Aux élèves du collège

1857 Nîmes COLLEGE élèves
Informations générales
  • Aux élèves du collège
  • Instruction religieuse. Classe de Rhétorique.
    Quatrième conférence. Pourquoi des signes extérieurs dans les sacrements ?
  • Ms de Frédéric Fabrege, élève au Collège de l'Assomption en 1857, Arch. Départ. de l'Hérault 18 F 3; Photoc. ACR.
Informations détaillées
  • 1 AMOUR DIVIN
    1 AMOUR DU CHRIST
    1 BEAUTE DE DIEU
    1 BON EXEMPLE
    1 CHATIMENT
    1 COLLEGE DE NIMES
    1 CONCUPISCENCE DE LA CHAIR
    1 CONTRITION SACRAMENTELLE
    1 ELEVES
    1 EUCHARISTIE
    1 FERME PROPOS DANS LA CONFESSION
    1 FOI
    1 GRACES
    1 HUMILITE
    1 JESUS-CHRIST AUTEUR DE LA GRACE
    1 JUSTICE DE DIEU
    1 LACHETE
    1 LUTTE CONTRE LE CORPS
    1 LUTTE CONTRE LE PECHE
    1 LUTTE CONTRE SATAN
    1 LUTTE CONTRE SOI-MEME
    1 MANQUE DE FOI
    1 MONDE CREE
    1 MORT DE L'AME
    1 ORGUEIL
    1 PAGANISME
    1 PARDON
    1 PENITENCE IMPOSEE
    1 PEUPLE DE DIEU
    1 PROVIDENCE
    1 PURIFICATION
    1 RESPECT HUMAIN
    1 REVOLTE
    1 RHETORIQUE
    1 SACREMENT DE PENITENCE
    1 SACREMENTS
    1 SAGESSE DE DIEU
    1 SALUT DES AMES
    1 SCANDALE
    1 SYMBOLISME CHRETIEN
    1 TRIPLE CONCUPISCENCE
    1 TYRANNIE DES SENS
    1 VERTU DE FORCE
    1 VERTU DE RELIGION
    1 VOIE UNITIVE
    2 FABREGE, FREDERIC
    3 HERAULT, DEPARTEMENT
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  • COLLEGE élèves
  • 1857
  • 1857
  • Nîmes
  • Collège de l'Assomption
La lettre

Quatrième conférence

– Pourquoi des signes extérieurs dans les sacrements ? –

Nous avons déjà répondu en partie à cette question, cependant il importe d’y revenir afin d’indiquer quelques causes qu’on ne saurait trop méditer.

Jésus-Christ a voulu attacher certaines grâces à des signes extérieurs pour divers motifs.

1° Parce que l’église étant une société extérieure, ce signes sont pour ceux qui la composent un moyen de se reconnaître entre eux. Ce sont les symboles du christianisme; ce sont les signes de ralliement de la société spirituelle de même que la société temporelle a les siens. Les sacrements remplissaient surtout cette fonction dans les premiers temps de l’église où les réunions étaient très difficiles et où il était nécessaire de distinguer les fidèles des infidèles. D’ailleurs les payens [sic] ont encore des signes particuliers pour se reconnaître. (PAGE 28)

2° parce que l’homme doit à Dieu l’hommage de tout son être, et par conséquent de ses sens qui sont en quelque sorte subjugués par ces signes.

3° parce que les sens ont participé au péché et qu’il convient de les purifier par une action extérieure. En effet, toutes les fois que nous pêchons, nous scandalisons notre prochain. Il convient donc que nous l’édifions en nous approchant des sacrements, une fois que nous nous repentons de nos péchés.

4° Le péché a apporté le trouble dans le monde extérieur. Les éléments se sont révoltés contre l’homme, lorsque l’homme s’est révolté contre Dieu. Et le voilà donc impuissant devant les êtres que le créateur lui avait donnés. Or Jésus-Christ étant venu sur la terre pour réparer les désordres du péché n’ayant pas cependant voulu détruire tous les effets funestes de rébellion formée par le premier homme, il a voulu toutefois disposer les choses de telle sorte que le monde extérieur pût ressentir l’effet de son expiation divine. Et c’est dans ce motif qu’il a choisi parmi les éléments révoltés, la matière. Il lui a pour ainsi dire attaché sa grâce afin que (PAGE 29) le monde extérieur étant une occasion de péché pour l’homme, le monde extérieur fût aussi pour lui un moyen de réhabilitation. C’est, il faut l’avouer, un sujet d’humiliation pour l’homme, puisque les objets matériels aussi vulgaires qu’un peu de pain, d’huile ou de vin sont une condition nécessaire des plus grandes faveurs de la part de Dieu. Mais enfin l’homme ayant péché par l’orgueil, il convient qu’il soit réconcilié avec Dieu par l’humiliation. Le moyen de salut est ainsi la juste réparation du péché, la cause de sa chûte.

5° Au fond de tout péché nous voyons un grand orgueil suivi d’une immense lâcheté et d’un amour désordonné des plaisirs sensuels. Il convient donc essentiellement que la réparation du péché porte en elle une humiliation, un acte de courage et l’emploi sanctifié de la matière dont l’homme a abusé. Voilà, pour tout dire en un mot, le triple but qui est atteint par ce qu’il y a d’extérieur dans les signes sacramentaux. L’homme est atteint dans son orgueil, puisqu’il est obligé de s’abaisser (PAGE 30) devant un peu de matière. Dieu prouve ainsi à l’homme qu’elle n’est pas mauvaise en elle-même, comme l’ont prétendu certains philosophes; et, en effet, c’est à des éléments matériels qu’il emprunte des moyens de salut. Un acte de courage est principalement exigé en face des lâchetés souvent innombrables du chrétien, lorsque après des révoltes souvent bien longues, il est forcé d’aller demander le pardon de ses fautes et la grâce d’éviter de nouvelles souillures à des signes extérieurs.

Laissons de côté le baptême et la confirmation qui ne se confèrent qu’une fois. Ne parlons pas non plus de l’ordre. Ce sacrement n’est institué que pour la portion choisie de la société ecclésiastique. Occupons-nous seulement de deux sacrements qui doivent revenir le plus fréquemment dans la vie du chrétien : la pénitence et l’eucharistie.

L’homme contracte sans cesse par le péché de nouvelles maladies. Il doit aussi recourir sans cesse aux remèdes spirituels, aux sacrements. Car si le corps est détruit par les maladies, l’âme meurt (PAGE 31) aussi de la mort causée par le péché. Et l’âme du pécheur ne peut recevoir aucune grâce, aucune faveur s’il ne cherche là la guérison de son mal. Mais pour l’obtenir, cette guérison, il faut s’humilier. Et par effet, l’orgueil étant un de nos principaux ennemis, il ne peut être subjugué, vaincu que par l’humiliation. Aussi le pécheur doit-il se mettre à genoux devant son semblable, et confesser ses fautes, reconnaître ses erreurs, en demandant pardon à Dieu et recevoir de lui par l’intermédiaire du prêtre, des paroles de consolation et une pénitence temporelle. Il n’est pas d’actes plus humiliants et l’on comprend facilement que l’homme repousse ce mode de satisfaction surtout si l’orgueil est maître de nos âmes.

La raison philosophique de l’institution des remèdes sacramentels, comporte un motif qui les fasse repousser par l’orgueil et la lâcheté de l’homme. Et loin de l’accepter, ces deux vices de notre faiblesse dédaignent ces moyens de salut. En effet, la confession n’a de valeur que si l’on s’engage à ne plus pécher. L’homme (PAGE 32) se refuse à prendre un tel engagement; car il comprend l’impuissance où il est de pouvoir le tenir. Il lui répugne aussi de faire des aveux humiliants, surtout lorsque sa foi n’est pas bien vive et qu’il ne voit dans le confesseur qu’un homme sujet aux mêmes erreurs. Il n’aime guère plus de satisfaire à la justice divine. Devant tous ces actes, la lâcheté du pécheur recule de plus en plus et c’est là le motif qui fait soutenir tant d’opposition contre les signes extérieurs des sacrements, la pénitence, par les hommes qui ne savent pas combien est étroit le chemin du ciel.

S’il ne s’agissait que d’une théorie, on trouverait toutes ces institutions fort belles; mais quand il faut en venir à la pratique, le joug semble trop lourd et la lâcheté recule, s’indigne et s’écrie: « Je n’en veux pas! »

Constatons seulement et d’une manière positive que dans le refus des moyens extérieurs de salut imposés par la miséricorde divine comme condition du pardon des péchés, il y a tout à la fois un grand orgueil et une lâcheté non moindre. (PAGE 33) L’orgueil se refuse à l’humiliation; et la lâcheté ne veut point contracter un engagement qu’elle violerait presque aussitôt.

Tout ce que nous avons dit sur la pénitence peut s’appliquer à l’eucharistie. Sans doute, il n’est rien d’admirable comme cet abrégé des merveilles de Dieu, selon l’expression du psalmiste. Tout en effet se trouve renfermé dans l’eucharistie : puisqu’il contient à la fois et les grâces les plus abondantes et l’auteur lui-même de la grâce.

Que peut-on imaginer de plus grand pour l’homme que l’union avec Dieu le créateur ? Rien ne peut animer autant, dilater et exciter davantage le coeur de l’homme s’il reçoit ce sacrement avec foi et amour. Mais pourquoi entoure-t-on d’une telle négligence une pareille marque de la charité divine ? Est-ce un manque de foi ? Assurément non pour la plupart.

L’orgueil qui prend trop souvent la forme du respect humain est l’une de ces causes. A lui se joint la lâcheté qui devant l’infinie pureté de la splendeur éternelle du Père ne veut point (PAGE 34) donner à l’âme l’innocence nécessaire pour n’être pas trop indigne de son union avec Dieu. C’est ici qu’on ne saurait trop admirer par quels moyens si simples, Dieu rend les hommes inexcusables. Il met à leur disposition toutes sortes de secours aux conditions les plus faciles. En agissant ainsi, il leur montre la grandeur de leur faute, lorsqu’ils repoussent les moyens que leur a donnés sa miséricorde divine. Que peut-on conclure de tout cela ?

Nous croyons qu’il y a plusieurs conclusions à tirer de ce que nous venons de dire. D’une part nous admirerons l’infinie sagesse de Dieu qui a su donner à son église des liens aussi faciles et aussi merveilleux que les signes extérieurs des sacrements. D’autre part, nous admirerons encore cette disposition non moins étonnante de ce que nous appellerons la providence surnaturelle, qui répare en quelque sorte les abus de la matière en fesant concourir cette matière à la sanctification de l’homme. D’un autre côté nous connaitrons le crime du pécheur (PAGE 35) dont l’orgueil et la lâcheté repoussent des moyens si aisés de se fortifier contre lui-même, contre ses vices, contre ses penchants, et en un mot contre le démon. Enfin nous avouerons la justification pleine et entière de Dieu puisqu’il n’a rendu l’homme inexcusable qu’après avoir mis à sa portée tout ce qui était nécessaire pour rompre ses liens et sortir vainqueur du combat contre la chair, le monde et l’enfer.

Notes et post-scriptum