- A des dames ou jeunes filles
- Retraite à Saint-Maur en 1863
Neuvième instruction - Fortifiez-vous et soyez énergique - BZ 9, pp. 130-138.
- 1 BIEN SUPREME
1 BON EXEMPLE
1 BUT DE LA VIE
1 CONVERSION SPIRITUELLE
1 EDUCATION EN FAMILLE
1 EMPLOI DU TEMPS
1 ENERGIE
1 GLOIRE DE DIEU
1 IMAGINATION
1 IMITATION DE JESUS CHRIST
1 JESUS-CHRIST MEDIATEUR
1 LUTTE CONTRE LE MONDE
1 LUTTE CONTRE SATAN
1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
1 MAUVAISES LECTURES
1 PAIX DE L'AME
1 PARESSE
1 PUISSANCE DE LA SAINTE VIERGE
1 PURETE D'INTENTION
1 SALUT DES AMES
1 TRAVAIL
1 VIE DE PRIERE
1 VIGILANCE
1 ZELE APOSTOLIQUE
2 ADAM
2 FRANCOIS XAVIER, SAINT
2 JOSUE
2 MARTHE, SAINTE
2 PAUL, SAINT
2 SOLON
2 THERESE, SAINTE
3 CHANAAN
3 GRECE
3 JAPON - Du 15 au 20 septembre 1863
- sep 1863
- Nîmes
Ces paroles furent adressées à Josué au moment d’entrer dans la terre promise. Avant de prendre possession de cette terre, Dieu n’épargne pas les combats à Josué. Vous savez quelles guerres il eut a soutenir avec les peuples voisins de Chanaan, et comment avec le secours de Dieu, Josué les dissipa et put enfin conduire dans cette terre promise le peuple qui depuis 40 ans errait dans le désert.
Ce n’est pas dans une terre promise que vous allez entrer, mes chères filles, mais au sortir d’une retraite, je me sens poussé de vous répéter les mêmes paroles qui furent adressées à Josué: Fortifiez-vous et soyez énergique, car les combats et les luttes vous attendent pour ainsi dire à la porte de cette maison. Vous avez, pendant cette retraite, combattu avec vous-mêmes, tout n’est pas fini, il faut maintenant que vous combattiez, et avec plus d’acharnement encore, contre les ennemis extérieurs, contre le monde que vous avez paru oublier; il faut que vous soyez fortes contre ses attaques et que vous soyez énergiques contre ses vaines sollicitations. Il redoublera peut-être d’ardeur; à votre tour, redoublez de vigilance, soyez fermes, fermes dans la vertu, fermes dans la pratique de vos résolutions.
Mais pour acquérir cette force, cette énergie, cette fermeté dont je viens de vous parler, que faut-il faire? Il faut mener une vie active, il faut que vous la sanctifiiez cette vie, et elle sera:
1° si vous regardez Dieu comme votre unique but;
2° par le travail;
3° par le zèle: zèle pour la gloire de Dieu, zèle pour le salut des âmes.
Vous devez en tout, mes chères filles, vous proposer Dieu pour unique but; c’est vers lui que doivent tendre toutes vos actions. Habituées à vivre sous les regards de Dieu naturellement, vous devez rapporter à lui tout ce que vous faites; quelque petite que soit votre action, elle est toujours agréable à N.S. parce que ce divin Sauveur ne considère pas l’action en elle-même, mais le coeur qui la lui offre. Un philosophe de l’Antiquité avait pris pour devise cette parole: En tout, considérez le bien. Solon pouvait avoir un but tout profane, et néanmoins, ce sage de la Grèce avait compris qu’il fallait, pour qu’une action fût bonne, considérer à qui elle devait se rapporter. A qui pouvez-vous mieux faire rapporter vos oeuvres qu’à Dieu? Lui seul saura vous récompenser; les hommes jugent sur les apparences et Dieu lit au fond des âmes. Ah! que vos actions seraient mieux faites si vous les rapportiez à l’unique but, Dieu. Que de péchés n’éviterons-nous pas, et combien notre vie serait agréable à N.S.! Souvent, il arrive que nous prenons pour but les moyens qui nous sont donnés pour y arriver; c’est ce qui explique notre peu de progrès dans la perfection. Nous avons été créés pour connaître, aimer et servir Dieu, et pour la vie éternelle, c’est-à-dire pour retourner vers Dieu. Donc toutes les actions de notre vie doivent tendre vers cet unique but: Dieu. J.C. nous a été donné comme un moyen pour aller à Dieu. N’a-t-il pas dit: Je suis la voie, la vérité et la vie. Or, si nous suivons, si nous imitons J.C., nous serons dans la vraie vie, nous marcherons éclairés par la vérité; et enfin nous aurons la vie qui est Dieu. Marie nous est également donnée comme un moyen infaillible de parvenir à notre véritable but, parce que Marie nous conduira à Jésus son Fils, et Jésus à la vie qui est Dieu.
Le second moyen de sanctifier notre vie, c’est le travail. Ah! ne restez jamais oisives, sachez vous occuper, travaillez, car si vous ne vous occupez pas, le démon saura bien mettre à profit tous les moments que vous ne donnerez pas au travail. Il occupera votre imagination de ces mille et un fantômes qui, en captivant votre esprit, tortureront votre coeur; vous vous laisserez aller à des rêveries plus ou moins fantastiques, vous bâtirez des châteaux en Espagne, et qu’en résultera-t-il d’une journée ainsi écoulée? La lecture, et une lecture plus ou moins romantique, aura été votre seule occupation, et croirez-vous avoir encore pleinement satisfait votre coeur? Non, ulcéré par le remords, il vous conjurera de combler le vide qu’il éprouve; alors vous puiserez dans ces pages diaboliques de quoi le satisfaire, mais en vain. Vous chercherez le repos, mais votre corps plutôt fatigué par des agitations intérieures que par le travail, ne trouvera qu’un faible repos au milieu du trouble d’une nuit agitée. Voilà la vie d’une personne du monde, et si la mort vient la surprendre dans cette lâche inaction, on pourra mettre sur sa tombe cette épitaphe que l’on trouve sur le tombeau d’une reine dont la vie s’était écoulée en actions inutiles: Ci-gît l’oisiveté.
Non, mes chères filles, j’ai la douce confiance que telle ne sera pas votre vie; vous la rendrez active par le travail, unissant, comme Marthe, le soin du ménage à la méditation. Une vie bien réglée est une vie agréable, et comment peut-on vivre sans occupation? Dieu vous a placées dans une position où vous n’avez pas besoin pour subsister du travail de vos mains. Oui, mais sachez que cette parole de Dieu à notre premier père: « Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front » fut prononcée pour tous les hommes; tous, qui que nous soyons, riches ou pauvres, nous devons travailler: c’est une punition infligée à Adam coupable, punition qui, comme son péché, a été l’héritage qu’il a légué à ses malheureux enfants. J’espère donc, mes chères filles, que vous travaillerez, et vous trouverez dans vos occupations quotidiennes, si vous les faites pour Dieu, une douce satisfaction.
Vous devez, en dernier lieu, sanctifier votre vie par un grand zèle: zèle pour la gloire de Dieu et le salut des âmes. Toutes vous n’êtes pas appelées à porter la parole de Dieu dans les pays sauvages; vous n’êtes pas non plus appelées à prêcher dans les églises. Non, mais vous pouvez toutes exercer dans l’intérieur de vos familles une espèce d’apostolat. Toutes vous devez être dévorées du zèle de la gloire de Dieu. Ecoutez le grand Apôtre: « Le zèle de la gloire de mon Dieu me dévore ». Il a bien montré que ce zèle le dévorait. Voyez quelle activité: ni périls, ni dangers, ni menaces, ni persécutions ne l’arrêtent; il sent que le zèle pour la gloire de son Maître le dévore; il court, il vole et il étend la gloire de son Dieu. Vous ne pouvez pas, comme St Paul, travailler par de rudes travaux à la gloire de Dieu, mais ce que vous pouvez faire tous les jours de votre vie, c’est manifester dans vos souffrances, dans vos humiliations, votre zèle pour la gloire de Dieu, en les lui rapportant toutes. Vous manifesterez aussi votre zèle pour la gloire de Dieu en étant très zélées pour le salut des âmes. Ah! que d’âmes vous pourriez arracher à l’enfer, dans l’étroite sphère que vous occupez. Vous n’avez pas besoin, comme St François Xavier, de vous rendre au Japon. Vous avez près de vous des âmes peut-être réduites à l’esclavage le plus dur, des âmes que le démon a subjuguées pour les rendre un jour participantes de ses supplices. Eh bien! pouvez-vous voir d’un oeil sec et indifférent ces pauvres âmes se précipiter dans le gouffre, sans leur tendre une main secourable? Ah! vous n’aimez pas Dieu, vous n’avez pas de zèle pour sa gloire, si vous ne travaillez au salut des âmes. Priez, priez beaucoup, et surtout convertissez-vous, prêchez par l’exemple, exercez, comme je vous l’ai déjà dit, une espèce d’apostolat dans le petit cercle qui vous entoure, cherchez à gagner à Dieu les âmes qui vous sont doublement chères, par les liens qui vous unissent à elles. Par vos prières, vous pouvez procurer le salut d’un nombre infini d’âmes, et sans vous déranger de vos occupations. Il est dit de Ste Thérèse qu’à sa mort elle vit les âmes des milliers d’infidèles qu’elle avait converties par ses prières; à vous aussi la même faveur peut vous être accordée. Priez, priez beaucoup…
En terminant, je veux vous répéter les mêmes paroles par lesquelles j’ai commencé. Fortifiez-vous et soyez énergiques. Encore quelques heures, et vous retournerez à vos occupations habituelles. Le démon sera là près de vous; vos défauts, que vous croyez avoir émoussés, reparaîtront; de nouveaux combats, de nouvelles luttes vont vous être livrés, préparez-vous-y, et soyez fortes et énergiques, car cette tempête, ces vents ennemis ne dureront pas toujours; le calme renaîtra, et avec lui les beaux jours de l’éternité, que je vous souhaite.
Ainsi soit-il.