Je reviens à vous, et c’est pour vous dire que ma grande conviction est celle-ci: que vous devez vous appliquer à changer le mal en bien, c’est-à-dire à vaincre en vous toutes choses comme Jésus-Christ les a vaincues en lui lorsqu’il s’est fait homme pour nous pécheurs, malgré nos péchés; car il nous aimait lorsque nous étions dans le mal, et s’il ne nous eût pas aimés, malgré le péché originel et les autres qui en sont la suite, il ne se fut pas livré pour nous. C’est donc Jésus-Christ aimant sa créature malgré les péchés dont elle est couverte, que je vous propose pour modèle; et ce sera un excellent sujet de réflexion pour le temps de l’Avent que cet amour du Sauveur qui nous recherche au-delà de nos péchés. Vous pourrez comparer ses divines dispositions aux vôtres, et je ne doute pas que ce ne vous soit un grand sujet de confusion et d’abaissement. Voilà que je m’arrête, on me dérange. Je me propose de prier beaucoup pour vous pendant l’Avent; rendez-le moi. Je ne puis vous dire combien je vous veux toute la sainteté qui ferait de vous une épouse digne de Notre-Seigneur.
Lettre à Mère Marie-Eugénie de Jésus (Lettres, t. XIV, p. 462).
Note. Il existe une théologie de la souffrance bien connue et très occidentale dont la porte d’entrée depuis saint Anselme est l’expiation. Mais dans la théologie orientale, la rédemption est elle-même un retour à Dieu, c’est-à-dire un retour à la nature humaine déiforme. L’appel à la sainteté n’est donc pas en conséquence de la nature pécheresse de l’homme. Le Christ par la Rédemption entraîne l’homme et la création tout entière dans l’union à Dieu, le retour à la vraie vie.