Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes

8 feb 1846 Nîmes Tertiaires Hommes
Informations générales
  • Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes
  • Cahier des procès-verbaux 1845-1847
    15. Séance du 8 février 1846. - Des rapports avec les élèves.
  • Ecrits spirituels, pp. 1332-1336 et Cahiers d'Alzon, n° 4, pp. 148-153.
  • DI 208-210, pp. 13-15.
Informations détaillées
  • 1 ACTION DU CHRIST DANS L'AME
    1 AFFRANCHISSEMENT SPIRITUEL
    1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 AMOUR DES ELEVES
    1 AMOUR DU PROCHAIN SOURCE DE L'APOSTOLAT
    1 ANGES
    1 BAPTEME
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 DESSEIN DE SALUT DE DIEU
    1 ENGAGEMENT APOSTOLIQUE DES LAICS
    1 ENSEIGNEMENT DE LA VERITE
    1 ESPRIT DE L'EDUCATION
    1 ETUDE DES CARACTERES
    1 FOI
    1 FORMATION DES AMES DES ELEVES
    1 HUMILITE
    1 IMITATION DE DIEU
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 INCARNATION MYSTIQUE
    1 JESUS-CHRIST MODELE
    1 MAITRES CHRETIENS
    1 ORAISON
    1 OUBLI DE SOI
    1 PRETRE EDUCATEUR
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 THOMAS D'AQUIN
    1 TIERS-ORDRE MASCULIN
    1 VERTU DE CHASTETE
    1 VERTU DE FORCE
    1 VIE DE PRIERE
    2 ADAM
    2 BLANCHET, ELZEAR-FERDINAND
    2 CARDENNE, VICTOR
    2 CUSSE, RENE
    2 DECKER, FRANCOIS-JOSEPH
    2 EVERLANGE, PIERRE-EMILE-LEON D'
    2 GERMER-DURAND, EUGENE
    2 HENRI, EUGENE-LOUIS
    2 JOVENICH
    2 LAURENT, CHARLES
    2 MOISE
    2 MONNIER, JULES
    2 SAUVAGE, EUGENE-LOUIS
    2 SURREL, FRANCOIS
    2 TISSOT, PAUL-ELPHEGE
  • Tertiaires de l'Assomption
  • Tertiaires Hommes
  • 8 février 1846
  • 8 feb 1846
  • Nîmes
  • Collège de l'Assomption
La lettre

[15] Séance du 8 février [1846].

Présents: MM. d’Alzon, président, Tissot, Surrel, Henri, Laurent, Cusse – Blanchet, d’Everlange, Cardenne, Jovenich, Monnier – Durand, Decker, Sauvage.

M. d’Alzon nous fait considérer nos rapports avec les élèves au point de vue de la foi. Il nous invite à méditer ce que c’est qu’une âme, combien une âme est admirable, combien elle a dans le chrétien un cachet de dignité qui n’appartient pas même à la nature angélique, puisque Dieu, pour se manifester, a choisi de préférence la nature de l’homme et la race d’Adam. Ce cachet de dignité lui a été imprimé sans doute au Baptême, mais il n’y a là encore que des linéaments ébauchés. Ils doivent être développés. Ce travail, ce développement est l’oeuvre de l’éducation.

[I. L’oeuvre à accomplir]

L’âme alors est comme un métal dont il faut faire une médaille, comme un marbre dont il faut faire une statue. Dieu a jeté les premiers traits; reste à mettre en saillie le relief du métal, à dessiner les contours du marbre. Le modèle est donné, c’est Dieu lui-même. Il faut le reproduire. Nous sommes les ouvriers chargés de cette reproduction. Les instruments sont mis entre nos mains. La force nous est donnée pour achever l’oeuvre; Dieu lui-même travaillera avec nous, il amollira le marbre, il préparera l’âme de l’enfant pour être pétrie, moulée, sculptée comme le marbre ou le métal.

Mais travaillerons-nous avec nos idées, ou avec celles de Dieu? L’ouvrier à qui le sculpteur confie le marbre à dégrossir, auquel il donne un modèle, des compas, des ciseaux, satisfera-t-il l’artiste s’il travaille seulement d’après son idée, et non d’après celle qui lui est indiquée? Assurément s’il est infidèle à reproduire l’idée du maître, le travail est manqué; il a substitué l’habileté du praticien à l’inspiration du génie. Ainsi dans l’éducation, nous devons mouler, modeler nos statues sur Jésus-Christ si nous voulons les réussir. Pour cela nous devons de plus en plus nous pénétrer de la pensée de Jésus-Christ, et nous unir à son action générale sur les âmes, et, dans le travail spécial et personnel qui pourra nous être confié, lui demander sa volonté, ses projets, ses desseins sur les âmes, afin d’avancer plus sûrement dans notre travail.

[II. Eléments de l’éducation]

A ce point de vue envisageons les éléments divers qui composent l’éducation – l’âme à façonner – le modèle à suivre – l’instrument à employer – la force qui nous aidera à réaliser le modèle.

L’âme des enfants. – C’est le bloc de marbre. Il nous faut connaître sa nature. Il peut être dur ou tendre; il faudra enfoncer plus ou moins le ciseau. Le marbre diffère de la pierre, la pierre diffère du plâtre: il faut sur chacun travailler différemment.

Ce n’est pas assez de connaître la nature du marbre qui nous est confié. Il faut le considérer en vue de Jésus-Christ. Si nous avons une statue à faire, nous procéderons autrement que si nous avions une maison seulement à construire. Il y a ensuite à étudier les plis et les replis des vêtements que nous jetterons sur ce marbre; il faut arrêter les contours des membres, fixer l’expression du visage, caractériser la physionomie, l’empreindre ici de la foi, ici de la pureté, ici de l’humilité.

Le modèle à suivre. – La physionomie dominante est celle de Jésus-Christ. Mais il se transforme selon les caractères: non est inventus similis illi. Nous avons donc à voir en Jésus-Christ ce que nous devons prendre pour le reporter sur le marbre, c’est-à-dire sur l’âme. Sans doute, il nous sera impossible d’exprimer exactement la pureté, la délicatesse du modèle. Mais enfin cherchons toujours quelle partie nous pourrons en reproduire. Travaillerons-nous en orfèvrerie? Travaillerons-nous en bronze? Le modèle reproduit en argent risquera-t-il d’être affaibli et sans relief? fondue en bronze, l’empreinte ne sera-t-elle pas meilleure? Voilà donc autant de métaux à étudier, par rapport au modèle, pour la fidélité de l’expression et de la physionomie. Cette connaissance du divin modèle nous l’acquerrons par la méditation et Jésus-Christ, mieux connu par nous, se transformera mieux dans les âmes.

La force à déployer. – Une autre condition est encore nécessaire pour la réussite de notre travail. Il nous faut la force. Mettez des instruments dans les mains d’un cadavre, le cadavre ne fera rien. Il faut du feu pour fondre la dureté du métal: un bras d’enfant ne suffira pas à la polir. De même au-dessus de nos forces nous devons placer une force supérieure, celle de la prière. Comme Moïse sur la montagne, communiquons par la prière avec Dieu. Ecoutons dans ces communications intimes tout ce qui s’agitera en nous sous le souffle de Dieu; ramassons dans notre oeil la lumière qui nous présentera des horizons sans nombre; recevons les eaux qui s’écouleront par les canaux de la vie. En un mot allons à Jésus-Christ pour qu’il nous inspire lui-même, pour qu’il nous éclaire, pour qu’il nous échauffe.

L’imitation du Christ. – A cette lumière divine, nous verrons clairement par où imiter Jésus dans nos rapports avec les enfants. Ici les pensées de la foi nous élèvent singulièrement: car nos rapports avec les élèves deviennent les mêmes que ceux de Jésus-Christ avec les âmes. Jésus aime les âmes. Il a donné sa vie pour elles. Nous pouvons aussi donner notre vie pour ces jeunes âmes. Et c’est ici qu’est la perfection du dévouement. Fortis ut mors dilectio. Aimer les âmes comme Jésus-Christ a aimé les âmes, dépenser toute chose et soi-même pour les âmes! sans doute tous ne sont pas appelés à ces sacrifices sublimes. Mais enfin la perfection est là, ne l’oublions pas; nous pouvons nous immoler pour les âmes. Qu’est-ce que notre sang après tout pour une âme, et n’est-il pas trop léger, puisqu’il a fallu tout le sang de Jésus pour sauver les âmes. Irons-nous jusque-là? Si Dieu nous y pousse, n’y regardons pas de si près, et immolons-nous comme Jésus-Christ s’est immolé. Il reste d’ailleurs encore bien des degrés de souffrances à parcourir avant d’atteindre jusqu’à cette immolation: soyons prêts à les traverser généreusement. Le sang de Jésus-Christ n’était-il pas impatient de se répandre pour les hommes?

L’amour des enfants. – C’est là tout l’amour que nous devons avoir pour les enfants: amour d’apostolat, – amour communiqué par Dieu, et communiqué par nous-mêmes, devenus les intermédiaires entre Dieu et les enfants; – apostolat puisé dans la vérité, apostolat sauveur; illumination des âmes auxquelles nous communiquerons l’amour, et qui nous renverront elles-mêmes une vive et abondante lumière. Saint Thomas, nous transportant au sein du monde angélique, nous montre la vérité s’écoulant de degrés en degrés par toutes les hiérarchies célestes. Ainsi s’écoulera sur nous la vérité et, de cascade en cascade, nous la verserons sur les jeunes intelligences placées au-dessous de nous.

Mais, sachons-le bien, plus notre âme sera vidée, plus ce faible vase sera en retour étendu, élargi, plus grande sera la portion de vérité qui s’écoulera en nous, plus grande celle qui rejaillira sur nos élèves. Passionnons-nous pour cet apostolat. Rendons-nous-en dignes. Prêtres et laïques, nous sommes tous appelés à cette communication de la vérité et de l’amour par l’éducation. Faisons-en l’objet de nos méditations, de nos désirs, de tous nos efforts.

Notes et post-scriptum