Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes

16 may 1854 Nîmes Tertiaires Hommes

Méditation sur le *Pax vobis* de Notre-Seigneur : comment parvenir à la paix avec soi-même et avec les autres ?

Informations générales
  • Procès-verbaux du Tiers-Ordre des Hommes
  • Cahier des procès-verbaux 1854-1857
    8. Séance du 16 mai 1854
  • CE 8-15, p. 12-13.
Informations détaillées
  • 1 ABANDON A LA MISERICORDE DE DIEU
    1 AMOUR-PROPRE
    1 ANGE GARDIEN
    1 AUGUSTIN
    1 BONTE
    1 CHARITE ENVERS LE PROCHAIN
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONTRARIETES
    1 DETACHEMENT
    1 EDUCATION EN FAMILLE
    1 EGOISME
    1 ENVIE
    1 EPREUVES
    1 ESPRIT D'INDIFFERENCE
    1 FOI
    1 IMITATION DE JESUS CHRIST
    1 MAITRES CHRETIENS
    1 MAITRISE DE SOI
    1 MALADIES
    1 MANQUE DE FOI
    1 MORT
    1 PAIX DE L'AME
    1 PURIFICATIONS SPIRITUELLES
    1 REGNE
    1 SANTE
    1 SOUFFRANCE ACCEPTEE
    1 SURVEILLANTS
    1 SUSCEPTIBILITE
    1 TIERS-ORDRE DE L'ASSOMPTION
    1 TIERS-ORDRE MASCULIN
    2 CHASSANIS, CLEMENTINE
    2 MILLERET, MARIE-EUGENIE
    2 MONNIER, JULES
    3 NIMES
  • Tertiaires de l'Assomption
  • Tertiaires Hommes
  • 16 mai 1854
  • 16 may 1854
  • Nîmes
  • Collège de l'Assomption
La lettre

16 mai [1854]

Présidence du P. d’Alzon.

Le P.V. du 11 mai est lu et approuvé.

Le P invite les T. à méditer le Pax vobis de N.S. – Comment entrer dans cette paix, à notre égard, à l’égard des autres ?

I. A notre propre égard. Rendons-nous compte de la définition que saint Augustin donne de la paix. Pax est tranquillitas ordinis, c’est le calme qui vient rétablir en nous l’ordre, le calme en face la souffrance, envers l’épreuve, envers les peines et les tristesses. Nous nous troublons quand nous passons par là, nous nous désorientons: c’est que l’esprit de foi ne règle point nos pensées. Que devrions-nous dire en effet: « les événements, les circonstances sont pénibles: eh bien! ne suis-je pas, en définitive, un chrétien assez peu ordonné. Or, si la peine vient me rendre à moi-même, si je l’accepte comme un purgatoire, je fais de l’ordre en souffrant, en expiant, je rentre dans l’ordre qui n’existait pas en moi. N’est-ce point la paix, toute la paix, Tranquillitas ordinis ?

Remarquons l’effet de cette disposition calme, résignée, soumise. La souffrance semblait devoir être un obstacle à notre bien, nous la transformons au contraire, en moyen de sanctification, et par elle, nous nous purifions: quoi de meilleur ? La mort peut-être va venir: tant mieux, nous partirons pour l’autre monde purifiés, prêts pour le ciel. Consentir, d’un consentement simple à souffrir, voilà la paix. Tranquillitas ordinis, tout est remis à sa place. Le trouble nous arrivait, il en est sorti pour nous l’équilibre. Avons-nous à nous plaindre ?

II. Paix envers nous-mêmes, paix envers les autres. Portons la paix partout où nous sommes. Si nous sommes mariés, établissons la paix dans la famille; si nous ne sommes pas mariés, répandons la autour de nous. Arrivons à l’indifférence, à l’impassibilité chrétiennes.

Laissons tout tomber, susceptibilités, jalousies, rivalités. Soyons maîtres de nous. Mettons-nous entre les mains de Dieu comme un instrument pacifique et pacifiant. Qu’il y ait en nous, dans nos discours, dans notre silence, dans toute notre conduite, une aimable paix, et qu’elle se communique aux autres. Où est la source de cette paix ailleurs que dans l’imitation de N.S.J.C., ailleurs que dans la charité ? Et n’est-ce pas après tout la devise du T.O.: « le règne de Dieu dans les âmes, PAX VOBIS ».

Appliquons à cette pensée nos méditations: demandons cette grâce de paix, de suavité, de bienveillance, dans nos communions. Professeurs, dans nos classes, dans nos relations avec les élèves, apaisons beaucoup, laissons s’épanouir les coeurs; – Surveillants, soyons comme des fleurs de paix dans nos études, apportons à notre surveillance la charité des Anges gardiens. Pour arriver là retranchons tout ce qui détruit la paix en nous, diminuons, effaçons l’individualité! Egredere : utilisons ce mot d’un saint. Sortons de nous-mêmes, ne nous emprisonnons pas dans notre petitesse, oublions-nous. A l’imitation de J.C. acquérons, nous aussi, des mérites par l’effusion de notre sang, c’est-à-dire par l’immolation de l’esprit particulier.

Surtout que cela ne soit pas seulement de la spéculation, une vaine théorie. Demandons humblement, et sans cesse, pour nous, pour les autres, cet esprit de paix, de support, de bienveillance. Nous ne nous chercherons plus alors nous-mêmes dans nos actions, et nous aurons une influence effective, bonne, secourable, toute d’édification, parce que, dégagés de l’égoïsme, nous aurons fixé le principe de nos actions dans le seul amour.

La séance est levée(1).

Le Président:|Le Secrétaire: J. Monnier.
Notes et post-scriptum
1. En entendant le P. d'Alzon entretenir les Tertiaires, le 16 mai 1854, de la paix envers soi-même, de l'acceptation de la souffrance, de la mort qui peut-être va venir, on ne peut s'empêcher d'évoquer la grave crise de santé qui le menace et approche.
Dès le 14 mai, il s'est dit "pris de la tête" (*Lettre* 389). Le 16, le jour même de notre réunion, il termine une lettre à Mère Marie-Eugénie en disant: "je n'en puis plus, ma main refuse de tracer les mots" (*Lettre 390). Le même jour il se trouve mal devant Clémentine Chassanis: "Il y a, si je ne me trompe aujourd'hui 16 ans, lui écrit-il le 16 mai 1870, que vous me vîtes chanceler et commencer cette maladie dont la mort seule me guérira" (*Lettre* 4040). Le 19 à Mère M-Eugénie il écrit: "je ne vais pas mal, mais j'ai pourtant des agitations de sang qui me préoccupent" (*Lettre* 392). La congestion est imminente, elle le frappera le jour-même (v.les notes de la *Lettre* 392 et les *Lettres* 393 et suivantes).
La prochaine réunion du T.O. que le P. d'Alzon présidera ne se tiendra pas avant le 30 octobre.