Portrait d’un laïc, d’un ami, d’ un apôtre : Jules Monnier.

Un soir du Carême 1837, M. Germer-Durand, professeur au lycée et chrétien comme il en faudrait beaucoup, présenta au P. d’Alzon un de ses amis touché par les sermons de M. l’abbé Reynaud, du clergé de Toulouse, et prédicateur à la cathédrale. C’était un jeune homme dont l’œil révélait la franchise, l’ardeur, une vive sensibilité: sa voix, où vibrait une impressionnabilité nerveuse, était extrêmement sympathique; son grand front, encadré dans de beaux et longs cheveux, portait l’empreinte du travail, et sa taille frêle semblait pencher sous les efforts d’une volonté énergique et les élans d’une imagination embrasée par le cœur… Jules Monnier, professeur au lycée comme M. Durand, était une de ces natures exquises, égarées dans l’Université, hors de sa voie… Plein d’une intelligence supérieure, mais très maîtresse d’elle-même, souple, délié, ne renversant pas les obstacles, les tournant plutôt, et les laissant assez loin derrière lui pour prouver que la ligne courbe est quelquefois la plus directe d’un point à l’autre. Quand je parle de ligne courbe, Dieu me garde de dire que tout ne fût pas très droit chez lui, mais s’il rencontrait une montagne, il trouvait plus court de prendre à droite ou à gauche, que de la faire sauter avec des pétards.

L’Assomption de Nîmes, 1875, n° 4, p. 25-27.

(1) Jules Monnier (1815-1856), agrégé de l’Université, vint enseigner au collège de l’Assomption de Nîmes, fit partie des membres du Tiers-Ordre masculin et des Conférences Saint-Vincent de Paul.