Savoir prendre des temps de retraite pour laisser respirer son âme et son corps.

Voici le sixième jour de ma retraite. J’en ai encore huit ou neuf, mais il me semble que je puis commencer à vous parler de moi. Vous me demanderez peut-être: ‘Pourquoi faire une retraite si longue?’. D’abord, les saints en faisaient de quarante jours. Puis, c’est parce que je ne suis pas un saint que j’ai voulu me recueillir un peu plus longtemps, et je m’applaudis de ma résolution. Les premiers jours, j’étais sous le poids d’une fatigue physique qui me faisait dormir jusque dix à douze heures par jour, soit la nuit, soit après-midi, soit encore sur mon fauteuil. J’ai cru devoir me laisser aller sans trop de scrupule à ce besoin de sommeil. Maintenant je commence à me troubler un peu, parce qu’il faut mettre un terme à tout. Voici ma pensée, je vous la soumets. Il est certain que, par expérience, je suis à l’époque de l’année où je dors le plus, après les nuits d’été si fatigantes, quoique je n’en aie pas beaucoup souffert cette année; puis, ma tête a un peu plus travaillé, à cause de l’oraison funèbre de l’abbé Durand, de mes articles sur le mouvement anglais, de mon discours de la distribution des prix etc. Il m’est avis que je ferai bien de reprendre peu à peu l’habitude de dormir d’une façon qui ne soit pas trop scandaleuse.

Lettre au P. François Picard (Lettres, t. VI, p. 110-111).

Note. Une retraite peut commencer par un bon temps de repos, semble souligner le P. d’Alzon, pourvu qu’elle ne se transforme pas en une sieste prolongée. L’assoupissement, bon pour le corps, peut se révéler mortel pour l’âme. Un auteur n’a-t-il pas écrit que ‘dormir, c’était de désintéresser’.