Aux Oblates de l’Assomption

17 MAY 1875 Oblates

Les vertus théologales et les dons du Saint-Esprit – L’action du Saint-Esprit dans nos âmes.

Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Instructions de 1874-1875 aux Oblates de l'Assomption
    Instruction du lundi de Pentecôte. - 17 mai 1875
  • CN 18, pp. 102-104.
Informations détaillées
  • 1 ACTE DE CREATION
    1 ACTION DE DIEU DANS L'AME
    1 BONHEUR
    1 DONS DU SAINT-ESPRIT
    1 ETERNITE DE DIEU
    1 ETRE HUMAIN
    1 GRACES
    1 IMITATION DE LA SAINTE VIERGE
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 MONDE CREE
    1 PECHE ORIGINEL
    1 PENTECOTE
    1 PREMIERE COMMUNION
    1 PROGRES DANS LA VIE SPIRITUELLE
    1 PROVIDENCE
    1 PURGATOIRE
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 REDEMPTION
    1 SAGESSE DE DIEU
    1 SAINT-ESPRIT
    1 SPIRITUALITE TRINITAIRE
    1 VERTUS THEOLOGALES
    1 VIE CONTEMPLATIVE
    1 ZELE APOSTOLIQUE
    2 PAUL, SAINT
    2 STRADIVARIUS
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • 17 mai 1875
  • 17 MAY 1875
La lettre

Mes chères Enfants,

Je vous traite aujourd’hui en filles sérieuses puisque je vous ai engagées à venir entendre cette instruction, qui par son sérieux et son élévation est plutôt pour des religieuses.

Nous entrons dans l’octave de la Pentecôte; rendons-nous un peu compte de ce que c’est que le Saint-Esprit par rapport à son action dans nos âmes. Et d’abord quelle différence y a-t-il entre les vertus chrétiennes et les grâces du Saint-Esprit, c’est-à-dire entre les vertus théologales et ses dons? La vertu est une action, un mouvement de l’âme, le don c’est cette impulsion, c’est l’essence même de cette chose bonne que nous voulons produire. Pour recevoir un don, il faut posséder une intelligence capable de connaître et d’apprécier, il faut que l’on soit un être raisonnable. Encore quelques jours et Notre-Seigneur viendra dans le coeur de ces chères petites. Mais, chères enfants, vous comprendrez la grandeur du don qu’il vous sera fait parce que vous avez une âme capable de connaître et d’aimer; car ce serait un sacrilège si l’on donnait le corps de Notre-Seigneur à un être dépourvu de raison.

Pour bien vous faire comprendre cette différence entre un don et une vertu je vais me servir d’une comparaison. Vous écoutez un morceau de musique; pour faire entendre ces sons, il y a deux choses, n’est-ce pas, d’abord le musicien qui joue et ensuite l’instrument. Les dons du Saint-Esprit correspondent à l’objet, à la cause, c’est l’instrument; et la vertu c’est l’action, c’est le mouvement de nos âmes, c’est l’acte accompli par le musicien. Quand un musicien joue, il ne donne pas le son, mais il les fait vibrer. Les vertus ne sont donc pas les dons et les dons ne sont pas les vertus. Ainsi l’intelligence n’est pas une vertu; cependant elle peut en produire. Les dons sont en nos âmes comme autant de touches mélodieuses, et il n’y a aucune vertu qui ne vienne du Saint-Esprit. Posez-vous cette question: Qu’est-ce que le Saint-Esprit veut faire de moi? Cet Esprit divin souffle où il veut, mais il consent cependant à donner ses dons selon les personnes auxquelles il s’adresse. Les grâces que je reçois comme prêtre et comme religieux ne sont pas les mêmes que vous recevez comme religieuses, ni comme celles que reçoivent ces enfants. Sauf les fameux violons de Stradivarius qui au dire d’un pauvre fou devaient être rapportés par les Anges, les instruments ne se perfectionnent guère en s’en servant puisqu’il faut sans cesse les accorder lorsqu’ils deviennent vieux. Pour le Saint-Esprit c’est le contraire. Comme les cloches qui prennent un son plus mélodieux à mesure qu’on s’en sert à moins qu’elles ne se fêlent, de même à mesure que nous recevons des grâces plus abondantes, plus aussi nous nous perfectionnons.

Saint Paul nous dit: « C’est en Dieu que nous avons la vie, le mouvement et l’être ». Dieu est présent partout, son essence divine nous enveloppe de toutes parts. Je vais vous dire une chose qui va vous surprendre, mes enfants; vous croyez que votre âme est dans votre corps et c’est justement le contraire, c’est-à-dire que c’est votre âme qui contient votre corps et ceci est bien autrement vrai par rapport à Dieu puisque Dieu est partout. Il est partout par son action; il est même dans l’enfer. Mais, me direz-vous, est-ce qu’Il brûle, est-ce qu’Il souffre? Non, car s’il est présent dans ce lieu de peine, il y est par sa justice. Dieu partout dans le monde, y est surtout par sa Providence bénie et veut agir surtout par amour et par miséricorde. Par sa nature infinie Dieu possédait en lui le type de toutes choses et il n’y a pas de feuilles dans une forêt dont l’idée n’ait été en Dieu. De toute éternité étaient en Dieu vos vertus, votre intelligence, votre coeur, votre mémoire, vos espérances, vos sentiments, votre imagination. La terre qui n’a pas d’âme agit cependant selon sa volonté. Le soleil, à ce que disent les savants, fut créé nébuleux et avait un rayon 80 millions de fois plus gros; mais par les lois de l’attraction les molécules s’étant rapprochées, le rayon est maintenant de 40 millions.

Mais qu’est-ce que toutes ces merveilles par rapport à notre âme, émanation de Dieu, divin souffle de vie qu’Il a produit en nous. Lorsque Dieu eut donné à l’homme tous les dons naturels, il trouva que ce n’était point assez. Il voulait lui donner le bonheur. Les lions, les tigres, les animaux les plus sauvages obéissaient à l’homme; mais l’homme ayant péché, cet ordre merveilleux fut troublé à jamais et l’homme perdit par sa faute cet empire que Dieu lui avait donné. Malgré la désobéissance de l’homme, Dieu n’en continua pas moins à vouloir son bonheur; et dans sa miséricorde il lui dit: « Veux-tu que je sois moi-même ton bonheur et ta récompense? » Il en est qui écoutent à peine cet appel de Dieu, pourvu, disent-ils, que je puisse me confesser, je m’abonne au purgatoire. Il en est d’autres qui disent: « Je veux être une bonne chrétienne mais n’en pas trop faire ». Enfin il en est d’autres qui voyant combien la figure de ce monde passe, veulent songer sérieusement à l’éternité. Comment irai-je? Le poisson est heureux dans son élément; l’oiseau est heureux lorsqu’il plane dans l’air, eh bien, tout cela n’est rien en comparaison du bonheur d’une âme qui se plonge dans l’essence de Dieu même, dans ce bonheur infini de l’amour dans le Saint-Esprit. Dieu agit comme amour pour les saints et votre oeil n’est pas plus dans votre tête que ce que le bon Dieu lui-même est en vous. Le Saint-Esprit, cet immense océan d’amour est double car c’est aussi un océan de lumière. Quand le Saint-Esprit sera venu, il vous enseignera toutes vérités. Que de vérités en effet ne pourriez-vous pas découvrir dans cette divine lumière; quelle limpidité d’oeil ne pourriez-vous pas acquérir, il s’agit de vouloir mais de vouloir tout de bon. Dieu le Père étant l’auteur de tout, vous devez l’adorer. Jésus-Christ, votre divin Rédempteur qui n’a pas craint de donner jusqu’à la dernière goutte de son sang pour sauver votre âme et vous mériter le ciel, combien ne devez-vous pas l’aimer. Enfin l’Esprit-Saint, Esprit de vérité, amour du Père et du Fils, avec quelle fidélité ne devez-vous pas écouter, suivre ses enseignements. Jésus-Christ est venu sauver le monde mais hélas, que de gens pour qui la rédemption sera inutile! S’il y a des gens bien sauvés, il y en a qu’on pourrait appeler mal sauvés, des gens qui par leur faute languiront des années et des années en Purgatoire.

En général la lumière réjouit le coeur et la vue d’un beau jour dispose à la joie mais pour qu’elle produise cet effet il faut s’accoutumer à cette lumière, il faut la connaître. Il n’est point étonnant qu’il y ait des gens qui n’apprécient pas la lumière, c’est parce qu’ils ont toujours habité dans des lieux obscurs, on dirait qu’ils ont vécu dans des caves. Et ce qui est dit de la lumière matérielle peut s’appliquer en tout à la divine lumière du Saint-Esprit dans nos âmes. Appelez cette lumière de toute l’ardeur de vos âmes, dites: « Mon Dieu, détruisez en moi tout ce qui peut blesser la lumière éternelle de votre Esprit ».

Il faut que vous preniez généreusement votre parti de donner à toutes vos actions un mérite nouveau, une valeur spéciale. Qu’est-ce qu’a fait la Sainte Vierge lorsqu’elle était sur la terre? Rien d’extraordinaire, mais dans la lumière et dans l’amour du Saint-Esprit, elle a fait toutes ses actions dans une perfection très grande. Imitez la Sainte Vierge, mes chères Enfants, soyez ce que vous êtes mais soyez des saintes! faites vos actions de chaque jour dans un très grand amour pour Notre-Seigneur. Que vos âmes, vos pensées, vos coeurs soient remplis de la lumière et de l’amour du Saint-Esprit; souvenez-vous sans cesse que vous êtes son temple et que votre conduite toute sainte le rappelle à ceux qui vivent auprès de vous. Soyez des Apôtres par votre zèle, soyez de petites saintes Vierges par votre piété et votre modestie et marchez toutes dans l’amour et sous l’action du Saint-Esprit.

Notes et post-scriptum