Aux Adoratrices

8 JUN 1863 Nîmes ADORATRICES
Informations générales
  • Aux Adoratrices
  • [L'immolation]
  • CC 4, pp. 18-23 (carnet d'Isabelle de Mérignargues).
Informations détaillées
  • 1 DESIR DE LA PERFECTION
    1 DESSEIN DE SALUT DE DIEU
    1 DON DE SOI A DIEU
    1 EGOISME
    1 FRANCHISE
    1 GENEROSITE
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 MORT DE L'AME
    1 MORTIFICATION CORPORELLE
    1 PORTEMENT DE LA CROIX PAR LE CHRETIEN
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PROVIDENCE
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 REFORME DU COEUR
    1 RESISTANCE A LA GRACE
    1 SACRIFICE DE LA CROIX
    1 SAINT-SACREMENT
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 UNION A JESUS-CHRIST
    1 VIE DE SACRIFICE
    2 MERIGNARGUES, ISABELLE DE
  • Adoratrices du Saint-Sacrement
  • ADORATRICES
  • 8 juin 1863
  • 8 JUN 1863
  • Nîmes
La lettre

8 juin. Fête du Saint-Sacrement(1).

Aucune fête n’est plus particulièrement la fête d’une adoratrice et n’est plus féconde pour elle en enseignements que la fête du Saint-Sacrement.

C’est par excellence la fête de l’immolation de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Sur la croix il dit à Dieu le Père « me voilà! » et tout fut fait. Mais son sacrifice quelque complet et absolu qu’il fût ne suffisait pas à son amour; il y a ajouté l’immolation sans cesse renouvelée de l’Eucharistie à l’aide de laquelle il perpétue le sacrifice de la croix.

En s’immolant ainsi sans cesse par amour pour nous Jésus-Christ a voulu nous apprendre qu’il ne suffisait pas de se donner une fois… qu’il faut sans cesse renouveler le don de soi par une immolation qui embrasse toute la vie… En effet l’existence ne se compose pas d’un seul acte mais d’une suite d’actes et de petits détails qui forment la vie; c’est donc dans ces actes et mille détails que je dois m’immoler, en renonçant à tout ce qui s’y trouve de tendre, de naturel, d’égoïste et en acceptant la souffrance comme condition première de mon immolation

Ai-je ainsi compris ma vie d’adoratrice…? Ai-je en moi la vérité de l’immolation…? Dans une foule de circonstances mon immolation est-elle sincère…? Ma vie n’est-elle pas un mensonge permanent par rapport à la vie de victime que j’ai acceptée?

A tous les instants du jour Jésus-Christ s’immole sur un point du globe, et moi, tout particulièrement vouée au culte de la victime par excellence, ne m’immolerai-je pas comme elle…? Dans l’Eucharistie Jésus-Christ est dans un état permanent d’immolation; son immolation est passive, c’est le seul côté par lequel elle diffère de la mienne car je ne dois pas me contenter de dire à Dieu « me voilà! » mais je dois aimer, chercher et accepter la souffrance pour être réellement victime.

Jusqu’à présent je ne me suis pas fait une idée assez grande, assez juste de la souffrance… j’oublie trop vite que sans elle, je ne puis aller au ciel, que sans elle il n’y a pas de perfection possible… Jésus-Christ m’a tracé ma voie. Il a été dit de lui « qu’il fallait qu’il souffrît pour entrer dans sa gloire » et « que ceux qui ne portent pas leur croix sont indignes de lui »… Voudrai-je encore aller au ciel, tendre à la perfection, être victime sans souffrir…?

Mon immolation ne doit pas se porter sur un seul point mais sur tous. L’immolation du corps par la mortification est bonne, elle ne suffit pas; celle de l’âme est encore plus excellente mais seule elle serait incomplète; il faut pour que mon immolation puisse être bonne [qu’elle] soit conforme aux desseins de Dieu sur moi et qu’elle soit sans réserve… Il est des sacrifices que je dois être prête à faire s’ils venaient à m’être demandés mais pour lesquels Dieu semble se contenter de ma bonne volonté; il en est d’autres au contraire qu’il exige et qu’il faut que je fasse sans hésiter: sacrifice de santé, sacrifice de coeur, sacrifice de jouissances, sacrifice de jugement… L’essentiel est que dans l’ordre de la Providence je ne me réserve rien… que je m’immole sans cesse… et que je sois prête à sacrifier tout ce qui peut m’être demandé…

Il faut que je meure à tout, car si je ne suis morte, je ne puis ressusciter avec Jésus-Christ. La mort est la première condition de ma résurrection. Dans la mort même je trouverai la vie… mes pensées, mes sentiments, mes affections seront transformés en Dieu et je vivrai d’une vie toute nouvelle.

D’ici à la prochaine fête du Saint-Sacrement, je m’appliquerai à imiter Jésus-Christ immolé, je me placerai sur l’autel et là, unie à la divine victime, je me livrerai à l’action de Jésus-Christ, Prêtre et Sacrificateur. Je le laisserai maître d’immoler en moi tout ce qui s’y trouve de mauvais et d’imparfait. Loin de moi, ô mon Dieu, ces lâches et coupables réserves par lesquelles je manquerais à la vérité de l’immolation que j’ai promise à Dieu.

Notes et post-scriptum
1. La fête du Saint-Sacrement tomba le 4 juin en 1863.