Aux Oblates de l’Assomption

11 MAY 1875 Oblates

Le don de conseil.

Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Instructions de 1874-1875 aux Oblates de l'Assomption
    Instruction du 11 mai 1875
  • CN 18, pp. 95-96.
Informations détaillées
  • 1 COLERE
    1 DESINTERESSEMENT DE L'APOTRE
    1 DETACHEMENT
    1 DONS DU SAINT-ESPRIT
    1 FRANCHISE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MEDISANCE
    1 MENSONGE
    1 OBLATES
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PRUDENCE
    1 PRUDENCE DE LA CHAIR
    1 PURETE D'INTENTION
    1 REFORME DU CARACTERE
    2 GRAMONT, ANTOINE-ALFRED-AGENOR DE
    3 ALLEMAGNE
    3 HOLLANDE
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • 11 mai 1875
  • 11 MAY 1875
La lettre

Mes chères filles,

Et sur lui se reposeront les dons de conseil et de force. Le don de conseil que je vais développer aujourd’hui correspond à la vertu de prudence. La prudence n’est pas la vertu qui brille le plus à l’Assomption; c’est un reproche que l’on nous a adressé bien souvent; mais, mes enfants, il y a tant de gens prudents dans le monde que cette seule raison nous pousse à n’être pas toujours très prudents. Notre-Seigneur, lorsqu’il était sur la terre a été prudent dans un sens et non dans l’autre; il est venu en ce monde dans un temps mauvais et sa présence seule devait offusquer tous les sages de ce monde, tous ces prudents menteurs. Rien n’est plus triste, plus navrant que de découvrir toutes ces tromperies, tous ces mensonges des gens de bien. Et dans la dévotion, combien n’y a-t-il pas de ces finocheries, de ces petits mensonges dans le service même de Dieu. Il y en a parmi vous qui en sont incapables; mais je voudrais pouvoir le dire de toutes. C’est le don de conseil qui vous fera connaître tout ce que vous devez dire et ce que vous devez taire. Dans le monde pour arriver à ses fins, tous les moyens sont bons, le mensonge, les démentis, l’un vous dit d’une façon, l’autre vous dit autrement; ils se contredisent mais qu’importe pourvu que leurs idées triomphent et que leurs avis soient acceptés. Mais laissons le monde se sauver à sa guise et revenons à vous, cher petit auditoire. Vous êtes tentées parfois, vous vous demandez si vous voulez être vraiment sincères, ou bien ne l’être pas. Il est des personnes même parmi les religieuses qui se croient toujours victimes; vont-elles se confesser, leurs péchés sont vertus et si quelques fautes leur ont échappé, c’est ma soeur une telle qui en est cause; mais je vais vous dévoiler une chose, c’est qu’un confesseur reconnaît à cette seule marque la sincérité de notre coeur, car règle générale, si on accuse les autres, c’est une preuve que l’on diminue les siens. Il est donc des personnes qui se trouvent toujours malheureuses; il en est d’autres, qui, la prudence même, croient toujours à des obstacles; il en est d’autres enfin qui savent tout arranger. Or le don de conseil doit vous faire voir du premier coup ce que vous devez faire, et vous tenir dans cette disposition d’agir toujours en tout et partout pour le plus grand intérêt de Dieu. Parler, agir, vivre enfin sous le regard très pur de Dieu; se dépouiller de soi, se vaincre en tout dans le but de vous plaire, tel est ô mon Dieu le désir de mon coeur.

Et cependant, qui le dirait! oui, il y a des Oblates qui désirent jouir d’une certaine popularité soit envers les enfants, soit envers les gens du monde; eh bien, pour moi, mes chères filles, j’aurais grande envie de m’enfermer dans un fromage de Hollande, mais on ne peut pas toujours faire ce que l’on veut, il faut alors se résigner et faire joyeusement tout ce que Dieu veut. Que le sacrifice de votre volonté soit complet; tâchez de ne pas vouloir avoir toujours raison et souvenez-vous que les religieuses les plus imprudentes sont celles qui veulent le plus faire à leur tête. Dans tous vos ennuis examinez à quoi cela pourra vous servir et soyez persuadées que vous y trouverez toujours un profit immense. Je dois vous avouer que pendant quelque temps je m’y suis beaucoup exercé et que j’en ai toujours tiré un très grand avantage; je ne sais si maintenant cela m’est passé en habitude mais j’y songe beaucoup moins. Vous dites que vous avez mauvais caractère mais il faut le faire servir à votre sanctification; car ce n’est point lorsqu’on n’a aucune cause de mérite qu’on peut en acquérir. Voyez un peu tout ce que vous pouvez mériter si vous usez de tout selon cette prudence et ce don de conseil. Il est raconté que le duc de Grammon étant en Allemagne, voulut offrir un dîner pendant le court espace d’une armistice. Or pour toute chose, le maître d’hôtel avait un boeuf, et le Duc s’en étant allé le trouver: J’entends, lui dit-il, que tu me fasses un bon dîner, autrement je te fais pendre. Ainsi averti, le maître d’hôtel fit des prodiges et l’on dit que le plat le plus succulent qu’il ait fait fut une queue de boeuf aux marrons. Sachons donc dans l’ordre surnaturel tirer parti des sujets même les plus ingrats.

Le don de conseil nous aide donc à tirer parti de tout avec une grande prudence. Nous sommes incertains et nous jugerons alors avec le secours du Saint-Esprit ce qui sera le mieux pour notre avancement. Qu’il plaise à Notre-Seigneur qu’avec les dons du Saint-Esprit vous ne fassiez pas de bêtises, en attendant soyez des filles de prudence et de conseil et que l’on sente réellement que vous êtes mues par le conseil de Dieu et que vous agissez sous son regard divin.

Notes et post-scriptum