPRIT
    1 SOEURS CONVERSES
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SPIRITUALITE TRINITAIRE
    1 TEMPLE DU SAINT-ESPRIT
    1 TRAVAIL MANUEL
    1 VIE CACHEE DE JESUS-CHRIST
    1 VIE DE SACRIFICE
    1 VOIE UNITIVE
    2 ALTENHEIM, MARIE-ANTOINETTE D'
    2 CATHERINE DE SIENNE, SAINTE
    2 DAVID, BIBLE
    2 JACOB
    2 JEROME, SAINT
    2 PAUL, SAINT
    2 ROSE DE LIMA, SAINTE
    2 THERESE, SAINTE
    3 NAZARETH
  • Religieuses de l'Assomption
  • RA
  • Du 17 au 23 août 1861
  • AUG 1861
  • Auteuil
La lettre

« Jésus grandissait an sagesse, en âge et en grâce(1). »

Je voudrais grouper, tout en commentant ces paroles, ce qui reste à dire de la vie de Notre-Seigneur à Nazareth: la vie cachée étant particulièrement la vie d’une religieuse. Premièrement, nous savons que Jésus-Christ travaillait, puisque les docteurs en le voyant étaler une science divine, disaient: « D’où lui viennent cette sagesse et ces miracles. N’est-ce pas le fils du charpentier?… d’où lui vient donc tout cela(2)? »

Notre divin Sauveur avait donc travaillé; et il manifestait progressivement sa sagesse et la grâce surnaturelle dont il est l’auteur et le consommateur et l’esprit de Dieu était avec lui. – Quelle conclusion tirerons-nous de là? 1° La nécessité du travail, sa sanctification; 2° Nécessité du progrès.

I. Sanctification du travail.

Travail de Notre-Seigneur à Nazareth.

Il est nécessaire que nous travaillions, vous êtes toutes persuadées de cela; nous avons tous été condamnés à la sueur dans le travail. Notre-Seigneur a sanctifié cette peine. En travaillant, nous satisfaisons pour nos péchés et nous ajoutons un remède à cette condamnation, à cette expiation. Il importe de vous faire remarquer trois espèces de travaux qui se faisaient en Notre-Seigneur. Qui dit progrès, dit effort et travail. Nous trouvons un enseignement d’effort chez Notre-Seigneur et le résultat était le progrès.

Travail manuel ou matériel, travail intellectuel et travail que j’appellerai spirituel.

Place du mot âge entre sagesse et grâce.

Notre-Seigneur accomplissait le travail manuel, il durcissait ses mains dans le travail; c’est déjà quelque chose. C’est beaucoup plus lorsque rentrant en nous-mêmes, nous nous demandons: est-ce que je travaille comme Notre-Seigneur dans les mêmes dispositions, dans le même but?

J’ai cherché pendant longtemps pourquoi dans ce texte de l’Evangile, « l’enfant croissait en sagesse, en âge et en grâce »… pourquoi le mot âge se trouvait placé entre les mots sagesse et grâce. S’il ne s’agissait que d’une considération spéculative, je ne vous en fatiguerais pas; mais toute parole de l’Evangile étant écrite pour notre instruction, il nous est bon d’en tirer tout l’enseignement possible. Et voici, si je ne me trompe, le motif de cette place que le mot âge occupe.

L’âge, résumé du temps, nous est donné pour développer en nous l’expérience et la grâce.

Etablissons que Notre-Seigneur n’avait pas d’efforts à faire; à proprement parler, il n’y avait pas de travail chez Jésus-Christ; tout ceci était une manifestation utile pour nous. Il a voulu prendre la fatigue du travail comme il a voulu prendre la douleur de la croix. En tant que Verbe, parfait et innocent, il pouvait avoir une occupation: nous voyons qu’il répond aux reproches que lui faisaient les Juifs à propos des guérisons: « Mon Père travaille toujours(3). »

Ce n’est pas là la question. La question est que Notre-Seigneur a voulu montrer dans les développements qu’ont pris sa sainte enfance, sa sainte jeunesse, une manifestation d’efforts. Il nous a appris par ce texte que l’âge ou la durée ne nous appartient pas; que c’est un moyen, un instrument qui nous est donné, pour qu’unissant la sagesse et la grâce, nous arrivions à la perfection. Saint Augustin dit que la sagesse peut avoir tous les sens que le Saint-Esprit veut lui donner… Ici le mot sagesse séparé de grâce par le mot âge s’applique à ce qu’il y avait de naturel dans la sainte humanité: Notre-Seigneur unissait la manifestation de l’expérience acquise à la grâce dont il était comblé, tout cela perfectionné par le Saint-Esprit, si perfectionnement il pouvait y avoir. Notre divin Sauveur veut qu’on lui applique des expressions humaines pour notre instruction. L’expérience vient avec l’âge à condition que l’on profite de l’âge. L’âge est le résumé du temps, donc il faut profiter du temps.

La bonne intention et l’emploi du temps.

Une question se présente tout naturellement: comment employez-vous votre temps? Vous l’employez de différentes façons: les Soeurs converses en se livrant au travail manuel. Eh! mes Soeurs, il y a des gens qui travaillent plus que vous et qui seront damnés, après avoir travaillé vingt heures par jour. J’ai à la campagne des gens qui travaillent plus que vous, les moissonneurs; ils se lèvent à 3 heures du matin et travaillent jusqu’à 9 heures du soir… cependant, peut-être, qu’ils n’ont pas grand mérite. Il faut quelque chose de plus que le travail: l’intention. Il n’est pas difficile d’avoir une bonne intention avec le travail manuel; une personne qui s’épuise sur une étude spirituelle est moins maîtresse de son intention. Que dans le travail manuel, il faille la renouveler souvent… cela se peut, il y a des travaux matériels qui demandent de l’attention; mais, généralement parlant, il est plus facile de diriger son intention quand on est occupé à un travail manuel.

L’emploi surnaturel du temps dans tous les travaux.

Comment employez-vous votre temps? Je le répète, car enfin, se fatiguer, prendre de la peine, beaucoup de peine et ne pas amasser de trésors est bien triste… Rentrez en vous-mêmes… Le temps que vous avez employé dans un travail matériel vous rendait semblables à l’Enfant-Jésus. Il employait son temps comme une Soeur converse ou comme une Soeur de choeur occupée à des travaux manuels. Si vous voulez être son épouse comme il est votre Epoux, employez votre temps comme il a employé le sien.

Quelle direction donnerez-vous à vos études? Ce sur quoi j’insiste, c’est sur l’emploi surnaturel de votre temps. Pour grandir en sagesse, il faut l’expérience, élément humain lequel s’unissant à la grâce, élément surnaturel, vous rend capables de devenir tous les jours des saintes.

La perte du temps vient du manque d’intention surnaturelle.

Au bon emploi du temps, est contraire: la perte du temps qui s’accomplit lorsqu’on se dissipe au milieu des occupations. Si vous veniez à mourir, pourrait-on dire que vous mourez « pleine de jours(4) », comme on le disait des anciens patriarches? Ils ne faisaient pas grand chose. Si vous avez été à la campagne, vous connaissez la vie des bergers… sauf de temps en temps, quelque occupation pressante: il pleut, il faut rentrer les troupeaux… une autre fois, transporter le fumier, renouveler le fourrage… les patriarches n’avaient pas de bergers, les troupeaux paissaient dans les champs; la fatigue des bergers consiste dans les veilles continuelles; dans ce temps-là, s’il n’y avait pas de loups, il y avait des lions, des tigres, des ours, nous en voyons la preuve dans l’histoire de Jacob et de David… Les patriarches ne faisaient pas grand chose et cependant leur vie était pleine de jours, parce que leurs intentions étaient sans cesse dirigée vers Dieu. Ils pensaient à Dieu en travaillant.

Chez vous, il n’y a pas excès de perte de temps; mais, soit dans les travaux manuels ou dans les travaux intellectuels, votre temps n’est pas toujours employé parce que votre intention n’est pas dirigée vers Dieu, votre esprit n’est pas tourné du côté de Notre-Seigneur. Comment acquerrez-vous cette sagesse expérimentale, si vous ne travaillez pas à lutter contre vous-même?

Les petits moments perdus.

Autre question: j’ai été dans tant de couvents que, sans parler de l’Assomption et de celui aux membres duquel j’ai l’honneur de parler dans ce moment-ci, la question de l’emploi du temps est une question grave pour les religieuses. Elles vaquent à la prière, elles ont leurs occupations, mais toutes les figures inoccupées que je rencontre dans certains corridors… ces figures amaigries, l’oeil au guet… qui est-ce qui sonne? Ma Soeur une telle a eu mal à la tête, mal à l’estomac… La petite séduction de la perte du temps, vous ne la connaissez pas? Il y a une sainte et pieuse flânerie, surtout quand on a été horriblement occupé pendant quelque temps… Je suis convaincu qu’ici le travail est bien distribué, les emplois bien remplis… mais il y a certains couvents: « Ma Soeur, qu’est-ce que vous faites? M. l’Aumônier vient d’arriver; avez-vous eu soin de porter la tasse de chocolat à M. l’Aumônier? » Ce n’est pas ici que cela se passe, mais il y a différentes manières de perdre son temps. Ma Mère, Monsieur un tel, Madame une telle est avec sa fille au parloir, voulez-vous permettre que j’aille lui tenir compagnie? – Non, j’en enverrai une autre, tenez-vous tranquille. – Mais, ma Mère, c’est que je voudrais savoir de Madame une telle si les choses se sont passées ainsi?… Si ce n’est pas cela, ce sont des détails approchants de perte de temps. Je sais bien qu’il y a certaines occupations de passe-temps accordées à la charité envers les malades et je ne les blâme pas… Vous n’entrez jamais dans les cellules les unes des autres; vous ne prolongez jamais la récréation au-delà du temps fixé; vous ne la devancez jamais non plus… Le travail de Notre-Seigneur avait un cachet particulier: l’absence de la perte de temps. Notre-Seigneur croissait en âge, mais si l’âge pour lui se fût composé de moments perdus, comment aurait-on pu dire qu’il croissait en âge?… Prenez l’ensemble de votre vie: votre temps a-t-il toujours été utilement employé?… avez-vous grandi en âge comme l’Enfant-Jésus?… Je vous fais mes excuses… je ne m’arrête pas sur la question de la paresse, il me répugne tellement de vous supposer paresseuses…

II. Nécessité du progrès en perfection.

« La grâce de Dieu était sur lui. »

Les âges de la vie religieuse et la croissance en grâce.

Ces paroles renferment un grand mystère. Jésus-Christ, auteur et consommateur de la foi, par conséquent de cette grâce fondamentale, était « plein de grâce ». Il développe en lui cette grâce pour notre instruction. En lui, elle était tout entière dès le premier instant de sa conception, mais elle n’est pas tout entière chez nous. Nous en recevons le germe dans le baptême, puis il y a progrès par l’accroissement de la raison et par certaines grâces qui nous sont accordées. Vous n’avez peut-être pas eu besoin de conversion, peut-être en avez-vous eu besoin. Depuis que vous êtes entrées dans cette maison, il y a eu une crise solennelle chez toutes, un progrès opéré. Il y a comme l’enfance, c’est le postulat, suit la jeunesse du noviciat, puis vient l’âge mûr de la profession. Vous êtes-vous seulement aperçues que vous avez passé d’un état dans un autre?… de l’état d’enfance à un état plus raisonnable? Je suppose que vous vous en êtes aperçues. Il y a un double travail, selon l’âge. Le Saint-Esprit opère quelquefois tout d’un coup comme pour saint Paul; mais, en général, la perfection demande un certain progrès d’âge, votre sagesse personnelle, sapientia, et puis la grâce de Dieu.

Pour que vous soyez saintes, la grâce est l’élément nécessaire: sur cent parties dont se compose la perfection, notre sagesse n’entre que pour une partie, cependant notre concours est requis.

L’effort est nécessaire pour arriver à la plénitude de l’âge du Christ.

Faisons-nous une question: depuis que je suis au couvent, selon l’âge que j’ai, quel progrès ai-je fait? en sagesse, en grâce? De quelle façon le Saint-Esprit est-il dans mon âme? Ici, le progrès implique un travail spirituel ou des efforts. Je vous prie de remarquer ces différents éléments: votre sagesse, le temps, la grâce, qui sont mis à votre disposition. Ils ont dû être manipulés par le travail, par l’effort. Votre perfection se compose d’un résultat de votre volonté et de la grâce, il n’y a rien cependant sans effort. Où en est votre progrès dans la sainteté? Quels sont les dons naturels que Dieu vous a refusés et que vous voudriez avoir et dont l’absence au lieu des sentiments d’humilité qu’elle aurait dû vous inspirer a produit le dépit, le désespoir?

Nous ne faisons pas attention à la perte du temps et le temps étant le prix de l’éternité, par cela même nous perdons le prix de l’éternité. La grâce était à votre disposition, vous deviez grandir avec elle… La grâce est à votre âme ce qu’est la rosée ou ce qu’est une pluie fédonde à la terre desséchée, qu’en avez-vous fait? comment avez-vous correspondu à la grâce? dans quelle mesure avez-vous laissé agir le Saint-Esprit? Quels efforts avez-vous faits pour accepter le sacrifice? Sans doute, vous avez besoin d’être aidées par la grâce, mais le concours de votre volonté est nécessaire. De cela se compose votre perfection… Voulez-vous rester une nabotte toute votre vie? voulez-vous toujours demeurer à l’état d’embryon? ne voulez-vous pas arriver à la plénitude de l’âge du Christ comme dit saint Paul: « Jusqu’à ce que nous soyons tous parvenus… à l’état d’homme fait, à la mesure de la stature parfaite du Christ(5). »

Le temps de la grâce d’union mystique.

Votre âme est comparée par les prophètes… à une jeune fille qui grandit jusqu’à ce qu’elle soit en âge d’épouser celui auquel elle est destinée. Vous êtes les épouses de Jésus-Christ, vous, mes Soeurs professes, voyez combien de temps Notre-Seigneur a attendu pour certaines saintes, pour se révéler à elles… à sainte Thérèse pour lui donner un anneau… à sainte Rose de Lima pour lui dire qu’elle était son épouse: « Tu es l’épouse de mon coeur »… il y a certaines époques pour sainte Catherine de Sienne auxquelles Notre-Seigneur s’est manifesté à elle d’une manière plus particulière… il y a des gages donnés au bout d’un certain temps. Notre-Seigneur leur dit: Tu m’appartiens, tu es mon épouse… et cependant, elles l’étaient déjà, car elles avaient fait des voeux… Il y a un moment dans le progrès où la plénitude de l’âge étant arrivé, Notre-Seigneur déchire les voiles…

Notre-Seigneur place ce mot d’âge entre le mot sagesse et le mot grâce et nous indique par là l’utilité de l’emploi du temps. Si vous voulez arriver à l’intimité d’épouse, il est nécessaire que vous fassiez des efforts pour unir cette sagesse, cette intelligence à l’emploi du temps, à la correspondance à la grâce, alors le Saint-Esprit viendra consommer cette union. Notre-Seigneur, dans l’état le plus humble, a montré ce développement de l’union avec Dieu pour nous apprendre que ce ne sont pas les vies extérieures, les grandes actions qu’il aime. Ce n’est pas là ce qui plaît à Dieu, c’est dans l’état le plus humble, le plus commun, le plus vil que Notre-Seigneur se complaît à faire triompher la sagesse, l’âge et la grâce.

Regrets du temps perdu.

Concluez donc à la nécessité de l’effort pour la perfection. Quels regrets ne devrions-nous pas éprouver!… nous laissons les années s’écouler… Sentez-vous toute la tristesse de ces pensées: J’aurais pu être une sainte à 32, 33 ans comme sainte Catherine de Sienne et tant d’autres! Laissons les visions, ce n’est pas ce que je vous prêche; mais prenons la perfection des vertus de sainte Catherine, pourquoi sainte Catherine est-elle arrivée à ce degré de sainteté? Sans doute, elle a reçu des grâces toutes particulières; mais qui peut vous dire les grâces que vous recevrez quand il vous plaira de recevoir la grâce tout entière?…

Le rôle du Saint-Esprit dans la formation du Christ dans nos âmes.

Un tout petit mot sur ce que le Saint-Esprit faisait là au milieu du travail, des occupations, de la solitude de Nazareth? La sainte humanité de Notre-Seigneur était un vase très pur où reposait la troisième personne de la Trinité. Le Verbe, la deuxième personne, était unie hypostatiquement à la sainte humanité. Ce qui paraissait au monde dans cette sainte humanité, le corps et l’âme, était un vase très pur pour le Saint-Esprit: « L’Esprit de Dieu était en lui. » Ma chère fille, je fais une comparaison: lorsque Dieu créa le monde, l’esprit de Dieu était porté sur les eaux: « L’Esprit de Dieu planait sur les eaux(6) », préparant les germes de toutes les créatures; selon saint Jérôme, il semblait couver les eaux, c’est l’expression de plusieurs Pères.

Lorsque va commencer la vie de Notre-Seigneur, nous voyons le Saint-Esprit dans son humanité sainte être en quelque sorte le principe de toute sainteté: « L’Esprit de Dieu était en Lui. » Si vous avez été confirmée, vous avez le Saint-Esprit en vous, et il est vrai de dire: « L’Esprit de Dieu est en elle », en cette religieuse confirmée. Les merveilles que le Saint-Esprit accomplit dans la création sont une image imparfaite de ce qu’il accomplit dans la sainte humanité du Sauveur et par elle, dans l’Eglise où tous les germes de sainteté ont été déposés. En vous, qui êtes un petit monde, si vous vous laissez aller à cette inhabitation du Saint-Esprit, dont parle saint Paul, il déposera le principe, le germe de toutes les vertus: demandez et il vous sera accordé… toutes les vertus seront fécondées dans votre coeur. Est-ce possible que l’esprit de Dieu soit en nous? Est-ce possible que l’enseignement de la foi nous conduise là? Est-ce possible que nous n’en profitions pas pour devenir des saintes? Il faut nous abandonner à cette action divine, à ce divin ouvrier, le laisser couper, tailler, retrancher pour qu’il puisse réaliser en nous l’image de Jésus-Christ. Cela ne se fera pas dans un jour, mais dans l’âge. Si cela doit se faire dans le temps ne le perdons pas; rendons-nous compte du prix du temps, du prix de l’emploi du temps, des facultés naturelles, de leur union avec la grâce; et puis, faisons effort. Il faut des efforts et de très grands efforts, notre nature n’étant pas innocente comme celle de Notre-Seigneur, étant corrompue par le péché et portant en elle les conséquences du péché.

Si la grâce nous fait voir ce que nous recevrions de dons surnaturels par l’opération du Saint-Esprit, quels travaux n’entreprendrions-nous pas? à quels efforts ne nous livrerions-nous pas pour donner la matière nécessaire à Notre-Seigneur… pour qu’il fasse croître les vertus en nous… Examinons en quoi nous imitons le travail de Jésus-Christ, son travail manuel, humble… si dans les travaux intellectuels nous dirigeons notre intention comme Notre-Seigneur dirigeait la sienne…

Examen.

Comment employez-vous votre temps? Comment sanctifiez-vous vos facultés naturelles?

Comment les développez-vous pour la gloire de Dieu? Comment correspondez-vous à la grâce? Dans quelle mesure laissez-vous le Saint-Esprit libre de faire croître les vertus en vous? Comment correspondez-vous à cet amour? Si le Saint-Esprit est en vous comme il était en Jésus, n’est-il pas vrai que Jésus y est aussi? donc, c’est Notre-Seigneur que vous devez faire grandir en vous. Or, quel est le développement de Notre-Seigneur dans votre âme?

Les sentiments humains, je ne dis pas mauvais, que vous avez, laissez-les transformer par Jésus-Christ.

Vous, mes Soeurs, qui menez plus particulièrement une vie cachée, vous avez la part de Notre-Seigneur. Il faut que vous croissiez avec Jésus-Christ et que vous le laissiez agir afin que vous soyez le temple de l’Esprit de Dieu vivant en vous, vous purifiant ici-bas, en attendant qu’il soit votre bonheur dans l’éternité. Ainsi soit-il.

Notes et post-scriptum
1. Luc, II, 50.
2. Matth., XIII, 51.
3. Joan., V, 17.
4. Gen., XXV, 8.
5. Eph., IV, 13.
6. Gen., I, 2.