Aux Oblates de l’Assomption

SEP 1875 Oblates
Informations générales
  • Aux Oblates de l'Assomption
  • Retraite prêchée par le R. Père d'Alzon - 18 septembre 1875
    Dixième instruction
  • CM 380, pp. 25-26.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DES ELEVES
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 AMOUR-PROPRE
    1 BAVARDAGES
    1 BON EXEMPLE
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 DISCIPLINE INSTRUMENT
    1 DROITS DE DIEU
    1 GENEROSITE
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MORTIFICATION
    1 MORTIFICATION CORPORELLE
    1 OBLATES
    1 PRIERES AU PIED DE LA CROIX
    1 PURETE D'INTENTION
    1 RESPECT HUMAIN
    1 SAINTETE
    1 TIEDEUR
    1 VERTU DE PENITENCE
    1 VIE DE SILENCE
    2 CATHERINE DE SIENNE, SAINTE
    2 FRANCOIS D'ASSISE, SAINT
    2 THERESE, SAINTE
  • Oblates de l'Assomption
  • Oblates
  • du 18 au 25 septembre 1875
  • SEP 1875
La lettre

Mes chères filles,

Nous allons parler ce soir d’une condition indispensable de la vie religieuse: la mortification qui repose sur le sentiment du péché. En faisant le mal nous avons irrité Dieu, il nous faut apaiser sa colère par la pénitence. En général, ce sont les âmes les plus saintes qui sont les plus pénitentes. Ces âmes privilégiées ont-elles besoin de plus de pénitences? Non, en ont-elles moins de besoin? non encore, mais seulement elles ont une vue plus claire de ce qu’elles doivent à Dieu. J’ai connu une dame très sainte qui avait ce sentiment très profondément gravé dans son coeur. Un jour elle fut appelée auprès d’un malade pour l’engager à se confesser. Mais le moribond refusa obstinément de recevoir le prêtre et mourut dans des convulsions épouvantables. Et elle me disait qu’il y eut des gens qui dirent: la miséricorde de Dieu est si grande; pauvres insensés, comme ils s’abusaient! Tel est le langage du monde et cela nous montre une fois de plus que ce ne sont pas les plus grands pécheurs qui sentent le plus le besoin de faire pénitence, de commencer leur purgatoire en cette vie. Même parmi les prêtres on trouve cet aveuglement. Ainsi j’ai beaucoup confessé de prêtres, eh bien, je n’en ai entendu qu’un seul en 1838 me dire: Mon Père, je me propose d’aller à la trappe finir ma vie car je sens que j’ai bien mérité de faire pénitence.

Après ces exemples, voyez au contraire une sainte Thérèse se livrer à des austérités épouvantables, un saint François d’Assise se rouler dans les épines et vous reconnaîtrez en effet que ce sont bien les âmes les plus pures qui sentent le besoin de la pénitence. Dans la vie religieuse il y a des moments d’assoupissement, de somnolence; la pénitence est alors très salutaire, elle vous réveille, vous secoue, vous ranime, et en général moins vous sentez le besoin de pénitence plus vous devez profiter des occasions qui se présentent pour vous mortifier, et alors que de petits riens à l’aide desquels vous pouvez faire pénitence. Il ne s’agit pas toujours de prendre la discipline, donnez la discipline à votre langue en vous taisant, en retranchant quelques paroles même à des moments permis. Par là vous édifierez vos soeurs et vous montrerez à la communauté que si vous avez beaucoup trop parlé autrefois vous savez vous taire maintenant. Croyez-moi, pour vous mortifier cette année vous vous tairez.

Un autre motif de se mortifier c’est l’amour. Une religieuse qui comprend les souffrances de Notre-Seigneur éprouve le besoin de souffrir. De là des vies comme sainte Thérèse, sainte Catherine de Sienne; avez-vous dans votre coeur le sentiment des apaisements de l’amour? L’amour transporte, il dévore, il consume, et il faut l’apaiser par des souffrances, des humiliations, des mortifications. A cet égard je ne vous impose rien, c’est à vous à voir ce que Notre-Seigneur vous demande. Mais souvenez-vous qu’une Congrégation dans laquelle on n’éprouverait pas le besoin d’aimer Dieu et de souffrir pour Lui est une communauté morte pour le bien qu’elle opère. La règle pourra bien être pratiquée d’une certaine façon, mais sans ferveur et sans fruits. Un Carme qui a quitté son couvent, disait un jour à une dame: il y a dans notre Ordre des bêtes de pénitence. Mes filles, si au fond de toutes les pénitences il n’y a pas un immense amour, leur valeur ne sera pas grande aux yeux de Dieu et même pourra-t-on y trouver une certaine satisfaction toute humaine. On fait un petit retour sur soi et l’amour de Dieu disparaît; on éprouve une certaine consolation dans l’accomplissement de ces actes, la consolation douloureuse de la discipline comme disait très spirituellement une dame. Mais de tout cela, il résulte beaucoup trop de personnalité et pas assez de cet amour qui ne regarde que Dieu.

A présent, mes filles, il vous reste à examiner combien la mortification vous est importante comme Oblate. Vous êtes des filles apostoliques pour mériter l’honneur de faire quelques fruits dans les âmes, ne devez-vous pas vous offrir dès à présent comme victimes? Tenez, même sans parler des missions lointaines, vous allez avoir la rentrée des classes. Pourquoi les maîtresses ne s’imposeraient-elles pas comme une neuvaine de pénitences, pour obtenir de faire du bien à ces âmes qui vont leur être confiées? Pourquoi ne demanderaient-elles pas à Dieu la grâce de ne pas se prêcher elles-mêmes mais de prêcher Notre-Seigneur? Remarquez bien à ce point de vue que quand les enfants s’apercevront qu’elles ont affaire à des religieuses austères, elles deviendront austères elles-mêmes. Si elles voient des religieuses silencieuses, elles apprendront à aimer le silence. Par rapport aux gens du monde, quand vous êtes au parloir, laissez tomber parfois la conversation et croyez qu’on en sera édifié.

Eh bien, mes filles, je m’arrêterai là et comme j’ai commencé en vous disant: Faites pénitence, je terminerai encore par ces mots: Faites pénitence. Songez aux droits de Dieu sur vous, rendez-vous compte du courage avec lequel vous devez secouer le respect humain. Si on ne peut pas toujours s’adonner aux pénitences corporelles, la pénitence morale peut toujours se faire. Vous devez tous les jours offrir quelque chose à Notre-Seigneur Jésus-Christ car si vous n’êtes pas des filles pénitentes, vous ne ferez jamais rien. Allez quelquefois au pied de votre crucifix et dites-lui: Mon Dieu, que voulez-vous que je fasse? Et faites ensuite avec générosité ce que Notre-Seigneur vous inspirera. C’est au pied de la croix, c’est à cette école que vous apprendrez à vous vaincre, à vous renoncer et à vous mortifier en tout et ainsi vous deviendrez chaque jour plus dignes d’être les épouses d’un Dieu crucifié.

Notes et post-scriptum