Maurice est probablement parti à l’heure qu’il est, ma chère cousine, ou, du moins, bien près de son départ. On a reçu, ici, l’ordre de renvoyer à Rome les zouaves du diocèse. Les nôtres étaient déjà à leur poste, mais aussitôt j’ai pensé à votre fils. Hélas! oui. Il y a là de grandes, d’immenses angoisses; mais aussi quel honneur devant Dieu! Le cœur saigne et se tord, et pourtant ne voudrait pas reprendre ce qu’il a une fois offert. C’est dans ce sentiment, j’en suis sûr, que vous donnez, avec une grande amertume sans doute, mais avec un grand amour, ce que vous avez de plus cher au monde. Je vous avoue qu’il y a, à mes yeux, à pareil moment,une différence entre laisser aller un fils au couvent et l’envoyer à un champ de bataille italien. Enfin, ma chère fille, croyez que votre pensée m’est bien souvent présente et que je vous plains, que j’ai quelquefois la tentation de vous admirer, mais que mon cœur s’attache au vôtre pour le soutenir, si c’est possible, avec toute la force dont je suis capable.
Lettre à Mme Louis de Giry (Lettres, t. VI, p. 385).
(1) Maurice de Giry (1847-1870), fils du couple Louis de Giry et Constance née Roussy de Sales, fut élève du collège de l’Assomption à Nîmes et mourut comme zouave pontifical à la Porta Pia à Rome en 1870.