Aux Oblates de l’Assomption

SEP 1874 Nîmes Oblates
Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Retraite prêchée par le Révérend Père d'Alzon sur l'Imitation de Jésus-Christ - 1er sept[embre] 1874
    Huitième instruction
  • CN 14, pp. 26-28.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA CROIX
    1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 AMOUR FRATERNEL
    1 BIEN SUPREME
    1 BON EXEMPLE
    1 CIEL
    1 CORRECTION FRATERNELLE
    1 EFFORT
    1 ENERGIE
    1 ESPERANCE
    1 ESPRIT DE COMMUNAUTE
    1 GRACES
    1 HUMILITE
    1 IDEES DU MONDE
    1 JOIE SPIRITUELLE
    1 LACHETE
    1 LUTTE CONTRE LA TENTATION
    1 LUTTE CONTRE LE MONDE
    1 LUTTE CONTRE SATAN
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MANQUEMENTS A LA REGLE
    1 MEDISANCE
    1 PERSEVERANCE
    1 PRATIQUE RELIGIEUSE DES LAICS
    1 RECHERCHE DE DIEU
    1 RELIGIEUSES
    1 SAINTS DESIRS
    1 SATAN
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 VERTU DE FORCE
    1 VERTUS THEOLOGALES
    2 FRANCOIS D'ASSISE, SAINT
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • du 1er au 8 septembre 1874
  • SEP 1874
  • Nîmes
La lettre

Livre III. – Chapitre 35. – Qu’on est toujours durant cette vie exposé à la tentation.

Mon fils, vous n’aurez jamais de sécurité dans cette vie; mais tant que vous vivrez les armes spirituelles vous seront toujours nécessaires.

Au point où vous en êtes, il faut réfléchir à ce que vous voulez faire, c’est le moment des prendre des résolutions énergiques. Qu’ai-je été jusqu’à présent et pourquoi le diable m’a-t-il vaincue si souvent, sinon parce que j’ai été une religieuse lâche et sans vigueur.

On définit la vertu, une disposition qui va de ce qui est parfait à ce qui est excellent. Si vous étiez dans le monde une simple chrétienne, vous ne seriez tenues qu’à pratiquer les voeux du baptême, les vertus théologales, certains exercices de dévotion, mais étant religieuses dans un état plus parfait, vous avez aussi plus d’obligations et vos voeux vous lient d’une manière plus étroite à Notre-Seigneur. L’âme d’une bonne religieuse est ce qu’il y a de plus parfait en soi, l’état religieux étant au-dessus de tous les autres, mais si vous êtes je ne dis pas une mauvaise mais une pauvre religieuse, comment pourrez-vous plaire à Dieu, comment pourra-t-il jeter sur vous des regards de complaisance. Les manquements à la règle, les inexactitudes, les manquements de charité, de douceur, etc…, toutes ces fautes que l’on commet chaque jour sont une cause de décadence pour l’âme, c’est comme une rouille qui la ronge; n’était-ce pas votre état, il y a quelques jours. Et maintenant que la retraite commence à opérer une transformation, veillez à ce que rien ne vienne en arrêter le progrès.

Vous êtes comme un architecte ayant le plan d’une maison; la maison se trouve sur le papier, il faut l’exécuter.

Vous êtes environnées d’ennemis, ils vous attaquent à droite et à gauche. Si vous ne vous couvrez donc de tous côtés du bouclier de la patience, vous ne serez pas longtemps sans blessures.

Par rapport à vous-mêmes, les armes spirituelles sont nécessaires pour vous défendre du démon, du monde et de vous-mêmes. N’avez-vous donc pas été bien souvent votre propre monde. Toute religieuse est une montre, il faut la nettoyer de temps en temps, autrement je ne sais quel corps s’attache aux rouages et l’empêche de marcher. Voyez donc la nécessité d’une retraite. Si une religieuse est une montre, on peut dire avec autant de vérité qu’une communauté est une pendule. Dans une pendule il y a plusieurs rouages et s’il y en a un seul qui vienne à se déranger, la pendule ne va plus, elle s’arrête, elle est détraquée. Vous comprenez l’allusion et si une religieuse ainsi que la petite roue vient à marcher de travers, elle détraque le couvent et met le désordre partout. Cela vous montre bien la nécessité du bon exemple; autrement les communautés baissent ou tombent et il n’y a plus alors que misère et que ruine. Veillez donc, toutes, à ce que par votre édification, votre piété, vos bons rapports, vous soyez utiles à votre Congrégation. Vous vous devez à vous-même d’abord, à votre Congrégation et ensuite aux oeuvres dont on vous chargera; pour vaincre les ennemis qui s’opposent à vous, il vous faut donc des armes. Eh bien! celle qu’il vous faut, la meilleure entre toutes, c’est la charité, l’amour pur et sans mélange de votre divin Sauveur. Armées de cette arme sainte, revêtues de la cuirasse de la croix, vous pourrez vous vaincre alors vous-même, vaincre le monde et vaincre vos passions et supporter toutes ces luttes dans une grande patience.

Qu’est-ce que la patience? Les théologiens la définissent: souffrance supportée avec amour, de là le nom de passion donné aux souffrances et à la mort de Jésus-Christ.

Si de plus votre coeur ne se fixe pas irrévocablement en moi avec la ferme volonté de tout souffrir pour mon amour. Il nous faut prendre notre parti résolument, la souffrance est notre partage, acceptons-la et disons du fond de notre âme: Mon Dieu, je suis vôtre pour toujours, je ne veux rien et ne refuse rien, je recevrai de votre main tout ce qui pourra m’arriver en bien ou en mal, les tentations et les épreuves comme les joies et les douceurs. Par moi-même je ne puis rien mais votre grâce me fera tirer le bien du mal et les tentations mêmes me deviendront avantageuses. Voyons, êtes-vous converties; avez-vous fixé votre coeur irrévocablement en Dieu; ne comptez-vous désormais que sur sa grâce pour combattre et pour vaincre? Mais non, on aime mieux dire: je suis prête à tout, rien ne pourra m’ébranler. Mes enfants, mais vous serez tentées et lorsque les ennemis seront à la porte de votre coeur, que ferez-vous si ce pauvre coeur ne cherche pas Dieu seul pour soutien et pour défense. Des obstacles nombreux s’opposeront à votre perfection, il faut absolument la grâce de Notre-Seigneur pour les surmonter tous. Il faut donc passer courageusement à travers tous les obstacles et lever un bras tout-puissant contre tout ce qui s’oppose à vous. Car la manne est donnée aux victorieux et une grande misère est le partage des lâches.

Si vous cherchez le repos en cette vie, comment parviendrez-vous au repos éternel.

Voilà une question importante à vous poser. Où est-ce que je cherche mon repos? Examinez sérieusement, voyez si c’est bien en Dieu seul, c’est une question de sincérité, de bonne foi. Ce soir, représentez-vous être dans votre cercueil et interrogez votre coeur, voyez s’il ne cherche pas dans les créatures le repos qu’il désire? Oh! mes enfants, les créatures sont impuissantes, elles ne peuvent rien, absolument rien et Dieu seul peut donner la paix de l’âme et le repos du coeur. Dites donc à votre divin Maître: Oui, Seigneur, c’est vous seul que je cherche, ce n’est qu’à vous que je veux aller et croyez que si vous ne voulez réellement que Dieu vous arriverez bientôt à la perfection.

Vous devez supporter tout avec joie pour l’amour de Dieu: les travaux, les douleurs, les tentations, les angoisses, les besoins, les infirmités, les injures, les médisances, les reproches, les humiliations, les affronts, les corrections, les mépris.

Une fille, une religieuse qui pour l’amour de son divin époux, supporterait toutes ces choses non seulement volontiers mais encore avec joie serait bien vite une sainte.

Oh, j’en conviens, c’est tout à fait le renversement des idées humaines; mais rappelez-vous que pour un court travail Dieu donnera une récompense éternelle et une gloire infinie pour une humiliation passagère. Mais il faut savoir se donner, ne plus se ménager, s’épargner, mais se vaincre au contraire en tout, supporter la souffrance, supporter la pauvreté; saint François d’Assise était encore plus pauvre! supporter les injures, d’être appelées hypocrites. Vous ne savez pas comment les ennemis des religieux et des religieuses les appellent: la vermine. Vous endurerez encore les médisances: on aime mieux encore être calomniée, on peut dire au moins que ce n’est pas vrai, mais la médisance, on n’a qu’à l’accepter et à baisser la tête.

Les corrections, non seulement celles que vous adresseront vos supérieures mais ces corrections qu’une soeur trop charitable ne craindra pas de vous faire. Voulez-vous être exercées? – Oui, mais je ne le puis à cause de mes rapports avec les enfants, avec les personnes du monde, toujours quelques mais qui viennent à propos vous soustraire à l’humiliation et vous excuser à vos propres yeux.

Je vous l’ai dit, mes chères filles, il faut que vous vous attendiez à subir la tentation, à être désolées, à être pour ainsi dire battues par le diable. Voulez-vous avoir dès le premier moment ce que tant d’autres ont à peine obtenu après beaucoup de larmes et d’immenses travaux? Et qu’est-ce qui peut vous valoir cela, sont-ce vos mérites? Hélas, en avez-vous? Ne les avez-vous pas tous perdus? Ecoutez alors ce qu’il faut faire: Attendez le Seigneur, combattez avec courage, soyez fermes, ne craignez point, ne reculez point, mais exposez généreusement votre vie pour la gloire de Dieu. Voilà le fond, c’est de ne pas vous ménager, d’aller rondement et courageusement à ce qu’il y a de plus pénible, mais on manque de force, on a peur d’aller trop vite et trop loin; on dit comme une pauvre femme italienne, sur le point de mourir: piano, piano, doucement, ma chère petite âme.

Attendez le Seigneur et agissez avec énergie, l’amour sera votre force, la foi votre lumière, l’espérance votre casque et avec cette armure vous ne craindrez ni Satan, ni le monde. S’il vous arrive encore de tomber après vous être humiliées, vous vous relèverez pleines d’espérance et allant vous réfugier dans les bras du Sauveur, vous embrasserez sa croix avec amour et vous y trouverez le courage et la force de devenir des saintes.

Notes et post-scriptum