Aux Oblates de l’Assomption

6 MAY 1875 Oblates

Des filles apostoliques dignes de leur vocation – Le renouvellement du coeur.

Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Instructions de 1874-1875 aux Oblates de l'Assomption
    Instruction du jour de l'Ascension. - 6 mai 1875
  • CN 17, pp. 84-86.
Informations détaillées
  • 1 ACCEPTATION DE LA VOLONTE DE DIEU
    1 AMOUR DU PROCHAIN SOURCE DE L'APOSTOLAT
    1 CIEL
    1 CONFIRMATION
    1 CONTEMPLATIVES
    1 DONS DU SAINT-ESPRIT
    1 DONS EN ARGENT
    1 EFFORT
    1 ENNEMIS DE L'EGLISE
    1 EPOUSES DU CHRIST
    1 FIDELITE A LA GRACE
    1 FOI
    1 FRANCHISE
    1 HUMILITE
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 OBLATES
    1 OEUVRES D'ORIENT
    1 ORGUEIL
    1 OUBLI DE SOI
    1 PENITENCES
    1 PERSECUTIONS
    1 PRATIQUE DE L'OBEISSANCE
    1 PRIERE AU SAINT-ESPRIT
    1 PRIERE DE DEMANDE
    1 RECHERCHE DE LA PERFECTION
    1 RETRAITE SPIRITUELLE
    1 SAINT-ESPRIT
    1 SAINT-ESPRIT SOURCE DE LA CHARITE
    1 TEMPLE DU SAINT-ESPRIT
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIE ACTIVE
    1 VIE DE SACRIFICE
    1 VIE DE SILENCE
    2 ANTONELLI, GIACOMO
    2 GIRY, LOUIS DE
    2 JACQUES, SAINT
    2 PICARD, FRANCOIS
    2 PIE IX
    3 ESPAGNE
    3 EUROPE
    3 FRANCE
    3 JERUSALEM
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • 6 mai 1875
  • 6 MAY 1875
La lettre

Mes chères filles,

Je me propose de vous adresser chaque jour une instruction d’ici à la Pentecôte, ce sera comme une espèce de retraite afin de vous préparer comme les apôtres dans le cénacle, à recevoir le Saint-Esprit. Je désire que vous vous retrempiez dans l’esprit religieux et que vous preniez un nouvel élan pour avancer dans le chemin de la perfection et atteindre cette sainteté que le bon Dieu exige de vous. Les temps où nous vivons sont mauvais; la lutte déclarée à l’Eglise est des plus habiles et nous ne savons pas où nous allons. Le cardinal Antonnelli disait, il y a quelques jours: il est probable qu’au mois d’octobre une guerre générale sera déclarée entre les puissances de l’Europe; et alors qu’arrivera-t-il? Dieu seul le sait. Nous voyons la persécution que subissent les chrétiens en Orient, persécution non sanglante mais qui n’en est pas moins terrible; il semble que nous retournons au temps apostolique, temps de persécution il est vrai, mais temps aussi de sainteté et de ferveur. Hier, le Père Picard a remis une adresse au Pape avec la modique somme de 1.200 francs et Pie IX en recevant ce faible témoignage d’affection de ses enfants de France, s’est écrié: « Oh! que j’ai besoin de l’argent de cette pauvre France car je ne puis pas en demander à ces Messieurs« , et Pie IX a envoyé une bénédiction toute particulière à l’Assomption et à toutes ses oeuvres et comme vous êtes une des oeuvres importantes de l’Assomption il se fait que vous aussi vous avez eu part à la bénédiction du Pape.

En fondant il y a quelques années votre congrégation, je n’aurais jamais cru former une oeuvre aussi bien appropriée aux besoins de notre époque, mais pour bien remplir votre mission il faut que vous soyez des filles de dévouement et vous mettre dans la disposition d’aller partout où l’on vous enverra pour travailler au salut des âmes, vous serez comme des agneaux au milieu des loups, des renards et des tigres, et votre devoir sera de prier et de vous dévouer. Notre-Seigneur montant au ciel, reproche à ses apôtres leur incrédulité, leur foi est encore chancelante parce qu’ils n’ont pas encore reçu la grâce d’en Haut, le Consolateur, l’esprit de force; dociles au commandement du divin Maître, ils vont s’enfermer dans le cénacle et se préparent par une sorte de retraite à recevoir le Saint-Esprit. Imitez les apôtres, les disciples et les saintes Femmes retirés dans le Cénacle et que le recueillement de ces jours que vous allez passer vous prépare à recevoir vous aussi la plénitude des dons de cet esprit divin; car je le déclare et ne crains pas de le dire: ni les Carmélites, ni les Bénédictines, ni les Assomptiades n’ont autant de droits que vous pour se ranger avec les saintes Femmes puisque votre vocation est d’être des filles apostoliques. Mais pour être dignes de votre vocation il est donc nécessaire d’exciter en vous cet amour des âmes. Le bien que vous ferez sera peu de chose peut-être, qu’importe, nous voyons saint Jacques aller de Jérusalem en Espagne et n’y convertir qu’un seul homme et cependant cela n’empêche pas que saint Jacques ne soit un très grand saint. L’essentiel pour vous est donc de vous trouver dans la disposition de faire uniquement la volonté de votre divin Epoux, quelque pénible et quelque dure qu’elle puisse vous paraître. Les Saintes Femmes sont venues de Jérusalem chez nous pour nous porter la foi, n’est-il pas juste qu’à notre tour nous envoyions dans l’Orient des âmes généreuses pour y rallumer cette foi que nous lui devons. Mais alors, mes filles, il faut avoir des coeurs d’apôtres et pour cela il faut vous retremper dans la vertu d’en Haut. Cette vertu, Notre-Seigneur l’a promise à tous ses apôtres et je ne doute pas un seul instant qu’elle ne vous soit accordée dans la mesure que vous le voudrez. Voyez donc avec quel sentiment profond de reconnaissance et d’amour vous devez vous revêtir de la sainteté. Si les Saintes Femmes reçurent les grâces de l’Esprit-Saint, les Apôtres et la Sainte Vierge en furent comblés; vous, filles de la Sainte Vierge et religieuses apôtres vous devez être comblées à votre tour. Ayant une double mission vous êtes tenues à être plus saintes que les autres, plus dévouées que les autres, n’examinant point ce qui vous plaît ou vous déplaît et de la sorte vous préparant aux persécutions que vous pourrez subir un jour à cause même de votre titre d’épouse de Notre-Seigneur.

Pour profiter de ces jours de retraite je vous recommande le silence et le recueillement. Réfléchissez sérieusement aux pieds de Notre-Seigneur, mûrissez ces pensées et voyez dans quelle mesure vous voulez vous donner. Que la nature frémisse, cela se peut; mais ce que vous devez faire c’est de surmonter ce frémissement et de vous vaincre. Proposez-vous ces jours-ci de faire toutes les choses qui vous seront le plus désagréables; faites des mortifications, des pénitences, des humiliations; il vous en coûte, qu’importe! cela vous ennuie de faire des sacrifices, allez quand même et faites-les généreusement. Voyez, mes chères filles, quand Notre-Seigneur veut mettre la main sur une âme pour s’emparer d’elle, il la brûle car sa main est toute de feu; et l’âme effrayée s’écrie: Mon Dieu, je n’avais pas compris toutes les divines exigences de votre amour. Mais bientôt apparaît dans cette âme une petite lumière qui lui fait voir ce qu’elle a à faire et la paix et le bonheur succèdent au trouble des premiers instants. Demandez-vous ces jours-ci en quoi vous voules être plus religieuses? Il est certaines personnes qui sont très obéissantes pourvu qu’on ne leur commande que ce qui leur plaît; il en est d’autres qui sont très humbles: que je suis misérable, que je suis mauvaise, disent-elles, mais gardez-vous de les prendre au mot, elles pourraient se fâcher. Mes enfants, soyez de vraies religieuses et souvenez-vous qu’il est quelque chose de plus grand que d’être reine et de commander sur la terre, c’est d’être l’épouse de Notre-Seigneur et de lui commander pour ainsi dire, lui qui veut bien accepter de nous obéir et d’être notre serviteur.

Il est une chose à laquelle on ne songe pas assez, c’est que nos âmes sont le temple du Saint-Esprit, combien de fois, dites-moi, vous en êtes-vous souvenues; quelle est votre dévotion au Saint-Esprit? Vous avez de la peine à faire vos méditations, je le crois bien si vous ne savez pas appeler l’esprit divin à votre aide; l’amour de Dieu a été répandu dans nos âmes par le Saint-Esprit et c’est son action très brûlante et très consumante qui allumera et excitera en nous cette faim et cette soif de travaux et de sacrifices. Vous croyez bien avoir reçu les dons du Saint-Esprit dans le sacrement de confirmation; qu’en avez-vous fait? Vous les avez enfouis et cachés dans votre coeur et ne savez pas vous en servir; ce que je viens vous prêcher, mes enfants, c’est de laisser le Saint-Esprit libre d’agir dans vos âmes et d’accepter joyeusement toutes les exigences de cet amour divin. Cette instruction doit être profondément désagréable car elle vous met au pied du mur, il n’y a plus à balancer, il faut faire votre choix et prendre votre parti. Il y a trois catégories dans la pratique de la perfection: les gens qui commencent, les gens qui veulent commencer et les gens qui font semblant de commencer. Pour votre consolation, j’en ajoute une quatrième, ce sont les gens qui commenceront. Ce qui arrête bien des âmes dans cette voie de perfection qui consiste dans l’abandon complet de notre être entre les mains de Dieu, c’est qu’elles ne savent pas jusqu’où il leur faudra aller dans cette voie de sacrifices. Ne vous êtes-vous pas demandé et ne vous demandez-vous pas encore: mais où m’arrêterai-je alors; jusqu’où irai-je, ah! c’est que vous ne vous arrêterez plus, les lumières de l’esprit divin vous montreront tout ce que vous avez à offrir et les flammes de l’amour vous aideront à faire généreusement votre sacrifice. Que faut-il conclure de tout ceci, c’est que cette retraite est un des moments les plus importants pour les Oblates, il faut donc demander au Saint-Esprit de descendre sur cette maison, de l’inonder de ses grâces. Il n’y a pas en France, je crois, de communautés qui puissent plus que celle-ci ressembler au cénacle. Or remarquez la responsabilité qui pèserait sur une religieuse qui dans quelque temps aurait à se reprocher de n’avoir point été fidèle aux grâces du Saint-Esprit. Vous ne pourrez pas sans doute faire une retraite comme pendant les vacances mais tâchez cependant de vous recueillir et de prendre votre résolution de devenir des saintes.

L’Esprit de Dieu est un esprit de vérité, nous devons aller à lui dans une très grande sincérité. Il y a absence de sincérité toutes les fois que nous voulons trouver des excuses, nous justifier de nos torts, cette pensée me fait frémir. Dans un certain sens je pourrais dire à chacune de vous: Ma fille, allez au Saint-Esprit et soyez sincère. Voyez comment avec cette lumière que le bon Dieu vous accorde, avec cet amour que vous trouvez dans le Saint-Esprit, vous allez renouveler vos coeurs, en déracinant vos défauts, en brisant vos volontés, en humiliant votre orgueil. C’est affreux à penser, vous allez passer par des tortures épouvantables, je vous en avertis et il faut cependant s’y mettre et s’y mettre dès ce soir, car ce serait alors du temps perdu et des grâces dont vous auriez à rendre compte. Il faut prendre votre coeur, l’arracher de votre poitrine et l’offrir à Dieu en lui disant: Seigneur, changez ce coeur et rendez-le digne de vous. Voilà le sujet de votre adoration, de votre méditation de demain, de votre action de grâce et la préoccupation de tous vos instants jusqu’à ma seconde instruction. Ce matin j’ai dit la messe pour vous et je vous promets des prières toutes spéciales tous ces jours-ci. Il y a quelque temps, le Pape disait à Madame de Giry: « j’ai prié pour tous ceux qui sont morts en défendant ma cause et j’ai prié tout spécialement pour votre fils et je souhaite de partager un jour sa gloire et son bonheur »; n’est-ce pas la plus grande consolation qu’une telle parole pour le coeur d’une mère. Mes chères filles, je prierai pour vous et je désire que nous devenions des saints et que nous jouissions tous de la gloire et du bonheur du ciel.

Notes et post-scriptum