Je fais savoir au noviciat que je suis toujours dans les idées sombres. Aussi, quoique le mal semble être moins violent dans les environs, cependant il fait toujours des siennes, et, tandis que c’est la suette qui sévit en certains endroits, voilà qu’on me dénonce un village voisin comme ayant la petite vérole. Bref, ce n’est pas gai, et les novices doivent être joliment contents de ne pas avoir leur jolie figure exposée au grelage. Enfin, j’ai une idée. Puisqu’il y a la liqueur des Chartreux, celle des Trappistes, l’eau des Carmes, le kermes des Dominicains, plus l’élixir des Jacobins, est-ce que nous ne pourrions pas avoir quelque drogue qui empêcherait les gens de mourir et qui ferait vivre le noviciat? Nous l’appellerions essence de l’Assomption ou de tout autre nom qui vous serait agréable. Le P. Cusse avait dans le temps fabriqué quelque chose de cette espèce. Quel dommage qu’il soit en Australie! Enfin, je vous livre cette idée, avec laquelle je suis votre très humble serviteur.
Lettre au P. Alexis Dumazer (Lettres, t. V, p. 95-96).
(1) Le P. d’Alzon qui ne manquait pas de caractère, savait aussi manier l’humour à ses heures. Lui déplaisait la grossièreté, mais non le sel de l’esprit. En homme racé, il savait aussi que l’on prend plus de mouches avec du miel qu’avec du vinaigre. On aurait aimé connaître par curiosité la décoction préparée par le P. Cusse dont la santé était plutôt faible, mais ce breuvage devait plutôt avoir les allures d’une solution médicamenteuse! L’essence de l’Assomption’ n’a pas (encore) vu le jour!