A des dames ou jeunes filles

sep 1863 Nîmes
Informations générales
  • A des dames ou jeunes filles
  • Retraite à Saint-Maur en 1863
    Huitième instruction - L'expiation
  • BZ 9, pp. 120-130.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DE JESUS-CHRIST POUR LES HOMMES
    1 BIEN SUPREME
    1 CHARITE ENVERS DIEU
    1 CHATIMENT
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 IMITATION DES SAINTS
    1 INCARNATION DE JESUS-CHRIST
    1 INGRATITUDE
    1 JESUS-CHRIST AUTEUR DU PARDON
    1 JESUS-CHRIST MEDIATEUR
    1 JOIE SPIRITUELLE
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 LACHETE
    1 MISERICORDE DE DIEU
    1 PARDON
    1 PECHE
    1 PECHE ORIGINEL
    1 PENITENCE IMPOSEE
    1 SACRIFICE DE JESUS CHRIST
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SOUFFRANCES DE JESUS-CHRIST
    2 ADAM
    2 PAUL, SAINT
  • Du 15 au 20 septembre 1863
  • sep 1863
  • Nîmes
La lettre

Tunc acceptabis. Alors vous agréerez le sacrifice de justice, les offrandes et les holocaustes; alors on immolera sur votre autel des victimes d’actions de grâces.

Nous avons vu dans une des instructions précédentes ce qu’était le péché et par rapport à Dieu et par rapport à nous. Du côté de Dieu, c’est l’outrage le plus injurieux, le plus sanglant que nous puissions faire à la majesté divine, et de notre côté il nous dégrade et nous rend les esclaves de Satan.

Cependant Dieu a placé, comme j’ai pu déjà vous le dire, Dieu a placé à côté du mal, il a placé le bien; et à côté du péché, N.S. a mis l’expiation. Par cet acte, nous pouvons satisfaire à la justice divine, effacer notre faute, et nous mériter le pardon de nos péchés. Nous devons nous constituer comme des victimes offertes sur l’autel de l’amour en actions de grâces des miséricordes de Dieu. Nous devons accomplir en nous ce qui manque à la passion de N.S., comme disait l’Apôtre St Paul. Et comment pourrons-nous accomplir ce but? C’est par l’expiation.

1° Expiation du côté de Dieu, qui nous l’impose;

2° expiation du côté de J.C., qui a satisfait d’une manière surabondante;

3° du côté de l’homme, qui se l’applique.

L’homme, après avoir péché, mérite un châtiment. Voyez, dès le début de la vie Adam a péché dans le paradis terrestre, en désobéissant à son créateur, et Dieu aussitôt le chasse de l’Eden, le condamne à mourir et lui fait expier, pendant 930 ans, son péché. Il est de la justice de Dieu de punir l’homme coupable, et c’est dans cette punition que le pécheur doit voir l’expiation de sa faute. J.C. cet homme-Dieu, lui, l’innocence même, a satisfait à la justice de son Père d’une manière surabondante; il a voulu donner à l’homme dans cette surabondance, de quoi acquitter sa dette envers le Dieu qu’il a outragé. Peut-être qu’abandonné à ses propres mérites, l’homme se fût découragé en se voyant incapable de satisfaire à la souveraine majesté; et notre doux Sauveur a voulu expier, d’une manière surabondante, les fautes que nous avions commises, afin de nous servir de ses mérites pour les offrir à Dieu son Père. Oh! excès d’amour; comment une créature peut-elle, en voyant son Dieu souffrir et mourir pour elle, ne pas se confondre, s’abîmer à la vue de son ingratitude. St Paul, cet apôtre des Gentils, St Paul, ce vase d’élection, après avoir enduré toutes les peines, les fatigues attachées à son laborieux apostolat, voulait châtier son corps afin, disait-il, d’accomplir ce qui manquait à la passion de J.C.; il voulait expier ses péchés, se jugeant toujours indigne du rang sublime qu’il occupait dans l’Eglise après en avoir été le persécuteur…

L’homme, de son côté, doit s’appliquer à lui-même cette expiation dont parle le grand Apôtre. Il doit expier, par quelque voie que ce soit, les péchés dont il s’est rendu coupable; l’expiation doit lui devenir journalière, puisque tous les jours il pèche. Après être tombé, il ne doit point se laisser aller au découragement, mais expier le péché et se relever promptement de sa chute, etc.

Mais cette expiation s’offre à l’homme avec plusieurs caractères, tous capables de l’encourager dans cette voie difficile et pénible à la nature.

1° Du côté de Dieu, elle a un caractère de justice et de miséricorde;

2° du côté de J.C., un caractère de dette et d’amour;

3° du côté de l’homme, un caractère d’amour et de pénitence.

Il est de la justice de Dieu de punir, ou dans ce monde ou dans l’autre, l’homme qui par le péché s’est révolté contre lui, et l’expiation qu’il fait faire ou qu’il impose à l’homme coupable porte un caractère de justice, parce que de même que Dieu est souverainement bon, il doit être souverainement justice. Encore l’expiation qu’il impose à l’homme coupable porte-t-elle un caractère de miséricorde, en ce sens que, au lieu de précipiter comme il le fit des anges, au lieu, dis-je, de précipiter au fond de l’abîme le pécheur, il l’attend patiemment, il frappe doucement à son coeur, il l’invite amoureusement de revenir à lui, et par les peines qu’il lui envoie, il lui donne un moyen de satisfaire à sa justice; et l’homme paraît quelquefois insensible aux avances qui lui sont faites par son Dieu, il méconnaît sa miséricorde et, victime de son ignorance volontaire, il subira, tôt ou tard, les effets de cette justice divine dont il aura méconnu la miséricorde.

Du côté de J.C., cette expiation porte un caractère de dette et d’amour. Dès que l’homme eut péché dans le jardin des délices, Jésus, le Verbe de Dieu, se présente devant son Père pour être le médiateur entre le créateur et la créature devenue coupable. Il se fit notre caution, il prit sur lui la dette que nous avions contractée par le péché. Et lorsque, dans la plénitude des temps, les oracles furent proclamés, J.C. descendit sur la terre, embrassa tout ce que la vie avait de plus pénible et de plus amer. Il voulut expier, dans sa personne, le péché de l’homme, et il voulut l’expier d’une manière surabondante. C’est cette surabondance dans l’expiation que notre bon Sauveur nous manifeste son amour. Pour satisfaire à la justice de son Père, pour acquitter l’immense dette que nous avions contractée, J.C. n’avait pas besoin de tant souffrir, un seul soupir, une seule larme aurait suffi pour expier les péchés, quelque nombreux qu’ils soient, parce que ce soupir se serait exhalé de la poitrine d’un Dieu, cette larme aurait coulé des yeux d’un Dieu, et que le caractère divin imprimé à ces actions aurait suffi pour satisfaire la justice de son Père. Mais ce qui suffisait à Dieu ne suffisait pas à son amour; il a voulu qu’il y ait surabondance dans son expiation, afin que l’homme pût se servir de ses mérites pour suppléer à sa faiblesse, à sa misère. Donc l’expiation de J.C. a un caractère de dette et d’amour; il a satisfait pleinement et amoureusement, il a acquitté jusqu’à la dernière obole la dette immense que l’homme avait contractée, et il l’a acquittée avec une monnaie infiniment supérieure à celle de l’homme, avec la monnaie de l’amour. Jésus a aimé les hommes. Et si je considère, et si je mesure cet amour dans ses effets, je vois d’abord l’Incarnation et je succombe en me rappelant cette grande parole: Dieu a tant aimé les hommes qu’il a donné son Fils pour les racheter, et ce Fils, c’est vous, ô Jésus! et notre rédemption est l’effet de votre amour pour nous; mais que cette rédemption vous a coûté cher! Victime d’expiation pour nous, vous vous êtes livré volontairement et par amour pour nous, aux privations, aux humiliations, aux travaux, aux persécutions, aux tourments, à la mort. Voilà comment Jésus a aimé les hommes et comment il a acquitté la dette qu’ils avaient contractée.

Il faut que l’homme, à son tour, donne à son expiation un caractère d’amour et de pénitence. Je viens de vous parler de l’amour que Jésus avait eu pour les hommes, pour vous; il est donc bien juste que vous lui rendiez amour pour amour. Un abîme appelle un autre abîme, a dit le prophète; il faut que l’abîme de l’amour de votre Dieu appelle l’abîme de votre amour. Ah! je le sais, vous n’aimerez pas et vous ne manifesterez pas votre amour comme Jésus, c’est-à-dire il n’aura pas la même intensité, le même degré de dévouement; vous ne serez pas comme lui prêtes à tous les sacrifices qu’il peut vous demander; Jésus seul était capable de cet amour sublime que vous ne pourrez jamais atteindre. Mais au moins, que l’amour vous guide dans votre expiation, que ce soit par amour que vous expiiez vos péchés. Ne pourriez-vous pas aimer un Dieu qui vous a tant aimées, pourriez-vous demeurer insensibles à ces témoignages touchants de charité que ce bon Sauveur vous a donnés. L’amour ne se paie que par l’amour, nous dit l’auteur de l’Imitation. Donc vous devez payer la charité infinie de votre Dieu par tout l’amour dont vous êtes capables. Vous devez ensuite regarder cette expiation comme une véritable pénitence que vous vous imposez. Tous les saints, s’ils ont voulu parvenir au séjour du bonheur éternel, sont entrés généreusement dans la route de l’expiation et de la pénitence; ils ont compris toute l’efficacité de cette vertu, et ils n’ont pas hésité à l’embrasser. Ils se sont faits les victimes de la pénitence pour pouvoir devenir ces victimes pures dignes d’être présentées à l’autel du Seigneur pour être immolées en actions de grâces.

Je crois inutile de vous parler des merveilleux effets de la pénitence volontairement imposée, vous les connaissez. Je me bornerai seulement à vous dire que si vous voulez aller au ciel, il faut faire pénitence, il faut ici-bas expier, par tout ce que la pénitence a de plus pénible, les fautes dont vous vous êtes rendues coupables. Vous le savez, et on s’en sert dans le monde, de ce proverbe, malheureusement devenu un peu trivial: rien ne coûte à celui qui aime. Non, tout nous paraît joie, bonheur, les fatigues ne sont comptées pour rien, quand il s’agit de prouver son amour. Et ce que le monde éprouve, ne le ressentirions-nous pas pour Dieu? Ah! si nous aimions, mais si nous aimions sincèrement, que la pénitence nous paraîtrait douce, nous nous y livrerions sans faire attention aux réclamations de la nature, et après avoir été des victimes d’amour et de pénitence, vous mériterez d’aller partager dans le ciel le bonheur des saints qui nous ont précédés dans la carrière de l’amour et de la pénitence.

Notes et post-scriptum